samedi 24 décembre 2022

 A la perfection …



Autrefois dans les temps de carnaval, périodes propices aux rapprochements amoureux, on racontait aux jeunes gens et aux jeunes filles de Saint-Hippolyte de Montaigu l’histoire d’Anselme, un brave garçon robuste, raisonnement travailleur et raisonnablement sobre. Sa mère ne comprenait pas pourquoi, avec toutes ces qualités, il était encore célibataire, la trentaine passée.

« Malheureux, qui te repassera tes chemises quand je ne serai plus là ! Qui te fera cuire la soupe quand tu seras trop vieux pour te lever de ton fauteuil ? Marie-toi tant que tu as assez de cheveux sur la tête !! »

Chaque matin en servant le café, elle repartait à l’assaut en lui vantant les charmes et les avantages des filles du village :

-         «si tu prenais la Josette, elle est plutôt pas mal et très sérieuse d’après ce que l’on m’a dit ?

-         - les gens parlent trop ! Comme Josette d’ailleurs qui est bavarde à vous donner la migraine du matin au soir. Je serai sans arrêt chez le pharmacien !!

-         Et bien la Berte ? Elle pour sûr sait tenir sa langue

-         -C’est le moins que l’on puisse dire ! Quand elle prononce deux phrases dans la journée, on se demande si elle est malade. Avec une femme pareille, je serais tout de suite neurasthénique.

-         Ne dis pas de bêtises, malheureux ! Et la Paule, quand penses-tu ?

-         Elle a au moins une tête de plus que moi ! J’aurais l’air de quoi si elle se promenait à mon bras !

-         Tu n’auras pas ce problème avec Gertrude…

-         C’est certain, même avec des talons, elle ne m’arrive pas à la ceinture !

-         Et la petite de l’épicier, Célestine ?

-         Sa famille est trop riche pour nous. De plus elle est fille unique et a un de ces caractères !! Très peu pour moi !

-         Alors Clarisse la fille du puisatier ?

-         Elle est gentille, mais ses parents n’ont pas un sou vaillant. Et elle a toute une flopée de frères et sœurs qui attendent qu’elle trouve un mari pour ramener un peu d’argent à la maison.

-         Il reste Marcelle ; un beau sourire et elle aura un bel héritage.

-         Plusieurs galants lui tournent autour déjà et cela ne l’effarouche guère….

Toutes les demoiselles de Saint Hippolyte et du canton avaient quelque chose qui clochait pour Anselme. Un jour sa mère excédée lui dit : « mais enfin que veux-tu à la fin ? Tu crois que tu soirs de la cuisse de Jupiter ? C’est la lune qu’il te faut ? « 

-         Non mère, ce que je veux c’est une femme réelle qui existe en chair et en os, mais une femme parfaite, absolument parfaite..

-         Une femme pareille n’existe pas, la perfection ne se trouve pas sur cette terre et c’est tant mieux !!

-         Moi je la trouverai déclara le jeune homme ; je la ramènerai ici et je l’épouserai.

-         Pauvre innocent, je ne suis pas près d’être grand-mère !! »

Et Anselme partit à la poursuite de son rêve. Il parcourut le monde pendant trois longues années, sans envoyer une lettre à sa mère.

Très inquiète, elle se rongeait les sangs jusqu’au jour où elle le vit arriver, barbu, triste et seul !!

-         Tu vois, persifla la mère, tu ne l’as pas trouvé ta perle rare ! Je le savais !!

-         Détrompe toi mère, soupira Anselme les yeux dans le vague. Après avoir marché pendant des jours et des jours pour traverser un nombre faramineux de pays dont le nom parfois m’était inconnu, après avoir visité une multitude de vallées, de villes et après avoir rencontré des milliers de femmes toutes merveilleusement différentes, j’ai enfin trouvé celle que je voulais, celle que j’espérais. D’après moi elle était en tout point parfaite !

-         Mais alors, grand Carnaval, pourquoi ne me l’as-tu pas ramenée ?

-         Malheureusement dit Anselme avec un soupir à renverser la table, elle n’avait qu’un défaut : elle voulait se marier avec un homme parfait !! »



Sources ; photo A la découverte des mariages d'autrefois – ci-dessus chapelle de La Capelle-Masmolène--RTN votre radio régionale – Merci à Esther pour ce joli co

mercredi 14 décembre 2022

Un Indien dans la ville

 



Un Indien dans la ville

Le 14 avril et 2 mai 1909, D’Jelmako traverse les arènes de Nîmes sur un fil tendu à plus de trente mètres de hauteur.

