Nouveaux
éléments pour comprendre l’Histoire de Vallabrix
Un historien Denys
Breysse a découvert dernièrement aux archives départementales du Gard des actes
qui expliquent bien des choses sur la période de 1702-1708. (archives
référencées de « provenance inconnue » sans cote ce qui ne les rend
pas facile à trouver).
-Tout d’abord la personne
inhumée dans l’église de notre village. Les anciens parlaient d’un consul
enterré là, d’une dalle à l’inscription effacée en partie. Il semble plutôt
qu’il s’agisse de la dernière demeure du prieur Jean de Rufier (Ruffier) décédé
en 1702. Un acte rédigé par le prêtre Molines qui assure l’intérim, nous
indique : »l’an mil sept cent
deux et le onzieme mars après avoir est confessé est decedé messire Jean de
Rufier prieur de vallabrix agé d’environ quatre vingt et deux ou trois ans et a
esté inhumé dans l’eglise dudi vallabrix presant mr granier appoticaire Louis
laurens et Jacques francois dudit
vallabrix… » . Ceci était prévu dans son testament de 1696 : « je crois que nous devons elire nore
sepulture dans notre eglise et par humilité du costé de l’Epitre et non dessous
le Chœur et le sanctuaire »… (l'épître est le côté droit de l'autel, vu par les fidèles, où se trouve placé le livre contenant
l'épître à lire durant la célébration. Le côté gauche est appelé l'évangile)(attention l’église
était plus petite à cette époque donc emplacement de la dalle plus proche du
portail sur le côté droit)
- le presbytère devant
l’église mentionné dans le compoix de 1728, seules les fondations sont encore
visibles : il semblerait qu’il ait été démoli lors des guerres de religion
de 1560-1628 « du temps de henry
quatre Roy de France ». Ce qui expliquerait que lorsque Tomas Platter
nous visite à la fin du 16ème siècle, il voit un village en très
mauvais état. Il est vrai qu’on s’est sérieusement battu vers St Siffret (un
des Bargeton en était). (Etienne
Goiffon,-trois pouillés de 1635-1640—in Pouillés des diocèses anciens compris dans le
diocèse actuel de Nîmes -1900). Toujours une
interrogation : comment notre façade renaissance a-t-elle survécu à ces
affrontements ? Notre façade Renaissance a certainement été mieux défendue
par la poignée de soldats installés au château. Et puis ces guerres étaient
plus proches des razzias que de celles que nous connaissons maintenant :
seul avait un intérêt ce qui pouvait se vendre, servir, argent, vaisselle,
bijoux, bottes….
D’après l’acte
d’abjuration du 6 octobre 1685, Jean de Ruffier nous indique que Vallabrix
s’est ouvert au calvinisme en 1550. Nous pouvons penser que ses habitants ont
suivi les Bargeton, leur seigneur,
- d’après le pouillé de
1640, cote 419, Saint Etienne de Vallabrix peut compter sur un revenu de 420
livres. Sur les 136 prieurés de l’évêché, le revenu moyen est de 152
livres ; douze prieurés ont un revenu estimé à 420 livres, seuls quatre
dépassent cette somme : Aramon avec 800livres, St Georges de Ceyrargues,
St Gervais de Laudun et St Martin de Chambonas près des Vans. En 1662 Jean de
Ruffier arrente (loue) pour les trois-quarts de la dîme du prieuré de Vallabrix
et son domaine pour 1125 livres. Donc une paroisse sinon riche, très aisée.
Les droits de fiefs
s’étendent à toute la paroisse : « le
prieur dud lieu a presq tous les fiefs des maisons, terres de sa paroisse,
depuis le four public vers le levant et le terroir du Masmolene, le Pin,
Pougnadoresse »… » les
prieurs de valabrix ont droit de dimes dans le terroir de St Quentin, surtout
dans ceux de la Sauzede, Massargues, Castelnau, Claudauson….. plus ils diment
au terroir de Masmolène, dans le terroir appellé La Riasse et une partie de la
métairie du Moutet appelé La Come megere du costé du Pin, ils vont jusques au
terme de Notre Dame du Pin… ». Le tout reconnu devant notaires.
