taille de la vigne, dans le
Psautier cistercien, dit « de Bonmont », vers 1260, Ms 54, folio 2.
Bibliothèque municipale, Besançon.
Histoire
de la vigne en Languedoc
« La vigne boit le soleil et mange
les cailloux »
Nous pouvons déjà
constater que le produit « vin », s’écrit presque partout avec la
même racine : vino en croate, espagnol, italien, tchèque, bulgare, russe,
vin en occitan, en danois, en islandais, roumain, vein en estonien, wîn en
kurde, wino en polonais, wein en allemand, wine en anglais, gwin en breton….
La vigne est présente à l’état
sauvage dans toute l’ancienne Europe occidentale ; des feuilles et des
pépins de raisin fossilisés sont retrouvés à Castelnau le Lez dans notre
Hérault. On en situe la date dans la préhistoire, ère tertiaire et quaternaire. Les
glaciations du Riss et de Würm semblent avoir sonné la disparition totale de la
vigne. Mais on signale une reprise végétative vers 15 000 av JC. Moldavie,
Caucase, Géorgie, Arménie…
Le
Vin nous accompagne depuis des millénaires, colle à notre histoire, compagnon
des bons et mauvais jours ! Il est probable que nous ferons encore un bout
de chemin ensemble. Une légende raconte qu’en Grèce, les ânes ayant brouté des
branches de vignes, des rameaux et des fruits plus vigoureux, bien plus charnus
poussèrent, ce qui donna l’idée de tailler les vignes. Et ainsi naquit,
parait-il, la viticulture !!
(Tombe de Nakht –Egypte
- fouloir- Wikipéa)
Il est certain que la
culture de la vigne et le procédé de vinification sont nés sur les rives de la
Méditerranée et qu’ils remontent au moins aux Phéniciens, Egyptiens, Etrusques, peut-être même chez l’homme de Néanderthal
(d’après Philippe Marinval Université de Toulouse) ! Les
Egyptiens auraient appris cette culture aux Grecs, qui l’auraient transmise aux
Romains et aux Gaulois. La plus ancienne trace actuelle de viticulture se
trouve en Iran, 7000 ans avant notre ère, mais aussi en Arménie, en Turquie
(André Tchernia). Et en Grèce-Macédonienne, des archéologues ont découvert des
traces vieilles de 6500 ans avant notre ère, traces de vinification à partir de
vigne sauvage associée à des figues. Tâtonnements, essais, avant une vraie
culture ? Et nous n’avons probablement pas fini d’en apprendre à ce
sujet !.
On sait que la vigne poussait de façon endémique en
Gaule vers 6500/6000 ans avant JC, mais nous ne savons pas si elle y était
cultivée à cette époque. Probablement liane sauvage. Les
marchands étrusques nous vendent du vin dès le 7ème siècle avt notre
ère.
Il est certain maintenant que les Grecs de Marseille apportent aux Languedociens la vigne et sa manière de la cultiver vers 400 avt notre ère. D’abord pour notre consommation locale car nous importons toujours des vins d’Italie. Ils sont acheminés par bateau, dans de hautes amphores à panse en forme d’ogive terminée en pointe, col étiré et anses très longues et parallèles au corps. Leur contenance est de 20 à 25 litres. L’intérieur est enduit de poix (résine de pin distillée) pour rendre le récipient étanche. L’amphore est fermée par un bouchon, disque de bois ou de liège scellé avec de la chaux ou de la pouzzolane.
Lors des travaux sous l'avenue Jean Jaurès de Nîmes, nous avons découvert qu'à l'époque gauloise du 5è au 3è siècle avt JC des vignes occupaient les pentes du mont Cavalier, complétant les terrasses agricoles et les aires d'ensilage.
Il est certain maintenant que les Grecs de Marseille apportent aux Languedociens la vigne et sa manière de la cultiver vers 400 avt notre ère. D’abord pour notre consommation locale car nous importons toujours des vins d’Italie. Ils sont acheminés par bateau, dans de hautes amphores à panse en forme d’ogive terminée en pointe, col étiré et anses très longues et parallèles au corps. Leur contenance est de 20 à 25 litres. L’intérieur est enduit de poix (résine de pin distillée) pour rendre le récipient étanche. L’amphore est fermée par un bouchon, disque de bois ou de liège scellé avec de la chaux ou de la pouzzolane.