De son vrai nom Etienne Blanc, D’Jelmako, « Le tonnerre qui gronde » en langue sioux, est né à Marseille en 1857. Il sera enterré à Montpellier au cimetière St Lazare en 1933 après une carrière bien remplie.

Cette fin de 19ème siècle est à la mode indienne. Nous avons une fascination pour le Nouveau Monde.  On est persuadé que les Indiens d’Amérique ne connaissent pas le vertige. Le grand Buffalo Bill promène son spectacle dans toute l’Europe avec Indiens, chevaux, bisons… avec un passage à Nîmes. Etienne va construire son personnage sur cette vague. D’autant plus, qu’il a des origines canadiennes sinon indiennes. Son père Louis Etienne Blanc en 1846 émigre au Canada. Il est régisseur dans une grande coupe de bois au contact des trappeurs et il va épouser la fille de l’un d’eux Sophie Laurent, une belle brune. En 1856 la famille revient en France et s’installe dans une ferme d’élevage La Grande Bastide, dans la banlieue de Marseille à Sainte Marguerite. Etienne Marie Joseph nait le 25 décembre 1857.

Portrait de Djelmako (indien d'Amérique), funambule, ayant traversé la rivière de la Drôme sur un fil, le 29 septembre 1901, lors de la fête de la Saint Ferréol, à Crest.

Référence du document : 17MDSERRO3
Date : 1900

 «  L’enfant aurait été baptisé au cours d’une cérémonie syncrétique respectueuse des usages en vigueur chez les Sioux, selon la légende familiale. Qui ne paraît pas être conforme à la réalité car les Sioux, qui formaient la nation de langue lakota, n’ont jamais occupé le Canada mais plutôt des territoires correspondant aux États actuels du Nord et Sud Dakota, et des portions des États du Minnesota, de l’Iowa, du Wisconsin à l’est, du Wyoming à l’ouest et du Nebraska au sud. Assez loin des tribus indiennes du Canada qui étaient plutôt constituées par les peuples algonquins, micmacs, abénaquis, cris, hurons et autres mohawks. » s’interrogent ses biographes. (René Samson « Les Biographies Célébres »1929—Henri Louis Escuret 1962).

Ascendances indiennes affirmées, nostalgie du père…. Certains lui prêtent des grands-parents maternels sioux. En tout cas, ce prénom D’Jelmako, réellement de baptême  ou inventé par la suite devint un élément non négligeable pour sa carrière d’artiste. Et puis un artiste est là pour faire rêver !!

On dit que c’est sur la corde à linge de sa mère qu’il commence son apprentissage de funambule. Il promène sa sœur sur son dos. Puis son oncle lui installe un câble de chanvre à huit mètres de hauteur. Petit à petit il apprend et excelle. A cette époque, le funambulisme est à la mode mais plus l’artiste est haut et plus la traversée est longue et plus le succès, le respect était là. Il fallait des traversées grandioses, spectaculaires, les chutes du Niagara avec Charles Bondin le père du funambulisme (1824-1897), des exhibitions qui coupent le souffle.


Il devient de plus en plus habile, courir, marcher en arrière, en avant, se coucher sur la corde, tirer, les yeux bandés…. A 19 ans il perd sa mère, son père et son oncle. Il est en charge de sa petite sœur. Il est engagé par le directeur du théâtre de Rivesaltes. En 1880 il fait une tournée avec la troupe du Palais Royal. Il y rencontre son épouse, Paulia, l’amour de toute sa vie. Il signe un premier contrat avec le Casino de Toulouse, un show à Carcassonne…. Une tournée à Lisbonne, à Barcelone. Il est célèbre.

La presse le surnomme « le métis canadien », « l’indien au visage pâle », « Le Blondin moderne »… Le Petit Courrier de Biarritz s’enthousiasme dans son édito du 6 septembre 1889 : » c’est le plus fort des funambules que nous ayions vu à ce jour… ». Il faut dire que la traversée du Vieux Port de Biarritz se fait à 37 mètres de hauteur sur une longueur de 167 mètres. La traversée de la rade de Villefranche-sur-Mer est encore plus exceptionnelle : un fil tendu entre deux montagnes à 95 mètres de hauteur, un silence absolu des spectateurs, les voitures arrêtées, tous les yeux braqués sur lui !!

