mercredi 26 décembre 2018

La Grande Année Vigneronne




La Grande Année Vigneronne

En février 1947, une plaquette a été éditée pour être vendue à Montpellier au bénéfice des Œuvres des Escoliers du Languedoc, qui était une caisse suisse de secours aux étudiants victimes de la guerre et de la Résistance. 
Ce sera l’occasion de manifestations artistiques et d’amitiés du 6 au 10 mars 1947, organisées par le Comité Suisse d’Action. Les artistes qui participent à ce livret veulent faire connaitre les beautés d’un autre pays de langue d’oc, comme le poète Ramuz, avec son Chant des Pays du Rhône. Le maître-imprimeur Ch Corbaz de Montreux, le maître-photograveur Fernand Dupuis de Lausanne sont de l’aventure. Tous se souviennent que parfois leurs lointains ancêtres languedociens sont devenus Suisses par la volonté de notre roi Louis XIV et du vent de l’Histoire, la langue d’oc cousinant avec la leur, qui s’était installée bien avant dans ces hautes montagnes. Sur les contreforts orientaux suisses du massif du Jura, une petite commune s’appelle Provence et à Lausanne un quartier porte aussi ce nom.

Paul Budry, journaliste, écrivain, critique d’art vaudois et un des « pères » de la littérature vaudoise du 20ème siècle avec Ramuz et Gilliard, nous fait cadeau dans ce livret d’un calendrier du vigneron. Voici Décembre et Janvier.

« Décembre …Plus personne sur les murets. Cette première neige est venue comme une couette mouillée. Des convois de feuilles grillées courent le long des murs avec un bruit de vieux papiers. C’est alors que vient le charcutier avec son tablier blanc et que s’entendent ces grandes ciclées du cochon qui pleure de devoir partir en saucisses. Le médecin vient aussi parce que c’est ce mois qu’un chacun voit ce qui ne va plus tant bien dans sa machine. L’un la goutte, l’autre les reins, le foie, le catarrhe…. Au bord de la route le distillateur amène son coquemar du diable, autour de quoi il fait chaud et ça sent le schnaps réchauffé, et chacun apporte ses deux, trois, quatre sacs de marc à bouillir. L’acheteur s’amène et fait l’affaire sous la machine. Les gosses les bonnets tirés sur les oreilles, regardent aux vitres de l’épicerie la dame installer ses surprises de Noël, tout rubans, fausse neige et papiers arc-en-ciel. Toi, vigneron, tu scies ton bois dans ta remise, porte ouverte et quand ta scie est seule à s’ennuyer auprès du chevalet, on sait te trouver à la cave, retapant tes vases, ou deux, trois assis sur des plots à portée du guillon, débattant des affaires communales. Couché avec les poules, la journée n’est plus qu’un petit bout de journée. Et Noël est venu sans bruit. Voici l’an neuf, Vigneron, va falloir se réabonner à l’ouvrage. Bonne année, regarde-moi cette vendange qui est écrite dans les étoiles…. »


« Janvier …. Cimente tes murs les jours qu’il ne gèle. Et mine ce qui doit l’être aux alentours du Nouvel-An, terre gelée s’en porte mieux. Ta vigne dort toujours, Vigneron, ne fais pas comme elle ! Quand la nuée secoue ses plumes, fends-moi des échalas biens droits, tire ta paille de lève. Bon vigneron ne va pas quérir ça au bazar. Et passe-moi ce sécateur à la meule. Il y aura tantôt de l’ouvrage pour cet ami. « Taille tôt, taille tard, faut finir à la Saint-Grégoire !!»…. Ne laisse pas non plus ton vin s’ennuyer à la cave, va lui dire deux mots tant que le cœur t'en dit. Ouvre les soupiraux, qu’il voie revenir le soleil. Il est bien content, il s’éclaire ; on commence à se voir à travers, les trois les quatre qu’on est à regarder grandir ce jeune fils. Il fait ses premiers pas sur la langue des connaisseurs. Il répond, le ciel soit loué ! Ces messieurs de la ville peuvent venir, il est là. Bientôt Vigneron tu vas savoir ce qu’on veut payer tes sueurs. Va falloir prévoir pour les fumiers, pour les effeuilleuses… Vigneron, les années se suivent et tout recommence. Celle qui vient sera la bonne des bonnes. Bonne nuit.


