Les facéties de Belvezet :
Dans les contes et légendes de notre région, le village de
Belvezet et ses habitants ont été très souvent brocardés. Pour quelle
raison ? Mystère…. Pourtant Belvezet est un charmant village au nord
d’Uzès et à la limite des Cévennes. Pour les uzétiens, c’est un village de
montagne ; pourtant il est dans une cuvette, les mas éparpillés, et deux
églises dont une encore en état. Des gorges avec des multitudes de guépiers,
des boulidous, des chemins qui rejoignent les villages autour, et maintenant
des parcs photovoltaïques et des vautours revenus dans les baumes. Sa position
géographique a fait que ses habitants ont souffert de tous les soubresauts de
l’histoire. Les restes de son château-fort et son village castral sont là pour
en témoigner.
Mas ou hameau de la Veille Eglise |
Alors c’est l’histoire du lever du soleil que les gens de
Belvezet allaient chercher quand il tardait à se lever, c’est l’histoire du
pont qu’ils construisaient en long, des poutres trop courtes qu’ils étaient en
train de placer dans une maison….
Loin de se vexer, les Belvézétiens se sont appropriés ces
histoires. L’auto-dérision peut être un bain de jouvence….
Mais ici nous allons parler de deux autres histoires qui font
fi des préjugés.
La première se passe devant le moulin
de Ners vers 1860. Joseph un grand-père que j’ai connu, « qui n’était pas
né ici mais qui était d’ici » me raconta :
- _ Nous
étions plusieurs à attendre devant le moulin pour faire moudre un peu de
grains. Un homme parlait, parlait…. Puis me voyant il me dit :
- _ Gamin,
tu as entendu parler des gens de Belvezet ?
- _ Oh
oui, répond Joseph
- _ Et
bé moi je suis de Belvezet. Je vais te raconter l’histoire du plus imbécile des
gens qui étaient au village. Tout le monde disait qu’il était des plus
imbéciles. Alors quand il est mort, on a pris son corps et on l’a brûlé sur une
petite éminence. Et alors bien entendu tout ce qui brûlait se répandait… Depuis
qu’on a brûlé cet homme, à Belvezet les gens sont aussi intelligents qu’autre
part. Mais il y a un mais… Seulement tout ce qui est parti en fumée… c’était là
la sottise ! La fumée s’est répandue par tout le monde ! Et maintenant
on trouve des imbéciles partout sur terre !!
Sources : Contes populaire des Cévennes J N Pelen
Nicole Pelen Dans les Vallées des Gardons
Gallimard 1978 n°23903
La seconde histoire : – La vache du Duc d’Uzès
Plusieurs versions, nous
allons privilégier et adapter celle du « Le Tour de France,
Rambouillet » par la duchesse d’Uzès p 231)
Lors de la bataille de
Parme contre les armées impériales en 1734, le Duc Emmanuel de Crussol d’Uzès
fut blessé sérieusement à la mâchoire et à l’épaule. Il devint bossu, mais
surtout pendant quelques temps il ne put s’alimenter normalement qu’avec le
lait d’une vache achetée tout exprès.
Une fois guéri, contre
une pièce d’argent par an, il confia
cette vache aux bons soins des habitants de Belvezet, village proche d’Uzès. Il
avertit cependant le consul de ce lieu que celui qui osera lui annoncer la mort
de cet animal sera puni de mort.
La vache est soignée,
dorlotée, cajolée. Une pièce d'argent par an ce n’est pas une petite somme pour le
village. On lui coupe la meilleure herbe, l’eau du puits est réchauffée pour
qu’elle ne lui donne pas mal au ventre, on chasse les courants d’air dans
l’étable. Mais elle est bien vieille et au bout de la quatrième année, elle va
rejoindre le paradis des vaches….
C’est la consternation
dans le village. Comment annoncer cette triste nouvelle au duc et qui va se
sacrifier ? La punition était certaine.
Antonin, un pauvre
auvergnat qui habitait là se propose. Il demande seulement qu’après son trépas,
on prenne en charge sa famille. A Belvezet les villageois promettent de
secourir la femme et les enfants d’Antonin, ils le félicitent de son courage et
ils sont bien contents d’échapper au danger. Les Auvergnats descendaient de
leur montagne l’hiver pour travailler les vignes et parfois restaient. C’était
les émigrés de l’époque !!
Antonin part pour le
château. Le Duc lui demande des nouvelles de sa vache.
-
Hélas
Monseigneur, votre vache ne mange plus
-
L’appétit
lui reviendra, répond le Duc
-
Mais
elle ne marche plus
-
Elle
est bien vieille, des rhumatismes peut être ?
-
Hélas
elle ne boit plus, Monseigneur
-
Est-elle
malade ? demande le Duc
-
Oh
non ! ce n’est pas ça, répond Antonin
-
Ah bon
! est-ce qu’on l’a volée, tuée ,
-
Non,
non, je le jure sur mes enfants, s’exclame l’auvergnat
-
Dans
ce cas, est-elle morte ? interroge le Duc
-
Ah
Monseigneur, c’est vous qui l’avez dit, ce n’est pas moi !!
Emmanuel de Crussol ne
pût s’empêcher de rire. « Et bien puisqu’elle est morte, garde l’argent
pour toi ».
Et Antonin, soulagé, rentra
chez lui avec la pièce d’argent et une belle histoire à raconter.
le village de Belvezet |
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