Et sa traversée des cascades de Terni en Italie à 115 mètres de haut… Et à Bruxelles, la traversée du parc Léopold où D’Jelmako toujours sur son fil s’amuse à tirer sur des ballons rouges qu’on lâche devant lui…

Jongler avec des couteaux, abattre des ballons avec un fusil, marcher avec un charmeur de serpent accroché à son dos…tout en marchant sur son fil de chanvre ou d’acier…

Mais à Nîmes il va innover. Il va y présenter le 15 avril pour la première fois sa « torpille aérienne ». Il va construire un petit appareil sur le modèle des engins automoteurs prévus pour la guerre, en forme de cigares sur lesquels glissent l’air et l’eau. Deux roues, l’une mobile, l’autre libre, qu’il équipe d’un moteur à pétrole assez puissant pour lui permettre d’avancer sur un fil qui ploie un peu et remonte vers la passerelle. C’est très risqué puisqu’en cas de déséquilibre, il ne peut pas saisir le câble qu’il ne voit pas lorsqu’il est à califourchon sur sa torpille.

Le journaliste de l’Eclair raconte : « l’appareil placé sur le câble, D’Jelmako l’a enfourché, les deux jambes dans le vide et s’est élancé accompagné des pétarades de son bizarre appareil…L’émotion était générale et l’anxiété à son comble quand le petit véhicule gravissait lentement la corde qui pliait…La traversée a duré exactement une minute 12 seconde, un siècle pour nous les spectateurs de cet acte téméraire…. ». Il renouvèlera l’exploit le 2 mai, puis dans toute l’Europe toujours costumé en Sioux, jusqu’à la Première Guerre Mondiale.


A la déclaration de la guerre en août 1914 il a 57 ans, trop vieux pour s’engager comme soldat. Mais il va faire sa part en conduisant des camions de ravitaillement des troupes. Après la guerre il reprend la route et les shows. A 65 ans il est à Montpellier où il donne une représentation sur la promenade du Peyrou. Mais quelques jours plus tard dans les arènes de Bézier, alors qu’il allume un feu d’artifice du haut de son fil, le dispositif s’embrase et il est grièvement brûlé. Il finit sa traversée, et il est transporté à l’hôpital de Montpellier. Pendant un an, il doit arrêter les représentations, mais en 1922 on le revoit à Marseille où il est engagé pour des représentations à l’Exposition coloniale.

Paulia son épouse décède de maladie en 1924. D’Jelmako est désespéré. Il lui survit jusqu’en 1933. Il est en représentation près de Tarbes à Riscles. Louis-Henri Escuret de la Société française d’Histoire de médecine raconte « Au moment de son passage sur le câble aérien avec sa torpille, il perd l’équilibre, son appareil s’étant trop ralenti. Il tomba d’une hauteur de neuf mètres sur la piste des arènes….Fracture de la base du crâne, grave lésion à la colonne vertébrale. La torpille de 85 kilos s’était abattue sur son corps ». Il s’éteint le 1er août dans son appartement de Montpellier veillé par sa petite sœur.


Il avait passé une bonne partie de sa vie sur un fil, dès l’âge de 7 ans jusqu’à près de 77 ans…..

(Le Petit Méridional du 1er août 1933)

 



(Marseille ? 1890)

Sources et pour en savoir plus : D’Jelmako, le funambule indien (lagglorieuse.info)Musée Carnavalet, Histoire de Paris--www.parismuseescollections.paris.fr/fr/musee-carnavalet/...—Adrian L’Encyclopédie du cirque –Le Sens de l’équilibre 1993 BNF--- René Samson Les Biographies Célèbres 1929—la gazette de Nîmes n)1052-1053 août 2019—wikipédia .org--- Les Arènes de Nîmes, 1909BnF, département des Arts du spectacle, 4-COL-180 (151)© Bibliothèque nationale de France---: Louis-H. Escuret, D’Jelmako, le célèbre funambule (1857-1933), Montpellier, chez l’auteur, 1962.---

 


dimanche 4 décembre 2022

Le tombeau du Sanglier

 

Le tombeau du Sanglier

En Camargue, les taureaux de légende ont leur statue. Des marques de reconnaissance pour des « bious » d’exception qui ont procuré des émotions fortes aux amateurs de courses camarguaises et qui ont marqué les mémoires. Rappelons ici que la course à la cocarde ou camarguaise n’est pas la corrida, loin de là. Dans cet exercice, ce sont les hommes qui prennent les coups.

