Les Quatre Henri : un destin tout
tracé ?
Nous avons commémoré la Saint Barthélémy et ses morts au mois d'août.(voir sur ce blog le 20/08/2017 La nuit de la Trahison). Ce qui suit est une fable, un conte, raconté le soir entre voisins tout en préparant les châtaignes.
Nous sommes dans la funeste période des guerres de religion qui ont ensanglanté notre pays de 1562 à 1629. Les rois François 1er et son fils Henri II étaient morts. Catherine de Médicis l’épouse de ce dernier était régente du royaume pour épauler tour à tour ses fils rois, François, Charles. C’est la période où les grandes familles du royaume rêvent de prendre le pouvoir grâce à leurs rejetons. L’expression religieuse est plus l’expression d’un parti politique ou plutôt d’un clan familial.
Nous sommes dans la funeste période des guerres de religion qui ont ensanglanté notre pays de 1562 à 1629. Les rois François 1er et son fils Henri II étaient morts. Catherine de Médicis l’épouse de ce dernier était régente du royaume pour épauler tour à tour ses fils rois, François, Charles. C’est la période où les grandes familles du royaume rêvent de prendre le pouvoir grâce à leurs rejetons. L’expression religieuse est plus l’expression d’un parti politique ou plutôt d’un clan familial.
Un livre imprimé à La Haye au titre évocateur
« Le Doigt de Dieu » évoque cette histoire sous forme de la "Fable des Quatre
Henri", morts tous de façon tragique en cette période. Il est vrai qu’il était
rare en ce temps-là pour un homme politique de mourir dans son lit.
Deux, Henri de Bourbon-Condé, et Henri de Guise
et les deux autres Henri de Valois futur Henri III, et Henri de
Bourbon-Navarre, futur Henri IV.
Voici la fable, une fable qui raconte à sa façon
les événements de cette période :
Un soir de tempête dans la forêt de
Saint-Germain, dans une pauvre cabane, une vieille femme, peut-être un peu
sorcière, ouvrit sa porte à un cavalier qui lui demanda l’hospitalité. Le
cheval trouva une place dans la grange et le gentilhomme entra dans la cabane.
La vieille femme activa le feu qui mit un peu plus de clarté dans la petite
pièce. C’était un jeune homme, 16 ans tout au plus, avec un habit trempé
mais qui montrait une certaine qualité. Elle lui proposa à manger un petit
quelque chose, un bout de fromage, un morceau de pain noir, c’était toute la
provision de la vieille femme.
HenriIer de Bourbon, prince de Condé,
mort empoisonné par son épouse Charlotte qui avait eu des « amabilités avec un page »- Crayon de l'école de Clouet représentant Henri d Bourbon, prince de Condé (1552–1588)-anonyme- Joconde database: entry 50520001102 wikimedia )
mort empoisonné par son épouse Charlotte qui avait eu des « amabilités avec un page »- Crayon de l'école de Clouet représentant Henri d Bourbon, prince de Condé (1552–1588)-anonyme- Joconde database: entry 50520001102 wikimedia )
- Je n’ai rien de plus, dit-elle au jeune
gentilhomme ; voilà tout ce que me laissent à offrir aux pauvres
voyageurs, la dîme, la taille, les aides, la gabelle, le souquet,
l’arrière-souquet : sans compter que les manants d’alentour me disent
sorcière et vouée au diable, pour me voler, en sûreté de conscience, les produits
de mon pauvre champ…
- --- Pardieu, dit le gentilhomme, si je
devenais jamais roi de France, je supprimerais les impôts et ferais instruire
le peuple. C’était Henri de Bourbon-Condé….
-
-- Dieu vous entende ! répondit la
vieille.
Comme
il allait s’approcher de la table pour manger, on toqua à la porte. Un autre
cavalier trempé de pluie demanda l’hospitalité. Encore un jeune gentilhomme.
- C’est vous, Henri ? dit l’un.
