dimanche 30 juin 2019

Fabre d'Eglantine, Il pleut, il pleut bergère


Fabre d’Eglantine





Buste par Aybram-Musée des Beaux-Arts de Carcassonne  

Depuis quelques temps, le thème de la Révolution Française de 1789 revient dans toutes les conversations. De cet événement nous avons une lecture idéalisée, magnifiée, fantasmée. Comme si nous avions du mal à en digérer les excès, les insuffisances, les désillusions. Dans notre village un artisan toilier ruiné avant 1789, se réveille riche après 1800 au point de bâtir un château, privatiser une route, réclamer des bancs à l’église……bref se comporter comme les ci-devant seigneurs ! Cet exemple parmi tant d’autres devrait nous remettre les pieds sur terre ! Une révolution n’a rien de romantique, elle se fait trop souvent dans le sang pour terminer par un gouvernement extrémiste. Des grandes aspirations de 1780-89, il faudra attendre la fin du 19ème siècle pour les voir enfin se concrétiser.

Nous allons ici nous pencher sur un personnage de cette époque, Fabre d’Eglantine, talentueux, mais menteur, excessif, opportuniste et qui s’est brûlé les doigts au contact de la politique. Fripon pour les uns, doté d’un attrait pour l’intrigue, dépourvu de sens moral pour les autres. En tous lieux et en tous temps, les chaos politiques engendrent des opportunités rêvées pour des personnages limites. Robespierre se servira de lui pour atteindre Danton. Robespierre qui dira de Fabre : « Des principes et point de vertu; des talents et point d'âme; habile dans l'art de peindre les hommes, beaucoup plus habile à les tromper. »

Il pleut, pleut bergère

"Il pleut, il pleut, bergère" est une chanson tirée de l'opérette « Laure et Pétrarque » écrite en 1780 par Fabre d'Églantine.
 
Il pleut, il pleut, bergère, 
Presse tes blancs moutons,
Allons sous ma chaumière,
Bergère vite, allons.
J'entends sur le feuillage,
L'eau qui tombe à grand bruit,
Voici, voici l'orage,
Voilà l'éclair qui luit.
Entends-tu le tonnerre ?
Il roule en approchant
Prends un abri, bergère,
A ma droite en marchant.
Je vois notre cabane.
Et tiens, voici venir
Ma mère et ma sœur Anne
Qui vont l'étable ouvrir.

Bonsoir, bonsoir, ma mère,
Ma sœur Anne, bonsoir,
J'amène ma bergère
Près de vous pour ce soir                
(Huile sur toile-anonyme 18ème -Château de Versailles).
Va te sécher, ma mie,
Auprès de nos tisons,
Sœur, fais lui compagnie,
Entrez petits moutons.

Soignons bien, ô ma mère,
Son tant joli troupeau,
Donnez plus de litière
A son petit agneau.
C'est fait. Allons près d'elle,
Eh bien ! donc te voilà !
En corset qu'elle est belle !
Ma mère, voyez-la.

Soupons, prends cette chaise,
Tu seras près de moi,
Ce flambeau de mélèze
Brûlera devant toi.
Goûte de ce laitage.
Mais tu ne manges pas ?
Tu te sens de l'orage.
Il a lassé tes pas.

Et bien voilà ta couche       
Dors y bien jusqu'au jour  
Laisses-moi sur ta  bouche
Prendre un baiser d'amour  
Ne rougis pas bergère
Ma mère et moi demain
Nous irons chez ton père
Lui demander ta main

Philippe-François-Nazaire Fabre dit Fabre d’Eglantine nous est surtout connu pour cette jolie comptine qui n’était pas vraiment pour les enfants. Il a été capable du meilleur comme du pire, auteur de cette bluette mais envoyant à la mort des hommes, sans état d’âme. Des écoles maternelles portent son nom ; ce choix est-il judicieux ?
Il est né à Carcassonne en juillet 1750 et va traverser la période révolutionnaire pour être guillotiné le 5 avril 1794 à Paris. Acteur, poète, dramaturge, puis la politique qui va lui coûter sa tête aux côtés de Danton.

Son père est marchand-drapier. Une famille de la petite bourgeoisie. Ils quittent Carcassonne en 1757 pour Limoux, probablement pour des raisons économiques. Philippe au collège de l’Esquile de Toulouse étudie les langues, les littératures grecques et latines. Sous la houlette des Pères de la Doctrine chrétienne il suit les cours de musique, de dessin, de gravure. Il devient professeur des « basses classes » en 1771, dans le collège de la congrégation.
 Il obtient aux Jeux Floraux de l’Académie de Toulouse, le « lys d’argent » pour son sonnet à la Vierge. Quand il quitte le collège pour lancer sa carrière, pour des raisons de consonance et surtout par opportunisme, il ajoute à son nom « d’Eglantine » plus harmonieux que Fabre du Lys. En fait l’églantine d’or était le prix réservé à l’éloquence donc des textes en prose et non pour un poème. Et ce prix n’a pas été attribué cette année-là. Qui allait vérifier ?

