Chandeleur, La Fête des Crêpes ?
Bientôt Pâques, ses œufs, ses lapins et ses poules en chocolat. Il semble que les fêtes dites « religieuses » sont de plus en plus célébrées par des douceurs culinaires. Pourquoi pas, nos anciens ont connu des disettes, alors les familles peuvent se réjouir ensemble… Mais quand est-il de la Chandeleur ? Ces fêtes nous ont construits, croyants et non croyants, rythmant l’année, les travaux des champs.
Cette année, dans mon club de gym, nous nous sommes interrogées sur cette fête de la Chandeleur, que représente-elle, religieuse ou non ?? Des réponses les plus bizarres se sont fait entendre. Fête plutôt profane dont l’aspect religieux semble oublié pour le commun des mortels.
La Chandeleur ou fête des chandelles est une ancienne fête païenne et latine devenue fête chrétienne : il s’agit de célébrer la présentation de Jésus au Temple, 40 jours après sa naissance comme pour tous les bébés juifs de l’époque, ainsi que la purification de sa mère après son accouchement. Une fête juive donc célébrée par des chrétiens… ce qui devrait nous rappeler à un certain œcuménisme, au moins historique.
40 jours
après Noël donc le 2 février. Elle est célébrée à Jérusalem dès le 4ème
siècle. Elle va prendre de l’importance vers 541 lors de la peste de Justinien
puis elle va se répandre lentement dans tout l’Occident. Les relevailles de la
Vierge seront célébrées plutôt vers 1372, donc plus tard.
Normalement dans notre Sud, c’est à partir du 2 février que la crèche de Noël est rangée, constituant ainsi le dernier moment du cycle de la Nativité (avant la réforme de la liturgie du concile Vatican II).
Dans les églises, les torches étaient remplacées par des chandelles bénies, supposées éloigner le mal et rappelant que le Christ est la lumière du monde. Les chrétiens emportaient ensuite chez eux ces chandelles afin de protéger leur maison. Si le cierge ne s’éteignait pas sur le chemin, c’était un heureux présage et celui qui le tenait était sûr de ne pas mourir dans l’année…
La tradition en est attribuée au pape Gélase Ier, qui faisait distribuer des crêpes aux pèlerins arrivant à Rome. Le pape aurait jugé plus sage de christianiser un rite païen que d’essayer de le détruire. Il se serait inspiré d’après Bède le Vénérable, moine et historien anglais du 7ème siècle des fêtes romaines ou peut-être de la Grèce antique.
En fait, aussi loin que les archives s’en
souviennent, on peut rattacher cette coutume aux Vestales romaines qui lors des
fêtes des Lupercales faisaient offrande de gâteaux à base de blé de la
précédente récolte pour que la suivante soit aussi bonne.
Chez les Celtes, le 1er février on
fêtait Imbolc en l’honneur de la déesse Brigit, célébrant la purification et la
fertilité des terres au sortir de l’hiver. Flambeaux, processions avant les
semailles…
Dans la Grèce antique, Proserpine vit avec Pluton le dieu des Enfers en automne et en hiver, Elle retourne auprès de sa mère Cérès la déesse des moissons au printemps et en été. Donc en février on allumait des torches pour célébrer son retour qui apportait lumière et fertilité…. Des rites pour s’assurer une bonne année.
« Si point ne
veux de blé charbonneux, mange des crêpes à la Chandeleur. »
Mais pourquoi des crêpes ? Rondes
et dorées, un symbole du disque solaire célébrant le retour de la
lumière ? La
chandeleur marque le moment où les jours commencent à s’allonger plus
rapidement. C’est surtout un plat rustique et économique : autrefois on se
servait de l’excédent de farine de l’année précédente avant qu’elle ne s’abime.
On les retournait en les
faisant sauter dans la poêle, en espérant prospérité et abondance dans les
prochaines récoltes.
C’était une des coutumes de la vieille France qu’à la
Chandeleur on fait des crêpes dans l’âtre du laboureur et que chacun doit
retourner la sienne. « À la
Chandeleur, dit Abel Hugo, si les paysans ne faisaient point de crêpes, leur
blé de l’année serait carié. Et celui qui retourne sa crêpe avec adresse, qui
ne la laisse pas tomber dans les cendres, ou qui ne la rattrape point dans la
poêle, sous la forme navrante de quelque linge fripé, celui-là aura du bonheur
— de l’argent, cette forme tangible du bonheur — jusqu’à la Chandeleur de
l’année suivante. »
Une autre coutume qui remonte à la fin du ve siècle et liée
au rite de fécondité : quand
on était assez riche pour avoir une pièce d’or à sacrifier, on faisait sauter la
première crêpe avec la main droite en tenant une pièce d'or dans la gauche.
Puis la pièce d'or était enroulée dans la crêpe avant d'être portée en
procession par la famille dans la chambre où on la déposait sur l'armoire
jusqu'à l'année suivante. La crêpe est alors réputée ne pas moisir et
éloigner la misère.
Une
superstition qui touche même les Grands de ce monde. On dit que Napoléon avant
de partir pour la campagne de Russie fit
une partie de crêpes. Quand ce fut son tour de « tenir la queue »
de la poêle, il dit : « si je retourne celle-ci, je gagnerai la
première bataille »… Et la crêpe se retourna. « si je retourne cette
autre, je gagnerai la deuxième », …..la troisième, de même. Mais la
quatrième roula dans la cendre : c’était la Bérézina !!
Pour nos anciens, le cierge de la Chandeleur faisait
office de précieux talisman contre les sortilèges et les maléfices. Un animal
malade, vite quelques gouttes du cierge dans son breuvage. L’orage menace, on
l’allume pour conjurer la foudre. C’est encore lui qu’on éclaire pour bénir les
premiers communiants, les fiancés avant leur départ pour l’église. Aussi
lorsque le prêtre vient administrer les derniers sacrements à un mourant….
La fête de la Chandeleur s’intéresse aussi aux
amoureux. Après une neuvaine à la chapelle de la Vierge, le 2 février, chacun
voit en rêve celui ou celle qui sera sa moitié. « À
la Chandeleur, trouve ton âme sœur : que du bonheur ! »,
proverbe provenant d'Alsace.
Coutumes, superstitions, souvent très éloignées des
rites chrétiens, remontent à des temps tellement anciens que nous ne savons
plus quel en est le sens symbolique. Des traditions qui se sont adaptées au fil
des siècles à nos mœurs et qui subsistent encore en dépit des années et des
révolutions de l’Histoire.
Sources et pour en savoir plus : La France Pittoresque D’après « La Tradition », paru en 1904)Publié / Mis à jour le JEUDI 2 FÉVRIER 2023, par LA RÉDACTION--- wiipedia .org-- /www.la-croix.com/Religion/chandeleur--- /icalendrier.fr/religion/fetes-catholiques/chandeleur/--- www.ouest-france.fr/societe/fetes/chandeleur-pourquoi-mange-t...---Philippe Walter, Mythologie chrétienne, éd. Imago.---Philippe Walter, La Mémoire du temps. Fêtes et calendriers de Chrétien de Troyes à la Mort Artu., Paris : Champion, 1989.--- Marie-Odile Mergnac et Thomas Köhler, Proverbes et dictons de toujours, Paris, Archives et cultures, 13 octobre 2008, 192 p. (ISBN 978-2-35077-101-4, lire en ligne [archive]).
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