Sources : Le Valais Le Lac Léman magnifiés par leurs Ecrivains de Langue d’Oc 1947—photos E Gygeer et Klopfstein à Adelboden , Gos de Lausanne, G Mussler de Sion, L Blanc de Lausanne—on peut lire ou relire La Nouvelle Héloïse de Jean-Jacques Rousseau et sa rencontre avec le lac Léman---

Ciclée : cris perçants





dimanche 16 décembre 2018

Lire et relire Les Santons et la Crèche du 7 /12/ 2017 La bûche de Noël du 20/12/ 2017

Lire et relire sur ce blog : 




Les Santons et la Crèche  du 7 décembre 2017

La bûche de Noël du 20 décembre 2017

Bon Noël à tous et que pour 2019, si nous ne sommes pas plus, que nous ne soyons pas moins !!

vendredi 7 décembre 2018

La Révolte d'Anthoine du Roure




La Révolte d’Anthoine de Roure

Les événements actuels me font penser à un épisode sanglant du 17è/18ème siècle. Il serait bon que l’Histoire ne se reproduise pas et qu’elle nous apprenne quelque chose !

Le régime du roi Louis XIV ne sera pas tendre avec les rébellions du peuple. La révolte du Roure sera une jacquerie ardéchoise antifiscale qui embrasera le Languedoc d’avril à juillet 1670. L’hiver 1669, tous les oliviers de la province gèlent, de Montpellier à Aubenas ; le printemps suivant c’est la grêle qui détruit les récoltes. Le prix de vente du vin et du blé baisse. Le problème religieux démoralise le pays…. Les guerres de Louis XIV saignent les gens. Partout on se plaint de la multiplicité des taxes et impôts. L’évêque de Viviers qui présidait la tenue des Etats du Languedoc à Montpellier observait en novembre 1669 que les tailles (impôts) croissaient plus vite que les revenus des produits de la terre. Aux impositions ordinaires et aux contributions exceptionnelles s’ajoutaient deux mesures très impopulaires : le désarmement des habitants et la réglementation draconienne de la chasse.

La taxe sur les cabarets qui doit financer les travaux du Canal du Midi met le feu aux poudres.
Une rumeur court les campagnes, l’instauration d’impôts nouveaux, sur les chapeaux, les souliers, les chemises, sur les journées des travailleurs, sur la naissance des enfants….10 livres pour la naissance d’un garçon, 5 pour une fille, 5 sous pour un chapeau, 3 pour des souliers…. 10 livres c’est trois semaines de salaire pour un manœuvre !! L’exaspération, la colère sont souvent cousines de l’imaginaire des foules…. La rumeur s’amplifiait, se gonflait au gré d’une rage sourde.

Le 30 avril un commis des fermes Barthélemy Casse venant de Béziers est mis à mal par des manœuvres et des femmes du quartier Saint-Antoine à Aubenas. Il placarde des affiches qui concernent cette fameuse taxe sur les auberges : 2 écus pour chaque cheval de louage, 8 livres pour chaque cabaretier. Donc des taxes qui ne visaient que très peu de personnes. Mais les habitants la plupart ne sachant pas lire croient qu’il s’agit des impôts de la fameuse rumeur. Plusieurs femmes et ouvriers vont attaquer Casse à l’auberge des Trois Pigeons où il est descendu ; il saute par la fenêtre et s’enfuit par la porte de Belvèze. On le poursuit à coups de pierres jusqu’à la tuilerie du sieur Rogier où il demande un confesseur. Les soldats du prince d’Harcourt seigneur d’Aubenas écartent les attaquants et le conduisent au logis du Pont. Le lendemain les mutins décident de s’en emparer. Les femmes enfoncent les portes. En s’enfuyant Casse se noie dans l’Ardèche au Pont-d’Arc.

Le chef des émeutiers Bancatte est arrêté et emprisonné. Le lendemain il est libéré par les manifestantes. Et la région du Vivarais s’enflamme. Le tocsin sonne, la révolte est générale.
En Vivarais 4000 paysans entrent dans le village de Joyeuse où devait se tenir l’Assemblée de l’Assiette (où l’on discute et vote les impôts). Le village de Largentière est aussi investi. On dévalise les commerces, on saccage des maisons… Des paysans armés de faux, de fourches, de quelques mousquets menacent les notables, notaires, prêteurs, nobles… Privas est menacé, Aubenas saccagé... 

