l’arrivée du train dans l’univers de nos ancêtres.
Maintenant le train nous parait naturellement indispensable. Il correspond à trois nécessités, durée des déplacements, le volume ou poids des biens transportés, les distances. Et maintenant en plus le souci de l’énergie dépensée.
Le 18ème siècle dans notre
pays, avait vu l’essor du réseau routier mais la population avait fortement
augmenté et donc les besoins en transport des marchandises et des personnes
avaient explosé. Nos ancêtres vivaient encore enracinés dans leur village. Mais
l’extension du réseau routier avait ouvert leur horizon jusqu’au canton, bien
malgré eux et grâce aux corvées royales. En 1780 la diligence permet de se
rendre de Paris à Angers en trois jours à la vitesse de 10 à 11 km/heure. Le
monopole d’état organisé par Turgot en 1775 structure le transport des
voyageurs dans de meilleures conditions standardisées avec l’apparition des
diligences « turgotines », plus légères et plus rapides. On
réglemente aussi le transport de nuit avec deux cavaliers de la maréchaussée
escortant les voyageurs.
Mais les chevaux qui trainaient les
diligences avaient des limites quant au poids maximum qu’ils pouvaient
transporter. Des charges plus lourdes demandaient de renforcer les véhicules
donc de les alourdir. Les routes devaient supporter plus de déformations, de dégradations
du fait des véhicules …. Donc moins roulantes… Comment répondre à ces besoins
de transport ?
Le 19ème siècle est celui de la révolution industrielle donc nécessité du déplacement de la main d’œuvre dans un lieu particulier, besoin de transporter des matières premières et ou des produits finis ou transformés. Nos arbres généalogiques nous montrent des déplacements de populations pour installer les chemins de fer, puis pour trouver du travail ailleurs. Les mines embauchent les hommes, les familles bourgeoises en ville ont besoin de domestiques, les jeunes filles des campagnes feront l’affaire…
La solution, nous allons la trouver au
fond des mines. En France, en Allemagne, en Angleterre pour transporter les
minerais extraits on utilisait le rail ! (étymologie du mot rail : il est issu de
l’ancien français reille = barre, lui-même tiré du latin regula (= règle, barre).
Pourquoi chez nous une certaine
frilosité devant ce système ? En Angleterre dès les années 1700, des
wagons avec roues en bois renforcées étaient utilisés dans les mines et dès le
milieu du 18ème siècle les premiers rails métalliques étaient posés
dans ce pays. Le train va permettre un gain de temps considérable. L’arrivée en
France du rail est timide. Les guerres napoléoniennes ralentissent le
développement du chemin de fer. Les investissements sont lents à s’orienter
vers ces innovations. Nous avons un important réseau de canaux qui permet en
haut lieu d’attendre et voir venir.
Et comment le rail est-il arrivé dans les galeries des mines ?
Au départ, le transport du minerai dans les galeries se faisait par simple portage de sacs : on faisait appel à une main d’œuvre la moins qualifiée, les femmes avec des sacs jusqu’à 30 kg et les enfants avec des sacs jusqu’à 20 kg. Une technique aussi vieille que l’extraction des minerais. Nos lointains ancêtres utilisaient les esclaves, les prisonniers …. Puis devant l’augmentation des quantités de minerais extraites, le wagonnet sur roues en bois s’imposera, tiré à la bricole par des femmes et poussé par des enfants.
Mais des ornières apparaissent avec les
passages répétés des roues au même endroit et le chemin devint vite
impraticable. Alors on installe des planches de bois sous les roues des
wagonnets. Un chemin de halage est aménagé pour assurer la stabilité du
wagonnet et le parallélisme des planches est assuré par des traverses
immobilisant les planches. Mais il fallut devant la flexibilité des planches
rigidifier celles-ci en les remplaçant par des barres en bois, servant à la
fois de support et de guide pour les roues des bennes : le rail était
né !!
Les roues en bois sont ensuite cerclées de fer pour les renforcer et limiter l’usure. Le poids chargé des wagonnets ira jusqu’à 450g de minerai avec un seul homme pour pousser (le rouleur).
A partir de 1820 en France, le rail en
bois est remplacé par le rail en fer, amenant une diminution substantielle des
frottements et permettant une économie d’énergie importante, énergie encore
humaine.
L’agrandissement des galeries des mines
permettra la traction par des chevaux et des trains de douze wagonnets.
Les rails sortent alors des mines pour rejoindre le carreau de l’exploitation, les gares, les ports fluviaux où des péniches assurent le transport des minerais et du charbon.
