Tour de la Babote- |
Montpellier la Tour de la
Babote
Aquarelle de Mme Figuier BNF |
Où comment une rumeur taquine rend un monument populaire et peut-être bien
le sauve.
La légende a voulu pendant longtemps que Louis
Sébastien Lenormand ait sauté en parachute le 26 décembre 1783 de la tour de
la Babote de Montpellier. L’exploit était spectaculaire, un mélange de science et de magie. En
cette période, on veut croire au progrès qui apportera une meilleure vie.
C’est le
scientifique local Louis Figuier (1819-1894) qui est à l’origine de cette
rumeur. Enseignant puis écrivain il se lance dans la réalisation d’ouvrages de
vulgarisation scientifique qui simplifient, romancent les découvertes. C’est le
« Jules Verne» de Montpellier. Sa femme dessine l’épisode du saut. Elle
écrit aussi des romans et dessine, peint. La légende sera tenace jusqu’aux
années 1950-58, date où la plaque célébrant cet exploit est retiré !! Grâce à
l’historien montpelliérain Louis-Henri Escuret qui publie en 1952-55 un
fascicule dénonçant les erreurs historiques figurant sur le dessin de Madame
Figuier.
Louis Sébastien Lenormand,
(1757-1837) physicien et inventeur est né à Montpellier, fils d’un horloger. Il
étudie à Paris la physique et la chimie avec les professeurs Lavoisier et
Berthollet. Il s’intéresse aussi au salpêtre et à la production de la poudre à
canon.
(lecameleon.wifeo.com/les-inventions-par-p.php)
De retour à Montpellier il s’intéresse à l’horlogerie avec ses applications mathématiques. Très impliqué dans la communauté intellectuelle de Montpellier il commence ses expériences sur le parachutisme. L’histoire racontée par un diplomate de Louis XIV décrivant un équilibriste thaïlandais l’inspire avec son parasol attaché à sa ceinture qui ralentit sa chute. Il teste ses idées avec des poids, des animaux, des mannequins, mesurant les temps de chute et les impacts sur le sol.
De retour à Montpellier il s’intéresse à l’horlogerie avec ses applications mathématiques. Très impliqué dans la communauté intellectuelle de Montpellier il commence ses expériences sur le parachutisme. L’histoire racontée par un diplomate de Louis XIV décrivant un équilibriste thaïlandais l’inspire avec son parasol attaché à sa ceinture qui ralentit sa chute. Il teste ses idées avec des poids, des animaux, des mannequins, mesurant les temps de chute et les impacts sur le sol.
Louis Henri Escuret |
C’est la période des frères Montgolfier qui testent leur ballon
avec des animaux dans la nacelle. Lenormand présente son invention, « le parachute »,
devant les Etats Généraux du Languedoc : une sorte de nacelle en osier
pouvant contenir un objet ou une personne, suspendue par un ensemble de cordes
et une toile circulaire. Mais le directeur de la Société Royale des Sciences
s’attribuera cette invention.
Il faudra attendre 1797 pour le premier saut en parachute
effectué à Paris par André-Jacques Garnerin qui reprend grosso modo la
technique de Lenormand en l’améliorant.
Sur la fin de sa vie
Lenormand fait annuler son mariage et entre à la chartreuse devient moine
convers sous le nom de frère Chrysotome.
gravure anonyme -BNF |
La Tour de la Babote est un vestige des 25 tours
carrées de l’enceinte fortifiée de Montpellier de la fin du 12ème
début 13ème siècle, édifiée par les Guilheim de Montpellier. Les Tours des Pins, de
la Blaquière et la Porte du Pila Saint-Gély ponctuaient la « Commune
Clôture » qui englobait aussi une partie de la colline voisine appartenant aux
évêques de Maguelone... 2650 m de périmètre, murs de 8 mètres de haut, 2 mètres
d’épaisseur…. Pierres de la carrière de Caunelle à Juvignac. Les tours étaient
coiffées d’une toiture et huit portes ouvraient sur la ville. Un chemin de
ronde au sommet des murailles, doublé à l’intérieur d’un chemin de 12 pans pour
faciliter la circulation de la défense en cas d’attaque. Côté extérieur un
fossé de 30 m de large et de 4 m de profondeur dans lesquels s’écoulaient
différents ruisseaux de la ville comme le Verdanson au nord et les Aiguerelles
au sud. Le tout surveillé par les « ouvriers de la commune clôture »,
notables sous l’autorité des Consuls de la ville : ils assuraient
l’entretien des murs, des tours, des fossés, du chemin des 12 pans, des portes,
veillaient aux intrusions, aux éventuelles constructions parasites, aux
plantations dans les fossés. Ils étaient responsables des clés de la ville. La Babote est une tour creuse c’est-à-dire avec un vide côté ville (voir photo en
fin de texte).
Actuellement la commune clôture forme les boulevards
et l’Ecusson.
Babote peut s’écrire avec deux « t ». Nous
nous interrogeons toujours sur sa signification. Le terme apparait dans les
archives de 1304 « la babota del valat », la babote du fossé. En
occitan babota signifie « fantôme », âmes errantes. Plutôt féminin du prénom
hébreu Babel, ou nom d’un insecte vivant dans les fossés,…., ?? Plus fantaisiste,
les vignerons qui écrasent le raisin avec leurs bottes, alors que cela se
faisait traditionnellement pieds nus. Et puis les paysans de 1304 ne devaient pas
avoir beaucoup de bottes !!.