Le 14 mai, Anthoine du Roure prend la tête du mouvement sous la pression populaire. C’est un propriétaire terrien, de petite noblesse, de ceux qui travaillent sur leurs terres. Sa famille sortait du Mas de Chartrenas de la paroisse de La Chapelle-sous-Aubenas ; ménagers ayant évolués vers une plus large aisance. Son surnom est le Chevalier-Laboureur. Il vit dans le village de La Chapelle-sous-Aubenas en Ardèche. Il est aisé, il dispose de 10 000 écus de biens et biens apparentés. Il a servi dans l’armée, en Flandres et en Roussillon comme capitaine des milices. Il est éduqué, respecté, intelligent. Bon catholique, trois enfants dont un fils qui étudie chez les jésuites d’Aubenas, il est touché par la misère des paysans et des artisans. C’est un tribun remarquable.. Ce sera sa bannière bleue et un ruban bleu au chapeau qui seront l’emblème de la révolte. Il devient Jacques Roure. Il est âgé de 45 ans environ.

Le gouverneur du Languedoc le Marquis de Castries, depuis Bourg-Saint-Andréol où il est arrivé par marches forcées signe une ordonnance défendant sous peine de mort, les attroupements, la mise en circulation de faux nouvelles irritant le peuple. 200 soldats partent pour Aubenas.
Roure nommé généralissime et protecteur du peuple est à la tête de 6000 hommes venus de 20 paroisses autour d’Aubenas. Ils marchent sur Villeneuve et met en fuite le Grand-Prévôt. Le comte de Vogüé essaie une conciliation jusqu’à ce que le Marquis de Castrie fasse connaître ses nouvelles idées. Ce dernier par une nouvelle ordonnance promet l’abolition du passé, et les troupes de Roure se séparent. On a évité le pire pour un temps. Le commerce et le travail reprennent.

Mais le châtelain d’Aubenas fait savoir que le roi ne pardonne pas les meurtres, les sacrilèges, et l’affichage appelant à la révolte.
Alors tout recommence : les partisans de Roure décident qu’est venu le temps pour eux de gouverner un peu et qu’ils ne veulent plus marcher en aveugles. « Le pot de terre doit casser le pot de fer ». La colère et la surdité des uns et des autres sont mauvaises conseillères.

Des députés promettent d’aller exposer au roi les demandes du peuple. Des soldats arrivent à Aubenas, les bourgeois se réfugient au château et au collège des Jésuites. Roure entre dans la ville avec 8000 hommes. On se tire dessus, des habitants sont massacrés, souvent ceux qui n’ont pas choisi leur camp quel qu’il soit. Au bout de quelques jours le ravitaillement devient difficile et Roure quitte Aubenas avec ses hommes. Des rencontres ont lieu à Alba : on promet à Roure et à ses lieutenants l’amnistie générale s’ils posent les armes et s’ils font amende honorable.
Mais ces entrevues ont pour but de gagner du temps. L’armée royale n’est pas loin. Roure comprend qu’il a été dupé. Il publie un manifeste envoyé à toutes les communautés :"NOUS JACQUES ROURE, À TOUS NOS AMIS, ET À TOUS LES PEUPLES DU VIVARAIS, SALUT !…" Il y expliquait les causes de la révolte, les détournements de fonds publics par des seigneurs et des élus, et exhortait tout le monde à une défense légitime.
Le gouvernement veut frapper un grand coup : les mousquetaires de la Maison du Roi dont d’Artagnan, 3000 fantassins, 1600 cavaliers, 400 suisses et toute la noblesse des alentours.. Tout ce monde se retrouve à Lavilledieu entre l’Auzon et le village… Ce sera un carnage : les cavaliers, les soldats à pied poursuivant les insurgés dans les rochers, les broussailles. Les paysans n’avaient aucune chance.