Avec une troupe de comédiens ambulants, on le retrouve sur les routes de France, Bordeaux, Grenoble, Chalon sur Saône, Strasbourg… Il a la bougeotte, les comédiens ambulants ne sont pas riches et souvent affamés. Il est banni des Pays-Bas après avoir frôlé la pendaison pour avoir séduit une jeunette de 15 ans. En 1777 il est à Paris où il compose un des trois poèmes en l’honneur de Buffon. Une expérience ratée de direction de théâtre à Sedan. Puis un mariage en 1778 et un fils futur polytechnicien et ingénieur du génie militaire. Dans l’acte de mariage, il ne se gêne pas pour se présenter comme « licencié en droit, fils d’avocat au Parlement » !!. Les deux époux sont acteurs, à Maastricht de 1779 à 1780. Lui joue dans le Misanthrope, le Distrait…dans les premiers rôles. Accessoirement il peint en 1780 le rideau du théâtre du Jekerstraat. Cette même année il présente son opéra-comique Laure et Pétrarque, pièce en un acte et musique.
Liège, le Nord de la France, Fabre s’essaie au journalisme avec « Le Spectateur Cosmopolite » qui n’a pas laissé de traces. Puis en 1783 Lyon, Genève, où son métier d’acteur le rattrape. En 1785 il prend la direction du théâtre de Nîmes. Sa troupe vient aussi jouer au théâtre d’Avignon. Il repart sur les routes, rejoint Paris en 1787 et s’y déclare auteur dramatique. Ses pièces ne reçoivent pas toujours le succès qu’il attend. Peut-être trop intellectuelles, ces œuvres dénoncent le côté social et politique de la littérature. Début janvier 1789, on l’accuse de plagiat et lui, crie à la cabale.
Une nouvelle femme l’accompagne, une comédienne encore, Caroline Remy qui joue au Théâtre de la Révolution. Il s’enflamme pour les temps nouveaux, ce qui séduit le public.


(Mlle Montansier- son père forgeron et épinglier se prétendra avocat--).
Ses pièces prennent un esprit révolutionnaire : « Le philinte de Molière ou la Suite du Misanthrope » créée en février 1790 remporte un grand succès. Il est joué au théâtre de la Nation, au théâtre-Français de la rue de Richelieu, au théâtre de Mlle Montansier. Des pièces en vers, parfois avec musique.
Mais dès la fin 1791, son style commence à déplaire et ses pièces sont sifflées. En particulier « le Sot orgueilleux ou l’Ecole des élections » tournant en dérision les hommes de la Révolution, marque un tournant dans son parcours.
Plus opportuniste que convaincu, il voit dans la Révolution l’occasion de se faire une place. D’après Saint-Just, Fabre aurait offert en 1790 et en vain, son aide à la Cour, contre trois millions pour attaquer le club des Jacobins et la Législative. Il aurait proposé au ministre de la Marine, Du Bouchage de pousser les Jacobins à se montrer favorables à la monarchie. A la veille du 10 août 1792, le roi lui aurait donné de l’argent.
Un pas de plus dans le mouvement politique : il se lie avec Danton dont il est la plume, il côtoie Marat. Il est élu plusieurs fois secrétaire ou vice-président des Cordeliers. Il est membre du club des Jacobins lorsque les Cordeliers deviennent Jacobins. Le journal « Révolution de Paris » lui prend des articles. Danton devenu ministre de la Justice le nomme en 1792 secrétaire général avec Camille Desmoulins. Il essaie de profiter des spéculations lucratives. Toute sa jeunesse il a été dans un besoin d’argent criant, dans une gêne tenace. A Nîmes en 1785 il est tellement endetté qu’il doit fuir ses créanciers, porter ses maigres biens au mont-de-piété. En 1789, Louis XVI intervient pour qu’il ne soit pas enfermé pour dettes au Fort l’Evêque, probablement sur l’intervention de Mlle Montansier la directrice de théâtre en vogue.

A partir du 11 août 1792 sa situation s’améliore : il touche un salaire de 1500£ par mois, il peut utiliser des fonds secrets. C’est un virage pour lui. Il emménage dans un hôtel particulier rue de La Ville-l’Evêque. Il va y mener grand train, meubles de prix, berline dans son écurie….
Le ministre de la Guerre Joseph Servan lui octroie 30 000 livres le 15 septembre 1792 pour approvisionner l’armée en bottes et en souliers. Le 17 octobre puis le 14 décembre, le ministre s’inquiète et réclame à Fabre le compte des sommes versées. Le Sieur sous-économe du collège Louis-le-Grand vend la mèche : Fabre a vendu dix mille paires de souliers aux volontaires du collège à des prix usuraires, des souliers qui « ne duraient que douze heures à nos volontaires qui pataugeaient dans les plaines de la Champagne »… ! Robespierre plus tard l’accusera d’avoir réalisé un bénéfice de 40 000 £ sur cette opération.
Fabre d’Eglantine semble se sortir de ce mauvais pas. Elu député de la Seine à la Convention, il appelle à la concorde et à l’union. Pourtant dans « le Compte rendu au peuple souverain », journal affiché dont il est le rédacteur, il appelle au massacre : « …que le sang des traitres soit le premier holocauste offert à la Liberté.. ». Dans le numéro 7 il justifie la tuerie de Versailles du 9 septembre 1792 et tente d’organiser d’autres massacres en province. Les événements du 2 au 9 septembre ont fait autour de 1300 morts à Paris, les noyades de Nantes de nov 1793 et février 1794 dans la Baignoire Nationale 1800 et 4860 morts !!). Nous sommes loin de la jolie contine. Il vote la mort de Louis XVI sans appel ni sursis. Il n’a pas compris qu’il n’est plus sur une scène de théâtre. Dans le sens du vent, il veut donner l’image d’un révolutionnaire intransigeant. Mais il choisit de voter au gré de ses intérêts, intriguant de l’ombre, en faveur des hommes du moment, et même contre ses anciennes relations d’affaires.