Lors des travaux sous l'avenue Jean Jaurès de Nîmes, nous avons découvert qu'à l'époque gauloise du 5è au 3è siècle avt JC des vignes occupaient les pentes du mont Cavalier, complétant les terrasses agricoles et les aires d'ensilage.
Cette boisson est
réservée à l’aristocratie. A Marseille, la Massalia des Grecs, et dans une
bonne partie de l’actuelle Provence, la vigne est probablement cultivée dès le
5ème siècle avant JC (Max Rives, chargé de mission à l’INRA). Les
variétés avaient été importées de Grèce.
Et dernièrement des fouilles à Vauvert, près de chez nous, conduites par
Pierre Sejalon, ont mis à jour des vestiges remontant à 500 ans avant JC :
des coupes, de la vaisselle d’origine étrusque, grecque ou locale attestant une
consommation de vin probablement d’importation échangé contre nos produits locaux. Donc un parcours commun très ancien dans
notre région.
On sait que le vin gaulois s’exporte au 1er
siècle après JC, le long du Rhin et du Danube, en Angleterre, à Rome et même
des amphores gauloises ont été retrouvées en Egypte et jusqu’à l’actuel Soudan.
La Pax Romana amène une multiplication des échanges commerciaux, un
accroissement de la population qui fournit ainsi une main-d’œuvre abondante. Une
spécialisation dans les grands domaines
qui permet de diminuer les coûts de production. Dans notre région, des grands domaines viticoles s’installent avec la fondation de Narbonne vers 118 avant
JC. (Tonneaux Gallo-romains IIè
siècle St Pierre de Colonzelle (26) – 2011 JPS68)
Le Rhône devient un axe nord-sud qui favorise
le commerce en tous genres. A Roquemaure la villae de la Ramière produit à la
fin du 1er siècle plus de 70 000 litres de vin. Ces chaix ont
leur propre production d’amphores. Le vin est travaillé dans des dolia, énormes
jarres en terre cuite de plusieurs hectolitres et enterrées aux trois-quarts
dans le sol. Les amphores étaient chargées dans les bateaux le long du fleuve.
Inrap
Dolia, II
siècle de notre ère. Musée gallo-romain de Saint-Romain-en Gal, Vienne.
D’après l’historien grec
Thucydide, au 5ème siècle avant JC « les peuples commencèrent à sortir
de la barbarie quand ils apprirent à cultiver l’olivier et la
vigne » !!
L’Empire Romain sera
grand consommateur de vin et en particulier de vin gaulois. Les romains
aimaient les vins épicés rallongés avec de l’eau de mer. En 92 de notre ère
l’Empereur Domitien fit arracher la moitié des vignobles gaulois pour
favoriser, disait-il, la culture du blé, mais en fait surtout pour aider la
viticulture romaine, protectionnisme oblige ! Le vignoble français est à
nouveau encouragé en 281 par l’empereur Probus, date que les historiens
prennent habituellement comme point de départ général de cette culture en France.
En effet à partir de cette date, les domaines bordelais, languedociens,
rhodaniens s’épanouissent et la viticulture monte jusqu’au bassin parisien.
Le vin sera et est encore
aujourd’hui dans une moindre mesure, un marqueur social, associé au plaisir,
aux fêtes, au vivre ensemble, mais aussi signe de puissance, de statut social,
de profits. De tout temps, il est associé au religieux : chez les
chrétiens pensons au vin de messe, à Noé, et aux divinités diverses dans
les autres religions…..
(Musée Calvet Avignon Bas relief Cabrières d’Aigues JPS68 2011 –
Hallage sur la Durance, tonneaux gaulois et amphores-Photo Jean Roubier))
(Pressoir
au Mas des Tourelles Beaucaire – reconstitution d’après un texte de Caton
datant du IIème siècle av JC- Ed Midi Libre)
Sculpture de
Bacchus dans le village de Crestet, dans le Vaucluse—René Durieux1930. / Dan
Shannon / Only France.
Dès 780, de nombreuses
abbayes, Aniane, Lagrasse, Fonfroide, Valmagne… sont créées dans notre région. Elles
vont se lancer dans la viticulture profitant de l’expérience des moines de
Cîteaux, Clairvaux.