Sur le rondpoint du Cailar trône Le Sanglier. « Ici est enterré Le Sanglier de la manade F. Granon-Combet 1916-1933 ». En fait, la stèle a été déplacée et il n’est pas enterré là. Il était le fils du grand Belcita, cocardier d’avant-guerre.

Un certain flou (ou de merveilleux) quant à sa naissance. Nous sommes en pleine guerre de 14-18, au cœur du Bois des Rièges, derrière le château d’Avignon, dans une Camargue sauvage, dans une atmosphère de brouillard, de légende, de mysticité. Sa mère Caillette met bas à côté d’une laie qui vient de mettre au monde ses petits. Caillette meurt et c’est le facteur Claudius (ou le gardian Chabalet) qui les découvre, d’où le nom de Sanglier. La laie aurait nourrir le taurillon. Le Sanglier est un veau solitaire, courageux, espiègle. Curieux il arpente les quatre coins du bois.

Il effectue sa première course dans le plan d’Aigues-Vives à l’âge de trois ans. Lansagues, Lunel …. Il construit sa légende. Cocardier complexe, barricardier, explosif, audacieux, malin… Il ne pardonnait pas la moindre erreur. Il enthousiasmait les foules.

Autre taureau Muscadet (manade Rouquette)dans ses coups de barrière à Maugio et à Nîmes

Prompte comme la foudre dans les arènes, Le Sanglier était le premier à avoir effectué les « coups de barrière ». Il poursuivit les raseteurs Julien Rey et Benoît, Margaillan jusqu’aux planches, passa ses cornes derrière pour les attraper ou les taper d’un redoutable coup de tête. Il va tuer de deux coups de cornes en 1925 Pierre Vite le portier des arènes d’Aramon. On dit aussi qu’il est responsable du « coup de sang » fatal arrivé au peintre en bâtiment Coulet, quelques temps après avoir été sévèrement secoué à Lansargues par un Sanglier jeune qui pourtant n’avait pas encore fait ses preuves…  Ses cornes d’or faisaient la fortune des parieurs, de son raseteur préféré le beaucairois Julien Rey. On se pressait à toutes ses courses. Les primes que l’on mettait à chaque course sur ses cornes approchaient les 1000 euros actuels. (Les primes : argent gagné par le raseteur qui enlève qui un ruban, qui la cocarde…en plus de l’engagement pour raseter). En 1927 Julien Rey touchera 8000francs pour raseter Sanglier à Lunel. 16 fois son salaire de charretier. Son nom s’inscrivait en grand sur les affiches, « Rey et Cie ». Mais cette fortune trop vite gagnée, Rey flambera tout et finira employé municipal.

Ce sera pour Sanglier qu’on jouera l’air du toréador de Carmen de Bizet. Un jour de retour d’une de ses courses, le train de Nîmes-Le Grau du Roi cala, trop lourdement  chargé d’admirateurs. La locomotive n’arrivera pas à passer la côte de Générac.

Le Sanglier et le taureau du Trocadéro - midilibre.fr

Hemingway, le grand écrivain, en parle admiratif. Il assiste à une course où la cocarde entre les cornes du « Sanglé » rapporte 3000 francs à celui qui l’enlève.

Des primes de 500 à 1000 francs étaient gagnées pour seulement toucher sa tête et déclencher l’ovation du public.

Entre 1925 et 1929, ses cornes rapportèrent pas moins de 120 000 francs de primes à ceux qui lui enlevait sa cocarde..

Il est l’orgueil de la Camargue, le héros, un guerrier…..peut-être la revanche pour certains après l’accusation injuste de désertion de 1917 contre les bataillons venus du Midi.

Mais la gloire a aussi ses revers même pour les taureaux talentueux. En 1927 dans les arènes d’Arles, les provençaux jaloux et pensant sa réputation usurpée vont lui tendre un piège. Trente raseteurs entrent en piste, enragés comme une meute de chiens, ils vont tenter de lui prendre sa cocarde. Les portiers refusent de lui ouvrir les portes pour qu’il sorte de l’arène. Pendant 25 minutes Le Sanglier reste en piste et il rentre enfin avec sa cocarde entre les cornes. Echec et mat pour les provençaux. Plus jamais, son manadier acceptera de conduire un seul taureau à Arles.