Membre du Comité de Guerre depuis le 3 janvier 1793, il est chargé de mission pour la levée de 300 000 hommes. Vite remplacé le 9 mars. Puis c’est la Commission de Salut Public, et après le Comité de Salut public le 6 avril. Son projet de calendrier républicain est adopté, calendrier qui renvoie à une « idéologie agricole et rurale » par le nom des mois et des jours. Le 22 septembre 1792, après l’abolition de la royauté, les actes du gouvernement seront datés de l’An 1 de la République. Le calendrier grégorien est aboli, pour être remis en place par Napoléon le 1er janvier 1806.
L’affaire de l’ancienne Compagnie des Indes va sonner sa fin. Fabre avec Delaunay, Delacroix et Toulouse engage une campagne contre l’agiotage en accusant la Compagnie des Indes et les étrangers de spéculation au service de puissances étrangères. La Convention vote la suppression des compagnies par actions et la liquidation de la Compagnie. Les biens des étrangers sont mis sous séquestre. Fabre dénonce une vaste conspiration de l’étranger et accuse une vingtaine de personnes qui sont arrêtées dont des hébertistes. Il dénonce sans fin jusqu’à la fin décembre.
Mais on découvre que le décret de liquidation de la Compagnie est un faux. Fabre, Delaunay, Chabot, Basire se retrouvent accusés de chantage et de corruption, faux en écriture, concussion. Ils jouaient à la baisse sur leurs actions pendant que les compagnies par actions étaient supprimées. Un pot-de-vin de 500 000£ leur avait été versé par la Compagnie des Indes. Chambot aurait proposé en plus à Fabre 100 000£ en pot-de-vin.
Fabre est condamné pour corruption, trafic d’opinion, tentative de division et de destruction de la représentation nationale.
Le Comité de Salut Public se laisse convaincre par la réalité du complot de l’étranger, il doit faire face aux menées des affairistes et des étrangers réfugiés, aux intrigues royalistes du baron de Batz…. Comme on a dit en d’autres temps, « Dieu reconnaitra les siens » !!
Fabre d’Eglantine est guillotiné le 5 avril 1794 place du Trône (appelée ainsi en souvenir de l’arrivée à Paris du nouveau roi Louis XIV, puis place du Trône Renversé sous la Révolution, jusqu’à juillet 1794 plus de 1300 personnes y seront guillotinées !! La place prend le nom actuel de « place de la Nation » à l’occasion de la fête nationale du 14 juillet 1880, sous la Troisième République).

(calendrier républicain PLuviose)

 Fabre sera inhumé au cimetière des Errancis, puis aux Catacombes après la fermeture de ce cimetière.
Les légendes qui entourent cette mort, l’une le font pleurer  de n’avoir pas terminé un poème et Danton lui aurait dit : « Ne t’inquiète donc pas, dans une semaine, des vers, tu en auras fait des milliers… ». Ou bien pour une autre, on le voit fredonner « Il pleut, il pleut, bergère » en montant à l’échafaud.


Sources : /www.universalis.fr/carte-mentale/fabre-d-eglantine-- Roger Dufraisse agrégé de l'Université, maître assistant à l'université de Caen-- Patricia Bouchenot-Déchin, La Montansier. De Versailles au Palais-Royal, une femme d'affaires, Paris, Perrin, 2007 (ISBN 978-2-262-02681-3).--Manuel Bonnet La Montansier (1730-1820), la fameuse directrice, éditions Arlys, 2009 (ISBN 978-2-85495-395-4).-- dictionnaire des parlementaires français de 1789 à 1889 (Adolphe Robert et Gaston Cougny) assemblee-nationale.fr/sycomore/fiche/%28num_dept%29/12234
--www.rtl.fr/actu/debats-societe/fabre-d-eglantine-qui-composa-un-poeme-sur-le-chemin-de-la-guillotine-7784254691Lorent Deutsch
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dimanche 23 juin 2019

Frédéric Mistral Les Hantises de la Nuit


















Paul Cézanne, la Montagne Sainte-Victoire vue des Lauves

Frédéric Mistral Les Hantises de la Nuit

(ou Frédérique version provençale)


Le grand poète nous a laissé ce joli conte.





In Les Contes Populaires de la Provence et de la Côte d’Azur  édit CPE—cpe-editions.com sous la houlette de Pierre-Etienne Mareuse collaborateur de l’Almanach des Terroirs de France--Wikipédia--Frédéric Mistral, prix Nobel de littérature à la une du magazine Le Petit Journal, en 1904.