1905 |
Cette tour a vécu plusieurs affectations Au 14ème
siècle le bâtiment s’appelait aussi « tour des bains » : des
étuves occupaient l’arrière de la Tour. Elle sera la Tour de l’Observatoire
quand la Société Royale de Montpellier s’y installe. Puis la Tour du Télégraphe…
Pendant la guerre de Cent Ans, on rehausse murs et les
tours. Le siège de Montpellier en 1622 par l’armée de Louis XIII pendant les
guerres de religion de Rohan n’apportera pas de grandes modifications de
l’ensemble. Peu à peu comme partout, ce système de défense n’étant plus
aussi nécessaire, les murs seront dégradés, utilisés par des constructions parasites,
percés par trois portes supplémentaires. Les fossés seront comblés au pied de
la tour de la Babote en 1791 pour devenir le boulevard de l’Observatoire, en
1793 le fossé des Arbalétriers se transformera en boulevard de la Comédie et
plus tard en boulevard Victor Hugo.
Le 12 mai 1706 la Société Royale des
Sciences invite le beau monde, la foule et les astronomes à se retrouver au
petit jour au pied de la tour pour observer l’éclipse totale du soleil visible
à Montpellier. Pour la première fois on utilise la lunette de Galilée et une
description scientifique du phénomène est faite. En 1739 l’Académie des
Sciences demande l’autorisation d’aménager un observatoire d’astronomie dans la
tour. Le directeur général des fortifications le maréchal d’Asfeld accorde ce
privilège.
La tour sera transformée en observatoire
en 1741-45 grâce aux dons privés mais aussi aux subventions de la ville de Montpellier et de la
Société Scientifique de Paris. Pour cette occasion une salle d’observation
équipée de matériel ad hoc est construite en surélévation à l’intérieur d’un
pavillon surmonté d’une terrasse en encadré de deux tourelles avec escalier
d’accès.
Nouvelle transformation en 1788 après un procès
de 30 ans contre la confrérie des Pénitents Bleus. Leur nouvelle église
touchait la partie nord de l’observatoire et obligeait de passer par leur
chapelle. Le clocher plus haut que prévu masquait certaines fenêtres nord de
l’observatoire. Une deuxième surélévation sera payée pour l’essentiel par la
confrérie. Une nouvelle terrasse est construite à 25 m du sol côté ville.
La Société Royale des Sciences fera la renommée de Montpellier
et ses publications, ses nombreuses observations seront très recherchées.
La Révolution amène la dissolution de la société
royale en 1793 qui deviendra un temps la Société Libre des Sciences et Belles
Lettres de Montpellier jusqu’en 1816.. Cette tour, pourtant symbole de la royauté
échappe à la démolition pendant les événements. Mais en 1795 Jean Bimar
entrepreneur et tenancier d’une société de messagerie profite de la situation
et pousse les autorités à percer un raccourci par une porte au bas de la Tour
essentiellement pour son propre usage commercial. Ce percement nuit à sa stabilité et à la précision des
mesures d’observation.
En
1832 le télégraphe de Chappe s’installe dans la tour qui devient la Tour du
Télégraphe. Un logement est aménagé au premier étage pour le directeur, une
cabane en bois pour les appareils est construite sur la terrasse. Pendant 20
ans le télégraphe fonctionne avec une ligne vers Paris via Nîmes, Avignon,
Lyon, Dijon et une correspondance vers Marseille et Toulon et une ligne jusqu’à
Tours via Narbonne, Toulouse, Bordeaux avec une correspondance vers Bayonne.
Réseau codé, à la seule disposition de l’Etat. L’arrivée du télégraphe à fil
sonne la fin de cette affectation en 1853.
Puis la tour n’est
plus entretenue et abrite diverses utilisations, société colombophile et ses
pigeons voyageurs, musée du vieux Montpellier, club d’échecs et encore la
société d’astronomie de l’Hérault.
En 1980-90 sous
la mandature du maire Georges Frêche, de grands travaux de restauration sont
décidés : destruction des constructions parasites, du Colombier, de
l’hôtel du Nord, d’une partie du Comptoir National d’Escompte de Paris. Côté
intérieur de la ville, des bâtiments sont aussi rasés pour dégager un square.
Depuis 1982
la tour abrite à nouveau la Société Astronomique de Montpellier, un juste
retour aux sources.
(CPSM FRANCE 34 "Montpellier,
la tour de la Babote"-date ? bien avant 1980 ).
..
La totalité
du bâtiment est classé aux monuments historiques depuis le 4 août 1927. Nostradamus avait prédit la disparition de la
ville si les pins de la « Tour des Pins » disparaissaient :
est-ce que la malédiction s’étend aussi à la Tour de la Babote ?
Tour de la Babote côté ville partie creuse |
Sources :
Légende du parachute, in « De savants en découvertes » de Valdo
Pellegrin 2017.—BNFgallica Louis Sébastien Lenormand--wwwsudbabote.fr/association/notre-quartier/leslieux-remarquables/41-la-babotte--
-- Jean-Michel
Faidit, L'Observatoire de la Babote,
Centre Culturel de l'Astronomie, 1986---Roland Jolivet (Avec le concours de Bernard Jamme et d'Yvon
Courty), Montpellier au passé
recomposé, t. 1et 2, Montpellier, chez l'auteur, Imp. Déhan, 1989,
150 p., br, 20 × 25 cm (Sudoc 008091986 en
ligne)—photos site mairie de Montpellier montpellier.fr/336-tour-de-la-babote.htm –
Gwenaël Cadoret Gazette de Montpellier et de Nîmes Guide de l’été juillet 2018 –
fr.wikipedia.org/wiki/Tour de la Babotte—Base Mérimée ministère de la Culture
notice PA00103606---.Louis-Henri Escuret Histoire des Vieilles Rues de Montpellier
Presses du Languedoc 1981 réédition-- +La Tour de la Babote 1952 --
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