- -- Oui, Henri, dit l’autre. C’était
Henri de Guise.
Tous les deux faisaient partie de la chasse royale de Charles IX, dispersée
par l’orage.
Le nouveau venu demandé à la vieille femme
de quoi manger ; mais comme elle n’avait rien, il proposa de partager le
maigre repas. Le premier Henri fit bien grise mine, mais devant l’œil résolu et
la prestance du second Henri, il accepta le partage. Il pensait « partageons de peur qu’il ne prenne
tout !! ».
Mais un troisième coup à la porte
interrompait son geste de couper le pain en deux. Un troisième gentilhomme, encore
un Henri, se tenait dans l’encadrement de la porte. Le premier Henri voulut
cacher fromage et pain, mais le second l’en empêcha en posant son épée sur la
table. Le troisième Henri comprit que
les deux autres n’étaient pas partageux.
— Vous ne voulez donc rien me donner
de votre souper ? dit-il ; je puis attendre, j’ai l’estomac bon.
— Le souper, dit le premier Henri,
appartient de droit, au premier occupant.
— Le souper, dit le second,
appartient à qui sait mieux le défendre.
Le troisième Henri devint
rouge de colère, et dit fièrement :
— Peut-être
appartient-il à celui qui sait mieux le conquérir. C’était Henri de Navarre.
Le
premier Henri tira sa dague, les deux autres leurs épées. Ils allaient en
découdre dans la petite maison. Mais un quatrième coup est frappé à la porte et
un autre jeune homme, le dernier
Henri entra. C’était Henri de Valois, le futur Henri III. Voyant les épées
nues, il tira la sienne et attaqua.
Leur
hôte est épouvantée, le combat fracasse tout ce qui est à portée des épées et
des sauts d’esquive des combattants. La lampe s’éteint et chacun frappe dans
l’ombre au jugé. Puis c’est le silence. Alors la vieille sort de son trou et
rallume la lampe, les quatre sont parterre, chacun avec une blessure. Légère la
blessure physique mais plus grande la blessure de honte de ce qu’ils venaient
de faire.
Finalement
le rire de la jeunesse l’emporte et ils décident de souper « de bon accord et sans rancune »…Mais
le souper était par terre, souillé de sang. La cabane était dévastée. La
vieille femme fixait de ses yeux fauves les quatre jeunes gens.
- -- Pourquoi
nous regardes-tu ainsi ? demanda l’un des Henri.
- -- Je
vois vos destinées écrites sur vos fronts.
Cela les fit rire, un peu jaune, on était
superstitieux en ce temps-là.
- --- « Comme vous êtes réunis tous quatre dans celle cabane, vous serez
réunis tous quatre dans une même destinée. Comme vous avez foulé aux pieds et
souillé de sang le pain que l’hospitalité vous a offert, vous foulerez aux
pieds et souillerez de sang la puissance que vous pouviez partager ; comme
vous avez dévasté et appauvri cette chaumière, vous dévasterez et appauvrirez
la France ; comme vous avez été blessés tous quatre dans l’ombre, vous
périrez tous quatre par trahison et de mort violente. »
Les quatre gentilshommes s’amusèrent
de cette prédiction. Pourtant,
Henri
de Condé sera empoisonné à Saint-Jean d’Angély par sa femme ; Henri de Guise,
assassiné à Blois par les Quarante-cinq ; Henri de Valois
(Henri III), assassiné par Jacques Clément à Saint-Cloud ; Henri de
Bourbon (Henri IV), assassiné à Paris par Ravaillac.
(assassinat
d’Henri IV –détail d'une peinture de Charles-Gustave de Housez 1860)
Quand on veut prendre le pouvoir dans un pays ou dans sa maison, il faut éviter de se croire le plus fort, le plus intelligent, il faut se méfier de ses certitudes !! Cette fable est valable de tout temps….
Sources : Revue des
Feuilletons 1844 –France pittoresque jeudi 7 avril 2016—wikipedia.org
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