dimanche 16 juin 2019

L'Edit de Nantes - de la Tolérance à la Liberté



L´Édit de Nantes - 1598. Henri IV (1553-1610)


l’Edit de Nantes- De la Tolérance à la Liberté





(Musée protestant internetEdit de Nantes publication 1599)
L’intolérance religieuse, puis les Guerres de Religion ont ensanglanté notre pays au 16ème siècle. La liberté de conscience était quasiment impensable en cette période. La fin du 17ème siècle ne sera pas plus clémente pour la liberté religieuse. Pourtant dès la fin du 16ème avec l’Edit de Nantes, l’idée du respect d’autrui entre timidement dans notre droit. Luther, Calvin avaient insufflé dans toute l’Europe un élan religieux. Chacun s’interrogeait sur sa foi. Le Concile de Trente de 1545-1563 avait conduit le clergé catholique à se réformer devant les errements de certains religieux. Mais rien n’y fit. Chacun voulait vivre sa religion même au péril de sa vie. L’Edit de Nantes est avant tout « une espérance de liberté », le fruit d’un compromis entre catholiques et protestants. "La paix est enfin sauve" !
Mais cette loi sera révoquée moins d’un siècle plus tard, faisant son chemin plus dans les consciences que dans la réalité politique.
Lorsqu’Henri IV succède à Henri III en 1589, le pays est toujours en guerre. Il abjure le protestantisme en 1593, pour être sacré roi en 1594. Dans sa jeunesse il avait changé de religion six fois au gré de sa propre histoire. Il avait vécu comme tous les Français les édits de pacification prononcés depuis 1562 jusqu’à 1577, édits qui très vite sont lettres mortes. Il était urgent de pacifier le royaume et d’avancer. Il aurait dit : « La satisfaction qu'on tire de la vengeance ne peut durer qu'un temps, mais celle que nous donne la clémence est éternelle ».
Pourquoi Nantes ? Les assemblées générales protestantes déléguèrent des représentants pour rencontrer le roi à plusieurs reprises. Le souverain était en Bretagne où il recevait la soumission des derniers ligueurs bretons. Nos délégués obtinrent ainsi la signature de cet édit qui allait changer les conditions de vie des protestants français, au moins pour un temps. Entre le 13 avril et le 2 mai 1598, à Nantes, furent signés les quatre textes de cet édit : 92 articles généraux, plus des brevets relatifs à l’entretien du culte et 56 articles « secrets » encadrant l’exercice du culte.
Ce texte comme tout acte royal devait être à effet perpétuel. Il s’adresse « à tous, présents et à venir », à tous les sujets du royaume. Un peuple unifié, qui ne pouvait pas être divisé. « ….Nous parviendrons à l’établissement d’une bonne paix et tranquille repos qui a toujours été le but de nos vœux et intentions… ». Le roi souhaite régler les problèmes religieux qui avaient asphyxié le pays tout en regrettant de ne pas être parvenu à restituer l’unité religieuse du royaume. Il s’inquiétait des risques de discordes qui pouvaient résulter de l’exercice des deux cultes rivaux. Il réaffirme l’exercice de la religion catholique, apostolique et romaine « en tous les lieux et endroits de cestui notre royaume… », avec tous ses privilèges. C’est la religion d’Etat. La religion protestante ou réformée est admise par mansuétude. L’article VI indique : « ceux de la Religion Prétendue Réformée ont le droit de vivre là où il leur plaît dans le royaume de France sans être enquis, vexés, molestés, ni astreints à faire chose pour le fait de la religion contre leur conscience… ». Les brevets du 13 et 30 avril indiquent que le roi va subvenir aux « grandes dépenses » des réformés, entretien des pasteurs, des collèges et des académies, soit environ 45 000 écus par an. Les articles du 2 mai le réaffirment notamment en ce qui concerne les écoles, les consistoires, les colloques, les synodes. Les protestants gardent des « places de sûreté », villes et châteaux qu’ils détenaient à la fin août 1597, pour une durée de huit ans avec une garnison payée par le roi (environ 180 000 écus), avec un gouverneur et des capitaines nommés par le roi.

/fr.vikidia.org/wiki/Henri_IV_de_France
Liberté de culte, mais liberté encadrée, limitée, selon l’ancienneté des lieux d’exercice de la religion : seuls les endroits où la Religion Réformée avait été célébrée entre 1596 et août 1597. Là où les protestants étaient peu nombreux, ils ne pouvaient disposer que de deux lieux de culte par baillage, dans les faubourgs des villes. Aucun à Paris, à la Cour, ou dans un périmètre de cinq lieux autour de Paris. Les seigneurs hauts justiciers disposaient d’une liberté de culte quasi-totale, mais elle allait decrescendo lorsque l’on descendait dans l‘ordre social.
Cependant les protestants avaient le droit d’exercer toutes les charges publiques, fréquenter les collèges, les universités, les hôpitaux. Les affaires judiciaires les concernant étaient traitées par des Chambres mi-parties, constituées de membres des deux religions.
Les fêtes catholiques devaient être pratiquées par tous. Et le mariage dépendait de la législation catholique.
Malgré ses limites, cet édit constitue une avancée importante. Mais il aura du mal à s’appliquer. Les fidèles catholiques sont sur la défensive, on ne peut oublier cinquante ans  de troubles sociaux ; le pape Clément VIII se dit « crucifié ». Pour être appliqué, ce texte devait être enregistré par les parlements locaux. Un an pour l’enregistrer à  Paris, Grenoble, deux pour Rennes, Toulouse, Aix, Bordeaux, Dijon, onze ans pour Rouen. La tolérance n’est pas égalité entre les hommes, mais « une pitié ». Le protestantisme est admis comme une déviance vis-à-vis d’une vérité catholique, que le roi encourage avec le retour des jésuites, des carmélites espagnoles ou des ursulines. On vise toujours le principe : «une foi, une loi, un roi ». Au fur et à mesure que le nombre de protestants s’étiole, des controverses, des interprétations de l’édit en restreignent la portée. Certains articles vont être annulés par décision royale par les édits de Nîmes et d’Alès de 1629 avec la fin de la guerre de religion de Rohan.
Avec Louis XIV, qui considère le protestantisme comme une hérésie, pas moins de 300 édits en 25 ans seront signés pour restreindre encore plus la liberté de culte des protestants. Cela va des tentatives de rachat des chrétiens tentés par la RPR grâce à la caisse des conversions de Pélisson, aux dragonnades avec logement des troupes chez les protestants. En passant par les interdictions d’exercer pour les sages-femmes, les médecins, les militaires, des peines d’amendes, la confiscation des biens des relaps, l’interdiction d’imprimer la Bible version protestante, et autres joyeusetés… Conversions en nette hausse, émigration, déportation, et l’Edit de Nantes n’avait plus lieu d’être. L’Edit de Fontainebleau le 17 octobre 1685 révoque l’Edit de Nantes. Dans la joie et les fêtes pour certains, Mme de Sévigné, Bossuet, Le Tellier… A Montpellier on crée la porte du Peyrou avec un médaillon la Religion Catholique foulant aux pieds l’Hérésie protestante, une ville qui oublie son passé réformé !