Dans les cités du Haut Moyen Age l’évêque, ainsi que l’abbé des abbayes, premiers personnages politiques sur le terrain, seront des viticulteurs importants.. Que l’on se rappelle au 6è et 10ème siècle l’évêque Saint Germain à Paris, Saint Denis à Cahors, Théodulfe évêque d’Orléans appelé « le père des vignes »…. Les vins épiscopaux sont source de revenus importants, mais aussi sont de prestigieux « vins d’honneur » lors de visites d’éminents personnages. Ils rajoutent au statut de l’ecclésiastique. Ils sont un produit de luxe acheté au prix fort par la noblesse et la bourgeoisie. Les vignes sont plantées aux abords des cités épiscopales mais aussi à la campagne autour des résidences secondaires des évêques. C’est le cas à Uzès, Avignon, Lyon…
Les moines vont sauver cette culture, ceux de
l’abbaye de Cluny en particulier. Aux XIIIe et XIVe siècles, la
réputation des vins de Beaune, notamment auprès des papes d'Avignon, fit la
fortune des cisterciens, qui marquèrent la viticulture de leur empreinte.
En France la viticulture monastique et épiscopale sera
particulièrement encouragée du 12ème au 15ème siècle.
Mais rappelons-nous Charlemagne et son Corton-Charlemagne du 9ème siècle
encore présent au 20ème.
sarcophage -musée St Romain |
Dans
notre région, au Moyen-âge, des chemins muletiers, appelés « chemins du
vin », remontaient vers le Nord, jusqu’en Haute Loire, en parallèle aux
« chemins du sel », donc une petite exportation ou du troc. Mondette
de Bargeton, une belle-fille de notre seigneur Mathieu de Bargeton, au 16ème siècle expédiait du vin
en Lozère et en retour recevait son fromage d’Auvergne dont elle était si friande.
Les vignobles se
développent aussi autour des domaines de la grande aristocratie et des
« petits » châteaux. Les pressoirs construits par le seigneur sont
utilisés par les vignerons contre le paiement d’une « banalité », un
droit de ban. Parfois comme dans notre région le roi donne à certains seigneurs
le droit de banvin, droit de vendre leur production avant les autres
producteurs.
Les vins du Languedoc figurent à la
table de Philippe Auguste roi de France au XIIIe siècle. Au siècle suivant, Philippe le Bel fait acheter des vins de Montpellier pour sa provision
personnelle.
Un montpelliérain célèbre
dans toute l’Europe, Arnaud de Villeveuve, (1235-1311) catalan de naissance
fait ses études à la faculté de Montpellier. Théologien, astrologue,
alchimiste, médecin et professeur. En 1280 il distille du vin et met au point
un alambic qui va créer « l’eau de vie ». Il va être à l’origine des
premiers essais réguliers de distillation des essences aromatiques.
Dans l’Espagne dominée
par les musulmans, les interdits de la consommation d’alcool n’empêchent pas la
poursuite de la viticulture. Des traités de botanistes, d’agronomes de cette
période décrivent les différents cépages, de différentes origines, acclimatés
dès le 11ème siècle. De Grenade, à Séville, de Marbella à Cordoue on
cultive la vigne…
On cultive la vigne comme actuellement, cep bas en gobelet ou en ligne, mais aussi en hautain, la "vigne des papes". Le plant s’enroule autour d’un
On cultive la vigne comme actuellement, cep bas en gobelet ou en ligne, mais aussi en hautain, la "vigne des papes". Le plant s’enroule autour d’un
arbre qui lui sert de
tuteur. L’arbre taillé permet d’autres cultures, céréales, légumes… au départ
culture pour gagner de la place. Les vignes basses en gobelet ou buissonnantes
étaient plantées sur les hautes terrasses alluvionnaires du Rhône comme celles
de Châteaunef-du-Pape. Le mistral et les galets roulés descendus des Alpes ne
permettaient que des plantations basses.
(Psalter 1180 – Travail de
Cette culture subira de plein fouet les aléas de notre
histoire : guerre contre les Albigeois, Guerre de Cent ans, pestes, les
dégringolades démographiques, révoltes, hivers glacials... Incessamment il
faudra reconstruire les vignobles, patiemment, jusqu’au prochain cataclysme, de
crise en crise. Le vigneron est têtu parait-il.