L’armée royale est à Aubenas le 27 juillet. Le 28 commence le procès des coupables à Nîmes : dans l’immédiat, deux sont roués, six pendus sous les halles, deux autres aux galères, un grand nombre sont banni, deux femmes condamnées au fouet…. Mais la répression sera encore plus effroyable à l’extérieur des tribunaux. Les hameaux brûlés après avoir été pillés, bestiaux, foin, meubles, tout était volé…  600 personnes sont tuées et 400 envoyées aux galères. On torture, on pend, on fouette jusqu’à la mort.
Les soldats pillent, passent au fil de l’épée les gens qu’ils trouvent. C’est la terreur comme punition. Les habitants se terrent dans les montagnes. Il faudra une ordonnance de l’intendant du Languedoc du 20 août 1670 exigeant sous peine de mort que les habitants regagnent leurs demeures pour ramener calme et activités dans la région.
Les biens d’Anthoine du Roure sont détruits, maisons, grange, fondations comprises, les bois dégradés. Sa famille est proscrite. (Sa maison devait être détruite, ses terres vendues et sa famille bannie. La sentence ne fut semble-il pas entièrement exécutée.)
Les clochers des villages de La Chapelle, Ailhon, Lavilledieu sont étêtés, les cloches descendues.
Le 21 août Roure en fuite est condamné par contumace à Villeneuve-de-Berg..
Roure proscrit veut présenter une requête à Louis XIV. Il demande conseil au procureur de Toulouse, Bouet, qui lui déconseille de le faire et lui recommande plutôt de gagner l’Espagne. Mais Bouet pris de remords le fait arrêter à Saint-Jean-Pied-de-Port. Il sera roué vif à Montpellier le 29 octobre, son cadavre exposé sur le grand chemin de Montpellier à Nîme, sa tête placée au-dessus de la porte Saint-Antoine à Aubenas. Ces crimes : lèse-majesté, rébellion, attroupements avec port d’armes, sacrilèges, incendies, cruautés énormes, expédition d’ordres et de passeports, convocation d’assemblée contre le service du roi….


(Ancienne maison de Jean Balazuc, gendre d'Anthoine du Roure, actuellement mairie de Lachapelle) La ville d’Aubenas est condamnée à 500 écus d’amende envers le roi et La Chapelle à 800 écus ainsi qu’aux frais de justice. Le roi pardonne par une lettre du 30 août 1670 mais le pardon ne s’applique pas aux meneurs et aux cinq ville ou villages accusés d’avoir aidé les révoltés : La Chapelle, Aubenas, Ailhon, Vogüe, Lavilledieu. Ces communautés n’auront plus de consuls, leurs syndics ne porteront plus le chaperon signe de leur dignité. La ville d’Aubenas sera exclue des Etats du Languedoc et du Vivarais. Les villages de La Chapelle et Lavilledieu ne seront pas autorisés à reconstruire leurs remparts…..

L’épouse d’Anthoine reprit son nom de jeune fille Isabeau de Goutte de Vissac. Elle habita à Chasternac, mas de ses beaux-parents. Leur fils revint à Villeneuve-de-Berg en 1695 lieutenant de la Compagnie Bourgeoise, Il sera tué en Alsace en 1703. Leur plus jeune fille Marie épousera Jean Balazuc, maire de La Chapelle. Il sera enterré dans la chapelle de feu Anthoine Roure.
20 ans après les évènements, Isabeau redevint de Vissac-Roure et Marie, Marie du Roure.

Pendant longtemps, des générations d’Ardéchois porteront le deuil de leur martyr. Cette révolte sera souvent rappelée lors des autres émeutes qui émailleront l’Histoire. Déjà en mars 1672 pendant la Révolte des Femmes d’Alzon. Les Ardéchois transmettront la haine des Grands de cette époque, préparant le grand embrasement de 1789. Le nombre de participants côté Roure varie selon les historiens et le moment de l’insurrection. Ce qui est sûr c’est qu’il était très élevé, 4000 à 8000 personnes.

Aubenas aura une place Jacques Roure en 1896 et La Chapelle sous Aubenas une place Anthoine du Roure, Juste Défenseur de la Paysannerie au XVIIème siècle.

Sources : L. Gout, J. Roux, J. Volane, Histoire de l'Ardèche, E. Tourrette, Aubenas, 1908---Raoul de Vissac, Anthoine du Roure et la révolte de 1670, Paris, Emile Lechevalier, coll. « Librairie Historique des Provinces », 1895---Marquis de Voguë., Une famille vivaroise : Histoire d'autrefois racontées à ses enfants, t. 1, Paris, Honoré Champion, 1912---Emmanuel Le Roy Ladurie Les paysans de Languedoc, Paris, Flammarion, 1993 ISBN 978-2080810076  ---Pierre Ribon, D'Artagnan en Ardèche : La révolte de Roure en 1670, Valence, E&R, 2001ISBN 978 2910 669904 --medarus.org/Ardeche/07celebr/07celTex/roure_anthoine.htm----généanet--www.patrimoine-ardeche.com/visites/roure.htm Michelle Pouzache--- wikipedia.org—archives départementales du Gard abbé Charais Insurrection du Bas Vivarais au temps de Louis XIV revue de Villenauve-de-Berg 1986 n°42---archives départementales de l’Hérault C603---et bien d’autres sources---


dimanche 2 décembre 2018

Vive le vent !!!