(médaillon de la Porte du Peyrou—DanielVillafruela--upload wikimedia.org/wikipedia/communs/d/d1/Gate Montpellier jpg





( Porte et place royales du Peyrou -sur le site de la  Mairie de Montpellier)

Les protestants restés sur le sol français n’eurent pas trop le choix : abjurer ou entrer en clandestinité, avec persécution, exclusion, silence, méfiance, dans les deux cas. C’est dans nos montagnes et dans nos villages la guerre des Camisards. Mais une force tenait les Réformés, et leurs temples continuaient d’exister. On se marie au « Désert » c’est-à-dire aux assemblées clandestines.


Terres huguenotes (1/2) : Le Refuge huguenot  www franceculture.fr/th"m"/edit-de-nantes 

L’intendant Basville rédige encore en 1724 un édit terrible qui vise « à éteindre entièrement l’hérésie du royaume ».
« Seront condamnés : les prédicants, à la peine de mort ; leurs complices aux galères perpétuelles et les femmes à être rasées et enfermées pour toujours ; confiscation des biens…. Les parents qui ne feront pas administrer à leurs enfants le baptême dans les 24 heures, suivre assidûment le catéchisme et les écoles : à des amendes et à telles sommes qu’elles puissent monter, même à de plus grandes peines….les malades qui refuseront les sacrements : s’ils guérissent, au bannissement perpétuel ; s’ils meurent à être traînés sur la claie… nuls offices, fonctions, professions publiques sans certificat de catholicité ; les mariages du désert sont illégitimes ; les enfants qui en résultent bâtards et inhabiles à hériter….. ». La délation est fortement conseillée sous peine d’amendes.



www.academie-francaise.fr/les-immortels/francois-marie-arouet-dit-voltaire--François-Marie Arouet, dit Voltaire
L’affaire Calas en 1763 résume à elle-seule ce que vivaient les protestants dans leur vie quotidienne. Calas accusé sans l’ombre d’une preuve sous la pression de l’opinion populaire, d’avoir tué son fils pour l’empêcher de se convertir au catholicisme. Un bouc émissaire facile sans avoir besoin des Facebook et autres !! Des abus grossiers de procédure, des preuves par ouï-dire ou ragots…En appel il sera condamné au supplice de la roue, étranglé, et son cadavre brûlé, puis réhabilité trois ans après. Voltaire en dressa l’injustice dans son « Traité sur la Tolérance à l’occasion de la mort de Calas ». Voltaire y pose la base d’une véritable réflexion sur la liberté de conscience. Avec lui et bien d’autres penseurs ; l’esprit des Lumières se met à souffler sur le royaume.

Jean-Paul Rabaut en 1764 est pasteur du « Désert ». Nîmois, fils de pasteur clandestin, né en 1743, il quitte nos Cévennes à l’âge de six ans pour Lausanne en Suisse. Il y fait ses études. Quand il revient en France, il montre une finesse d’esprit, une éloquence exceptionnelles. Il prend le nom de Rabaut-St Etienne. Il fait partie des conseillers de Malesherbes pour la préparation de l’édit de Tolérance que Louis XVI signera du bout des lèvres le 29 novembre 1787. Les élites de notre royaume regardaient l’indépendance américaine comme un progrès, on s’ouvrait à de nouveaux idéaux de justice. Un pas vers une liberté de conscience ? En fait, les protestants reçoivent un état civil mais pas encore la liberté de culte. 


« La religion catholique jouira seule dans notre royaume des droits et des honneurs du culte public, tandis que nos autres sujets non catholiques…déclarés d’avance et à jamais incapables de faire corps dans notre royaume…ne tiendront de la loi que ce que le droit naturel ne nous permet pas de leur refuser, de faire constater leurs naissances, leurs mariages et leurs morts » Le roi tolérait une réalité contre laquelle il ne pouvait pas grand-chose
(Rabaut Saint-Etienne par Joseph Boze, Paris, SHPF, 1789—musée protestant.org)
Aux Etats Généraux de 1789, Rabaut Saint Etienne est député du Tiers Etat pour la sénéchaussée de Beaucaire. Il prête le serment du Jeu de Paume et devient commissaire pour les conférences.