Le vin sera aussi pendant
longtemps un médicament, antiseptique avec Hippocrate, purificateur de l’eau,
en baume avec de l’huile et du romarin (voir D’Artagnan dans les Trois
Mousquetaires d’Alexandre Dumas). Un produit lourd de symboles. Au Moyen Age
chaque mois à son vin ; l’hiver des vins forts, par temps de brouillard
des vins blancs doux plus nourrissants, l’été des vins clairs et légers. On le
prend aussi en fumigation, en gargarisme, en application… Les femmes qui
viennent d’accoucher, les nourrices dont le lait se tarit, les convalescents
sont médicalisés au vin. Il est aussi anti-diarrhéique, vermifuge… Un célèbre médecin
et chimiste montpelliérain Arnaud de Villeneuve reconnait les vins de l’Orléanais
comme étant « les meilleurs et les plus
propres qu'on puisse trouver pour le corps humain » (Arnaud de Villeneuve, Tractatus de vinis, 1314). Il semble aussi améliorer la digestion,
chasser les flatulences, bref la panacée !! Quand il devient vin
aigre, vinaigre, il s’insère dans des préparations, en cuisine. En vinaigre il
éloigne la peste, la vermine, les puces…
Dans notre sud,
l’hypocras est un breuvage recommandé contre les douleurs d’estomac : vin,
sucre, cannelle, amandes douces, musc ou ambre d’Hippocrate. Le cuisinier de
Charles VII Taillevent nous en a laissé la recette.
De nombreux ouvrages
scientifiques sont consacrés à l’art de faire du vin. Apprentissage toujours
complété, approfondi. En commençant par Olivier de Serres en 1600 qui fait le
premier la relation entre le climat, le terroir et le goût du vin. Et bien
d’autres avant lui, Pline, Jacques de Thou, Nicolas Ellembourg. …
Mais c'est surtout un
savoir-faire familial toujours transmis, enrichi, appris d’une génération à
l’autre. C’est dans un premier temps, une culture de coteaux, dans des terrains
pauvres, là où les céréales ne poussent pas, là où les bêtes ne broutent pas.
Jusqu’au début du 19ème siècle ce sera une culture associée à une
polyculture diversifiée.
L’ouverture du Canal du
Midi en 1682 favorise la vente de nos produits languedociens. Nos vins seront
autorisés à circuler librement à partir de 1776. Mais en haut lieu dès 1731 on
commence à s’inquiéter d’une surproduction.
La crise de 1907 n’est
pas encore là, mais le 19ème siècle installera les prémices de la
crise. Ce sera l’objet d’une prochaine chronique.
-Histoire de la Normandie -wikimedia-La récolte du raisin en septembre. miniature du XVe
siècle, --
Sources :Bernadette
Voisin-Escoffier Couradou mai 2012 La Société Coopérative de Vallabrix site de Vallabrix internet ou
médiathèque—Pierre Clément Les chemins à travers les âges en Cévennes et Bas
Languedoc – Max Rives Les Origines du Vignoble
in La Vigne et le vin <Sciences et Vie n)155 9/1986 –André Tchernia
Jean Pierre Brun Le Vin Romain Antique édt Glénat 1999 –Eric Teyssier
Chroniques Romaines I Musée de la Romanité Nîmes ISBN 9782917743805-- /www.inrap.fr/dossiers/Archeologie-du-Vin/Histoire-du-vin/Moyen-Age-Culture-et-societe#.W6jkLPZuKM8-- Jean Yves Breuil Inrap Archéologie des sociétés méditerranéennes Université paul Valéry Montpellier in Nîmes Musée de la Romanité--wikimedia-wikipedia-- --.leguidemontpellier.com/vin-herault/histoire-vin-languedoc.php--wikipedia.org/wiki/Vignoble_du_Languedoc-Roussillon--/epicuvin.com/2015/06/17/petite-histoire-illustree-et-degustee-des-vins-du-languedoc/--photos collec privée Francine Magneux--Musée gallo-romain de Saint-Romain-en Gal, Vienne.- Musée de la Romanité Nîmes--
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