/www.koreus.com/video/parasols-vent-plage.html


Vive le Vent !!

Cette année le mistral ne nous a pas oubliés, nous offrant des cieux d’un bleu profond, limpides et une relative fraicheur quand la cagna était là. Bon compagnon d’été, il rafraichit nos nuits et il chasse les nuages, ensoleille nos journées, mais assèche l’air. En moins de deux heures et en quelques kilomètres, il vide un ciel couvert, disperse les poussières et les brumes. Avec lui, les montagnes distantes de plus de 150 km comme le Ventoux sont visibles, tant le ciel est pur. Mais attention aux coups de soleil : le mistral rafraîchit la peau et la brûlure n’apparait que trop tard !! Ce mois de juillet, nous l'aurions souhaité plus présent par cette chaleur, au moins les nuits. Et ce dernier mois, un peu de mistral nous aurait sauvé de ces déluges de pluie !! /www.girouette.fr/girouettes/13-chat-lune.html-
L’hiver par contre il nous amène le froid qui pénètre partout, par le moindre interstice de la maison. Il aggrave la sensation de froid de l’ordre de 5° à 10°C par rapport à la température réelle de l’air. Les Anciens disaient qu’il « déshabille » car il pénètre au travers des vêtements jusqu’au corps. Et quand il s’invite dans une pièce en hurlant par les trous de serrure ou les dessous de porte, on a la sensation d’avoir encore plus froid.
Santons Fouque


Par le passé il nous a déjà gelé les oliviers, les arbres fruitiers…. Parfois violent, il fait tomber les tuiles, les arbres, les croix des clochers. Les météorologues du Mont Aigoual ont déjà enregistré à 1576 m d’altitude des vents à 360 km/h. Vitesse qui s’explique par le relief : l’Aigoual est la première barrière montagneuse heurtée par les vents chauds et humides de la Méditerranée.
Il aime nous surprendre : le 21 novembre 1999, malgré un mistral fort au-dessus de Nîmes qui aurait dû chasser les nuages, nous avons eu droit à des chutes de neige à basse altitude dans la basse vallée du Rhône.
Santon Mayans
Théoriquement, le mistral souffle 3,6,9 jours. Mais il lui arrive de jouer les prolongations en particulier l’hiver ou au printemps empêchant les abeilles de butiner nos cerisiers. Ce fut le cas en avril 1965 à Marseille : 23 jours d’affilée sans faiblir.
Nos voisins provençaux disaient que le mistral est un des trois fléaux de la Provence, les deux autres étant la Durance et le Parlement de Provence !
C’est un vent de couloir, de secteur nord-ouest-nord. Ses noms indiquent bien les origines nord-méditerranéennes du « vent maître » ou maître-vent : mistrau en provençal, magistral en languedocien, mestral en catalan, maestrale en corse. Il est tellement présent dans nos vies que des diminutifs l’accompagnent dans chacun de ses ébats. Il devient une personne gentille, enfantine, mignonne, quand il est agréable, modéré c’est le mistralet ou magistralou. En bourrasque ou rafale c’est le mistralado ou mistrado. Il devient mistralas ou magistralas quand il est désagréable, en tempête il est le broufouniè de mistrau. Il faut entendre ces noms avec l’accent, avec les intonations et les modulations des voix passant de la gentillesse à la colère, à la réprobation.
Le rauba-capèu est celui qui enlève les chapeaux. S’il se marie avec d’autres vents il devient le pounènt-mistral soufflant d’ouest ou ouest-nord-ouest. Avec la tramontane il est le tremountano-mistral. C’est le sécheur de boue de la Camargue le manjo-fango, le balayeur des rues l’escoubaire. Une insulte des temps anciens quand on comparait un homme au mistral : « lou mistrau a testo caudo e couo frelo »(le mistral a la tête chaude et la queue froide).