Détail central du Tableau de David-1792. Le Jeu de Paume L’accolade fraternelle entre le chartreux  Dom Gerle, l’abbé Grégoire  et le pasteur Rabaut Saint-Étienne symbolise l’avènement d'une nouvelle ère de paix avec la Révolution

Rabaut-Saint-Etienne constate que le clergé comme les nobles ne connaissent rien au peuple auquel ils appartiennent : »ces hommes qui n’étaient jamais sortis de leurs provinces et qui venaient de quitter le spectacle de la misère des villes et des campagnes, avaient sous les yeux les témoignages des fastueuses dépenses de Louis XIV et de Louis XV et des recherches voluptueuses d’une nouvelle cour… ». Homme qui avait souffert de l’intolérance religieuse mais qui a foi en l’homme. Porté par ses convictions, il s’engage dans les débats préparatoires au vote de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. « Les droits de tous les Français sont les mêmes ; tous les Français sont égaux en droits…je demande …pour les protestants, pour tous les non-catholiques du royaume ce que vous demandez pour vous, la liberté, l’égalité des droits ». Il n’hésite pas à inclut dans son discours les juifs peuple « toujours errant, toujours proscrit, toujours persécuté…..auquel nous ne devons point reprocher sa morale parce qu’elle est le fruit de notre barbarie et de l’humiliation à laquelle nous l’avons injustement condamné ».
La différence d’opinion est simplement l’expression de la différence entre les hommes et non un crime. « Ce n’est pas la tolérance que je réclame, c’est la liberté de pensée ».
L’article 10 de la Déclaration des Droits de l’Homme consacre ses idées : »Nul ne peut être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ».
Rabaut-Saint-Etienne devient président de l’Assemblée Constituante en mars 1790, puis siège à la Convention avec les girondins. Il aurait dit : « L’instruction publique éclaire et exerce l’esprit, l’éducation nationale doit former le cœur ; la première doit donner des lumières, et la seconde des vertus… »
Après avoir participé à la création de la Constitution de 1791, il ne peut pas par la loi participer à l’assemblée législative. Il se tourne donc un temps vers l’écriture de son Précis de l’Histoire de la Révolution.
Toujours avide de justice et défenseur des droits de l’homme, il s’oppose aux excès du régime de la Terreur et des Montagnards. Il est guillotiné le 5 décembre 1793.
Ainsi finissent souvent les révolutions, dévorant les idéaux qui les ont fait naître !!

La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 est née de cette époque révolutionnaire, dans la douleur et avec le courage de certains qui ont montré le chemin et l’ont souvent payé de leur vie. Mais n’oublions pas que l’intolérance, le non-respect d’autrui sont toujours là, guettant leur heure pour resurgir, avec des fumerolles annonciatrices dont nous ne savons pas toujours tenir compte.



(archives de la Vendée Conseil départemental de la Vendée -Edit de Tolérance de 1787)



Sources : Thierry Verdier De l’Edit de Nantes à la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen –Région Languedoc-Roussillon1998---Elisabeth Labrousse Une foi, une loi, un roi ? La Révocation de l’Edit de Nantes Payot 1985 ---Didier Poton Patrick Cabanel Les Protestants français du 16è au 20ème siècle  Paris Nathan 1994---Jean b  aubérot Histoire du protestantisme  Paris PUF Que sais-je 1987--- Patrick Cabanel, « Rabaut-Saint-Etienne, du religieux au politique », Bulletin de la Société de l’Histoire du Protestantisme français -janvier/mars 2001, tome 147/1, p. 113-124.---André Dupont, Rabaut Saint-Étienne, 1743-1793 : un protestant défenseur de la liberté religieuse, Genève, Labor et Fides, 1989 [1946].-- GARRISSON Janine, Henri IV, Le Seuil, rééd. 2008, Paris, 1984--www.museeprotestant.org/notice/henri-iv-1553-1610/




samedi 8 juin 2019

Misogynie et la Racine de Holà



Misogynie et la racine de Holà:

Le grand Pythagore nous a laissé il y a 26 siècles une phrase sur les femmes bien peu courtoise : « Il y a un principe bon qui a créé l’ordre, la lumière, et l’homme ; il y a un principe mauvais qui a créé le chaos, les ténèbres et la femme » !! De toute évidence il n’était pas féministe !!
Définition de la misogynie d’après Wikipédia « La misogynie est un terme désignant un sentiment de mépris ou d'hostilité à l'égard des femmes motivé par leur sexe biologique. Dans certains cas, elle peut se manifester par des comportements violents de nature verbale, physique ou sexuelle, pouvant dans des cas extrêmes aller jusqu’au meurtre ». Tout est dit !
L'étrange universalité de la misogynie -Proudhon