La dîme « se lève au
onzième », « fruits, laine, agneaux, bled, grains, huille, vin,
foin ». Sur Vallabrix, un jardin, six terres, un pré, et deux vignes, le
tout terres nobles sans censives ni « talhies (taille) ».
-Le prieur à la suite de Jean
de Ruffier est Pierre de La Garde de 1702 à 1706. Pendant cette période il est
réfugié à Uzès. « Les prêtres et
prieurs se refugièrent aux villes les plus proches de leur bénéfices crainte
d’être assassinés par les huguenots et révoltés ». Cependant il signe
des actes du 1er octobre 1702 au 25 janvier 1706. Son neveu Jacques
de La Garde reprend le prieuré après un intérim du prêtre Vénissat. Les
chiffres montrent une baisse des sépultures entre 1702 et 1706 : absence
d’une partie de la population adulte ? Quelques baptêmes et mariages de
vallabrixois sont célébrés à Collias, Masmolène… Quand le prieur est absent, le
prieur Gasteur d’Aureillac en 1702 et le prieur de Dions en février 1705 le
remplacent. Tout indique des troubles qui ont certainement touché notre
village. Vallabrix est sur le passage des troupes. Des combats autour de chez
nous, comme Euzet, des incendies comme à Belvezet, Sanilhac en 1703, des
massacres. Des églises incendiées au Pin, La Bruguière, Saint Laurent …Décembre
1703, mai 1704, deux périodes où le prieur n’est pas à Vallabrix sous la
pression des évènements.
Les registres ne rendent
compte que d’une facette des désordres dus aux « huguenots et
révoltés », ceux occasionnés par les actions des milices catholiques ne
sont pas mentionnés (les camisards blancs, puis noirs) qui sévissent dès
l’automne 1703 jusqu’en 1717 et qui provoquent aussi des fuites de populations.
-les actes, mariage,
baptême, ne suivent pas toujours le modèle fixe imposé : des dispenses de
bans pour les mariages, les noms des parents ou témoins oubliés… on va au plus
vite, « à cause des circonstances
fâcheuses du temps présent ».
Mais il semble que la
solidarité ancestrale unissant les habitants d’une même communauté continuait à
s’exercer « parce qu’elle a été portée
par des gens venus d’ailleurs, la mort n’a pas rompu les liens qui unissaient
les habitants… » (Belvezet).
-56 personnes abjurent collectivement
le 6 octobre 1685, essentiellement les notables de notre village. Un de ces
nouveaux convertis Guillaume Agniel notaire royal va nous montrer une attitude
particulière. Jean de Ruffier jusqu’à sa mort en 1702 va tenir d’une main ferme
les nouveaux convertis.. Prêts, mariages, dons, quittances, des actes notariés
où la signature du prieur apparait la première, mais que le notaire ignore
ostensiblement. Influence, surveillance, dépendance financière et politique.
A sa suite les prieurs de
La Garde, en particulier Jacques, vont apporter un certain apaisement au
village avec d’autres pratiques. Pierre de La Garde d’abord puis son neveu
Jacques qui est en poste en mai 1706 à 26 ans. Il loge chez l’habitant. A
partir de 1713 il est très présent dans notre village. Cette famille est
apparentée aux Bargeton, aux De Brueys anciens protestants. Jacques de La Garde
meurt le 25 mai 1728. Sur son acte de décès, une ligne : « il
avoit manger la veille à souper cinq livres de poisson »… Un bon
vivant qui devait plaire aux habitants !
Sources : Denys
Breysse « Vallabrix une paroisse catholique de la périphérie cévenole au
temps de la guerre des camisards (1685-1720) » in Revue d’Histoire de
l’Eglise de France T107 n)258 Société d’histoire religieuse de la France
Institut catholique de Paris- Merci de m’avoir fait part de cet excellent
travail.
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