Ces rails étaient exposés aux intempéries et pour drainer et stabiliser l’ensemble, les traverses seront mntées sur un ballast.
Le rail était prêt pour rencontrer sa locomotive, de la grande famille des machines à vapeur, autre innovation qui va bouleverser la société. Le fardier de Cugnot date de 1770, le premier brevet de locomotive à vapeur de James Watt de 1784.
1827 : ouverture de la première ligne
de chemin de fer française, longue de 23 km. Elle transporte le charbon des
mines de Saint-Etienne à la Loire avec 3 wagonnets. Le train descendait par
gravité et remontait tiré par des chevaux.
1829 : première locomotive française
– ligne Saint-Etienne-Lyon, 58km avec une locomotive à chaudière à tubulaire du
français Marc Seguin –
1830 : premier transport de passagers
– sur la ligne Saint-Etienne-Lyon, les voyageurs installés dans les wagons
servant au transport du charbon, tirés par des chevaux
1834 : ligne
Roanne-Saint-Etienne-Lyon 140 km – on remarquera que tout ou presque a démarré
avec la mine du bassin stéphanois.
1837 : première ligne parisienne de
voyageurs - 19 km Paris-Saint Germain en
Laye en 25 minutes (15 à l’aller et 10 au retour) soit 80km/h –
1842 : à partir de Paris, projet d’un
tracé du réseau en étoile à 7 branches – il a fallu une loi pour valider ce
projet
Malgré peurs et réticences des uns et des autres, tout va aller très vite. De 1852 à 1870 on passe de 59 km à 20 000 km de voies ferrées.
1850
1860
1911
Implantation des réseaux ferroviaires en
60 ans.
La progression du nombre de lignes
montre à quel point le transport marchandises-voyageurs est vite devenu
essentiel. C’était avant l’invention de l’automobile et de l’avion. Mais on
doit noter aussi en parallèle au train, l’évolution des liaisons entre village
par car, bus, tramway dans quelques grandes villes.
Le nombre de cheminots va passer de
45 000 en 1855 à 237 000 en 1882 environ pour l’ensemble des
compagnies ferroviaires.
Le rail et son réseau ferroviaire seront
un support essentiel de la révolution industrielle du 19ème – début 20ème
siècle et contribueront à l’exode rural. Les mines qui ont besoin d’extraire de
plus en plus de charbon pour les machines à vapeur, vont embaucher, exploiter
des terres agricoles, exproprier. Pour échapper à la misère et rêver à une
autre vie, on quitte son village. Tout au long du tracé des voies, on construit
des gares, des bâtiments annexes, des entrepôts, des logements. Des métiers
non-agricoles fleurissent le long des trajets, mais très vite les produits
qu’ils fabriquent sont apportés par les manufactures à moindre cout par le
train.
L’exilé servira d’exemple, de refuge pour
accueillir des membres de sa famille, de son village d’origine. Mais et c’est
la moindre des choses, le train permettra de maintenir un lien social entre les
exilés et leur famille restée au pays. Le courrier postal devient un service
postal ferroviaire en 1845, le timbre-poste date de 1849, le facteur distribue
le courrier dans un peu près tous les villages. On s’organise, il y avait toujours
une personne qui pouvait lire et écrire une lettre. (dans son village mon
grand-père, son père avant lui appelés « le ministre », un locataire
de ma maison appelé « l’évêque »..).
Mais le train servira aussi dans les
conflits armés pour le déplacement des troupes, des armes, du matériel. La
guerre de sécession américaine (1861-1864) inaugura l’usage du train, sans
réelle influence sur l’issue du conflit : les deux adversaires l’utilisèrent
et cet usage concomitant n’accorda que peu d’avantages à l’un au détriment de
l’autre.
Il n’en est pas de même lors de la guerre
de 1870 entre la France et la Prusse. En seulement douze jours, la Prusse
mobilisa sur la petite centaine de kilomètres de la frontière 450 000
soldats opérationnels plus 80 000 des armées de la Bavière, du duché de
Bade et du Wurtenberg, avec matériels, intendance etc. Ce fut possible grâce à
l’utilisation rationnelle et systématisée du réseau ferroviaire prussien.
Chez nous 240 000 soldats dans ce
même délai alors que c’était nous qui avions déclaré la guerre !!
Le train pour le meilleur et pour le pire !!
Illustration du chemin de fer en France – Auteur
inconnu | Domaine public
Sources : Thierry Sabot gazette@histoire-genealogie.com-- Michel Baumgarth—wikipedia.org--- revue-histoire.fr/actualite-histoire/le-rail-francais-une-histoire-de-coeur-mais-surtout-de-passionnes/----