L’Histoire est émaillée de petites phrases venant de la dite « sagesse populaire ». Dans notre pays, mais aussi dans bien d’autres, dans l’ancien temps, les hommes et les femmes avaient chacun ses activités propres : «les femmes à la maison, comme les chiens, les hommes à la rue (ou aux champs, ou atelier) comme les chats » ! (Gascogne). « Jamais femmes ni cochons ne doivent quitter la maison » (Anjou, Berry, Champagne, Bugey…). La femme règne en « maîtresse de maison », avec des activités réservées : le feu dans la cheminée, partagé avec le plus âgé des parents, les repas, le pain, le jardin, et le lait des animaux, fromages, beurre ; la basse-cour et la porcherie. Elle a le monopole de l’eau : le puits, le lavoir, la fontaine… Ceci est vrai pour toutes les classes sociales.
L’homme participe à la vie publique, le moulin, la foire ; la femme vend au marché ses volailles, ses œufs. Il est normal que lui bavarde avec ses collègues, au cabaret, sur la place, à la forge du village, au moulin… Mais une femme qui s’arrête de travailler un instant est mal vue, soupçonnée de mauvaise vie ou de mauvaises intentions. Elle ne sait pas « se tenir ». Le droit de vote féminin est une aventure récente dans bien des pays.
« Qui a mari, a seigneur ». »Le chapeau doit commander à la coiffe ». »Quand le coq a chanté, la poule doit se taire ». « A toute heure chien pisse et femme pleure ». En Ardèche la jeune mariée rentrant de la bénédiction de son mariage à l’église devait subir le test du balayage de la maison conjugale : son balai devenait son bâton de maréchal ! On imagine sa vie si elle ratait un tant soit peu ce test devant sa belle-famille !
Pendant longtemps, surtout à la campagne, les femmes ne mangeaient pas avec les hommes de la famille. Elles restaient debout derrière père, mari et fils, les servant comme dépositaires de l’autorité maritale. Mon père a connu cela lorsqu’il était en apprentissage chez un menuisier en 1920 dans le département de l’Isère. Chez les bourgeois ou la haute société, les femmes pouvaient s’asseoir avec les hommes à table dès l’instant où la famille était servie par du personnel. Jusqu’à peu en France, la femme sera considérée comme juridiquement mineure sous la tutelle de son père puis de son mari. Et pourtant lorsque les hommes font la guerre, ils sont bien contents de trouver des femmes pour les remplacer dans les usines, les champs, à l’étable.

L’Eglise n’était pas en reste. Dans le bâtiment pour les offices, chacun a sa place : les hommes d’un côté, les femmes de l’autre. Ou bien les uns au fond de l’église ou sur les tribunes lorsqu’il y en a, et les femmes assises devant ou en bas.
Le prêtre ne manque pas de rappeler régulièrement l’ordre des choses : Saint Paul dans sa premier épître aux Corinthiens « le Christ est le chef de tout homme et l’homme est le chef de la femme…l’homme n’a pas été créé pour la femme, mais la femme pour l’homme…. ». Saint Augustin en rajoute « Homme tu es le maître et la femme est ton esclave, c’est Dieu qui l’a voulu… vos femmes sont vos servantes…. ». La femme est par définition la tentatrice, l’instrument du Malin. Les villageois accepteront quelques coups de canif à l’ordre établi : un homme pourra bêcher le potager à la place de sa femme, celle-ci pourra l’aider pendant les gros travaux aux champs l’été. Mais voir un homme aider son épouse en tirant un seau d’eau du puits ou épluchant des légumes pour la soupe ou pour le repas du cochon et tout le village le montrera du doigt, soupçonnant un comportement contre nature !.Toute transgression sera sanctionnée d’une manière ou d’une autre sauf pendant les jours de tolérance comme carnaval ou la fête des Fous, où là tout est permis. Mais là aussi la femme est caricaturée, moquée.

« Mauvais cheval veut l’éperon, mauvaise femme veut le bâton ».  L’épouse qui ne connait pas son devoir, est en péché mortel et donc le mari est en droit de la corriger. Certaines coutumes prévoient même d’aller « jusqu’à effusion de sang » pourvu que ce soit de bonne intention. L’Eglise catholique approuve puisque la femme est par définition tentée par le Malin, donc forcément fautive. Les églises protestantes ne sont pas plus mesurées : « battre sa femme, c’est battre un sac de farine ; tout le bon s’en va, et le mauvais reste » !! Mais dans les conflits conjugaux,  le mari doit toujours gagner pour que l’ordre établi ne soit pas compromis. L’honneur paroissial passe avant l’honneur familial.
Au 17ème siècle dans notre pays, des gravures, des plaisanteries, des pamphlets,  courent dans le royaume de Louis XIV. Le docteur Tricotin a fait la découverte de la racine de Holà qui guérit les femmes querelleuses, orgueilleuses, menteuses, joueuses, babillardes, mutines !!…. La racine de Holà est un bâton dont on peut se servir pour soumettre les épouses. A cette époque, les femmes de la bourgeoisie et de la haute société veulent lire, philosopher, critiquer, refaire le monde comme les hommes. Molière s’en est amusé avec ses Précieuses Ridicules de 1659 et ses Femmes Savantes de 1672.