meteo81.fr—Observatoire du Mont Aigoual –givre sur piquets
Les Anciens disaient que les animaux sentaient l’arrivée du mistral : les moutons se dispersaient et gambadaient comme des fous, les chats se poursuivaient. Les vers de terre étaient propres à l’approche du mistral et non terreux qui est signe de pluie… Au contraire, en Camargue, les taureaux d’une manade se serraient les uns contre les autres, tête baissée, cornes face au vent.


tempetes.meteo.fr/spip.php?article229


Sénèque au 1er siècle de notre ère mentionne son action asséchante des eaux stagnantes. Il a probablement aidé à enrayer le paludisme ou du moins à empêcher son expansion dans les marais camarguais.
Mais la salubrité du mistral a souvent été mise en doute. Pour Stendhal qui le trouve « agaçant », ou Colette qui le nomme « tourmenteur » ce vent vient gâcher « tous les plaisirs que l’on peut rencontrer en Provence ». Au contraire pour Nietzsche, c’est un tueur de mélancolie : le nettoyage du ciel, le soleil garantissent un bon moral…A la différence du vent marin qui donne la « marrana », le cafard, le bourdon, et même encourage l’indolence.
En général on attribue au mistral, migraine, insomnie, nervosité… à cause peut-être de la force et de la turbulence du vent ou des variations du champ électrique. Il peut amener une déshydratation des muqueuses avec des troubles rhino-laryngologiques. Des hémorragies digestives, des bronchites chroniques ?? Des troubles cardiaques ?? Là nous sommes encore dans les interrogations, peut-être même dans les fantasmes.

Les vents ne laissent pas les hommes indifférents depuis la nuit des temps : dans l’Antiquité, dans toutes les mythologies, des dieux avec rituels, prières et sacrifices leur sont consacrés pour les apaiser. Nous essayons toujours de dominer la nature.
boutique-girouettes.france-girouette.fr/girouettes-animaux-de-la-ferme/girouette-pigeon-81-.html
Les girouettes sur nos clochers, nos tours, nous indiquent d’où vient le vent. D’abord signes du pouvoir en place et associées à ce pouvoir, elles deviennent plus tard un signe social, indiquant un métier, un rang dans la société. Mais elles étaient aussi protectrices ou conjuratoires. Elles ont donné lieu à un art.
Maintenant les éoliennes nous donnent de l’énergie propre grâce au vent. Mais leur présence dérange : trop visibles, en 2012-2014 50% des projets ont fait l’objet d’un recours en justice, le chiffre monte à 70 % en 2017.
Aujourd'hui, le mistral nettoie la vallée du Rhône et dissipe vers le large la pollution de l'air au-dessus des villes et des grands centres industriels.
/vincentlhermet.blogspot.fr/--Observatoire du Mont Aigoual Gard





Par Nick Stahlkocher — Stahlkochers collection, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=909719











Sources : www.meteofrance.fr/prevoir-le-temps/phenomenes-meteo/les-vents-regionaux
--- Gazette de Nîmes Guide de l’Eté p16 Virginie Galligani 2018 –Jean Vialar  Les vents régionaux et locaux 1948 Association des Amis de l’Aigoual ISBN2.9511182.2.8 – Météo-France -- Jean-Pierre Besancenot, « Vents et santé en façade méditerranéenne de l'Europe », Annales de Géographie, no 546,‎ 1989 ---Valérie Jacq, Philippe Albert et Robert Delorme, « Le mistral Quelques aspects des connaissances actuelles », La Météorologie,, Société Météorologique de France vol. 50,‎ août 2005 ----Honorin Victoire, Petite Encyclopédie des Vents de France, Jean Claude Lattès, 2001, 422 p. (ISBN 978-2709621939)-- Guy Blanchet, « Les chutes de neige de novembre 1999 dans la moyenne vallée du Rhône et l'ouest de la Provence », La Météorologie,‎ août 2002--- Luc et Muriel Chazel, Camargue: Un écosystème entre terre et eau, Éditions Quae, 19 juin 2013, 192 p. ,(ISBN9782759219841) p. 20---A. Baldit(1) et E. Rougetet(2), « Le mistral, en 1925 et aujourd’hui : Le mistral (article de 1925) », La météorologie, vol. 50,‎ août 2005, p. 29----tempetes.meteo.fr/spip.php?article229