Cette gravure parue dans les almanachs, ces ouvrages très lus et diffusés, est riche d’enseignement. Nous voyons Tricotin sur une estrade de marché avec ses serviteurs les bras chargés des fameux bâtons en racine de Holà. Les acheteurs se hissent, l’argent à la main. L’un d’eux s’écrit même : »donne m’en une bonne car ma femme est un diable ». Au-dessus de Tricotin, une pub : « Si vos femmes sont libertines, acariastres et mutines, je m’offre à vous guérir de si cruels tourments, maris, usez de mes racines : vous verrez si je mens ». Pour ceux qui n’auraient pas compris ou qui ne savent pas lire, des médaillons avec des mises en situation.
Que reste-t-il à la femme pour se sortir de cette situation ? Le divorce sera admis pendant la Révolution et le code civil de Napoléon de 1803, puis supprimé, puis rétablit en partie en 1884… Parfois les tribunaux autorisaient une séparation de corps temporaire et provisoire jusqu’à ce que « l’Esprit Saint intervienne et réconcilie les époux ». Dans ce cas les mauvais traitements, l’adultère, menaces de mort sont pris en considération. Mais les archives nous montrent que ces cas ne concernent pas les milieux modestes. Les mauvais traitements peuvent donner lieu à séparation entre personnes de qualité, mais sont « insuffisants  pour séparer des époux de la lie du peuple ».
En fait, le mariage, la vie d’un couple sont des institutions qui interpellent toute la communauté et donc doivent être codifiés, protégés, gérés par la population. Dans notre région, un adage disait : « mariage de jeune homme et de jeune fille, il est de bien ; mariage de jeune homme et de vieille, il est de rien ; mariage de vieil homme et de jeune fille, il est du diable. »

L’adultère, dérangeant l’ordre établi et source de conflit entre familles élargies, a été puni souvent dans les villages par des farces, des charivaris. Dans le Lot, les coupables devaient courir tout nus dans les rues, la femme marchant la première et tenant le bout d’une corde attachée aux testicules de son complice. Dans la Drôme, le Lyonnais, la femme adultère et très dévêtue, devait courir derrière une poule jusqu’à l’attraper tandis que son amant nu devait ramasser du foin pour en faire une botte. Dans notre Languedoc, tous deux très légèrement vêtus, parcouraient les rues, mais seul l’homme était fouetté par les femmes qui se tenaient sur le parcours. L’amant plus coupable que la femme ?
Nous devons noter que dans pratiquement toutes les civilisations, la gente féminine est jugée inférieure à l’homme. Et les raisons avancées sont religieuses, ou quasi-religieuses, pourtant avec des religions très différentes. Un sociologue américain W Goldmann du milieu du 20ème siècle pensait que les hommes dans leur ensemble étaient désarçonnés, jaloux, inquiets, envieux, secrètement dépités par le fait que nous les femmes nous enfantions. Si ce n’est que cela, nous pouvons partager et leur laisser l’accouchement !! La route est encore longue, bien quand cinquante ans, nous avons vu une certaine amélioration de la condition féminine. Au moins, maintenant, on sait, on se pose des questions, on ose dire. Mais nous devons nous méfier des plaisanteries graveleuses qui sont de la misogynie que nos mâles s’autorisent et qui est tout aussi grave que les coups, et qui s’insinue sournoisement dans les cerveaux. Actuellement dans notre pays environ 20 % des meurtres concernent des femmes tuées par leurs conjoints ou ex-conjoints.

D’autres petites phrases qui se veulent plaisantes :

-          En octobre 2017, un adjoint au maire de Montauban : « en chaque femme il y a quelque chose de bien, mais je dois l’introduire moi-même » /www.humanite.fr/misogyne-non-vous-croyez-64382 (Olivier Morin)
-         Sacha Guitry : « Les honnêtes femmes sont inconsolables des fautes qu’elles n’ont pas commises…. A l’égard de celui qui vous prend votre femme, il n’est de pire vengeance que de la lui laisser…. Abstenez-vous de raconter à votre femme les infamies que vous ont faites celles qui l’ont précédée ; ce n’est pas la peine de lui donner des idées …»
-         Shakespeare : « Fermez la porte sur l’esprit de la femme, il s’échappera par la fenêtre ; fermez la fenêtre, et il s’échappera par le trou de la serrure ; bouchez la serrure, il s’envolera par la cheminée… La laideur est moins horrible chez un démon que chez une femme…»
-         Lope de Vega : « Le caractère de la femme sans exception se meut sur deux pôles : l’amour et la vengeance… Tenir une femme par sa parole, c’est tenir une anguille par la queue.. »
-          F Nietzsche : « la femme est une surface qui mime la profondeur.. »
-         Proverbe arabe : « la beauté de l’homme consiste dans son esprit, et l’esprit de la femme consiste dans sa beauté.. »
-         François 1er : « souvent femme varie, bien fol qui s’y fie.. »
-         Alphonse Karr : « Les femmes devinent tout ; elles ne se trompent que quand elles réfléchissent… »
Nous allons laisser de côté « le roseau dépensant » tant de fois entendu.

D’autres adages plus sympathiques :
- Coluche 1986 : « Les femmes seront les égales des hommes le jour où elles accepteront d’être chauves et de trouver ça distingué.. »
- Victor Hugo : «  La femme a une puissance singulière qui se compose de la réalité de la force et de l’apparence de la faiblesse… »
- Stendhal : « L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la civilisation et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain.. ».
Et un coup de sabot de l’âne : « Quoi qu’elle fasse, la femme doit le faire deux fois mieux que l’homme pour qu’on en pense autant de bien. Heureusement, ce n’est pas difficile.. » Charlotte Whitton




 Sources : Jean-Louis Beaucarnot  Ainsi vivaient nos ancêtres  édit Robert Laffont 1989---/savoirsdhistoire.wordpress.com/2016/05/28/la-racine-de-hola-petite-histoire-de-la-violence-conjugale-au-xviie-siecle/
---Gallica BNF--P Dupré Encyclopédie des Citations édit Trévise 1959---