Le Sanglier fera ses adieux le 31 août 1930 à Nîmes devant plus de 12 000 personnes. Pour son biographe le taureau sera encore dans les arènes d’Aigues-Vives pour une dernière course le samedi 3 octobre 1931.

Mais avant de prendre définitivement une retraite bien gagnée, le Sanglier fit encore quelques sorties en 1930 et c’est ainsi qu’il parut en présentation dans les arènes d’Aramon, le 15 juin ; du Cailar, le 3 août ; de Châteaurenard, le 4 août ; de Nîmes, le 31 août et de Saint-Gilles, le 28 septembre. Enfin, sa dernière présentation eut lieu le 7 juin 1931 dans la piste de Lunel où seuls Julien Rey et Charles Garonne eurent l’honneur de lui faire les deux derniers rasets.


(ci-contre Saumade) 

Il prit une retraite méritée dans les pâturages du Cailar. Monsieur Bouzanquet, une personnalité de Nimes souhaitera faire naturaliser (empailler) Le Sanglier pour l’installer au musée de la Ville. Granon refusa car il voulait que son taureau meure sur ses terres où il serait enseveli et où il était né.

Mais un jour Le Sanglier décida de quitter les près, suivit le Vistre, traversé le Cailar de nuit et vint se coucher devant la maison de son maître Fernand Granon. Dès lors il finira ses jours dans la cour de Granon, visité régulièrement par ses admirateurs. Son patron venait le visiter chaque soir sauf le soir du 22 octobre 1933. Le lendemain Sanglier gisait mort les deux cornes plantées dans un tas de fumier, ultime « coup de barrière ». Il sera enterré dans des draps neufs.

D’autres taureaux de légendes auront leurs statues : Clairon,Goya, Gandar, Muscadet, Pascalet….. Nous nous intéresserons à leurs histoires dans quelques temps….


 Autre taureau de légende Pascalet, la Bombe noire, et le raseteur Jacky Siméon, fin des années 1970

 

 

 

 

Sources et pour en savoir plus : La légende du SANGLIER de Fernand Granon. - TORILTV LE BLOG—Gazette de l’été juillet 2006 Jacques  Durand Alain Laborieux—photos André Hampartzoumian--

Le Sanglier (taureau de Camargue) - Data BnF

https://data.bnf.fr › le_sanglier__taureau_de_camargue_---

 

jeudi 24 novembre 2022

Accident ferroviaire en Maurienne 1917

 


La Plus Grande Catastrophe Ferroviaire en France

 

Nous sommes en pleine guerre de 14-18. Un déraillement de train va faire 435 victimes  (425 sur le lieu de l'accident, 8 des suites de leurs blessures et 2 cheminots). Cette catastrophe ferroviaire reste encore aujourd’hui la cinquième de l’histoire et la plus grande arrivée en France.


Le Petit Journal, 14 décembre 1917

Peu de journaux en parlèrent. L’actualité de la guerre, le moral des troupes et de leurs familles éclipsèrent bien vite cet événement. La censure, la justice militaire saisie au lieu de la justice civile, les archives militaires et celle de la compagnie ferroviaire ont couvert l’accident d’une chape de plomb. Ce qui a entrainé un doute dans l’opinion sur la véracité du bilan : l’imaginaire collectif, les familles des morts ou des blessés vont faire allusion à 600, voire 1200 morts.

Jusqu’en 1972, le drame sera évoqué parfois, mais vite oublié étant donné le manque d’archives.

Le magazine Historia lui consacre un article en 1972, bien qu’incomplet, mais ce sera le début d’une enquête, d’un travail de recherches : Rail Passion en 1996,  mais surtout à partir de 2007 avec l’ouverture des archives et à la demande d’un habitant de Saint-Michel de Maurienne, André Pallatier. On doit à ce chercheur  un livre « La Tragique Destin d’un Train de Permissionnaires » (édi l’Harmattan 2013). On se rend compte que les circonstances du drame sont indissociables du contexte de la guerre.

Nous sommes dans la nuit du 12 au 13 décembre 1917, dans les Alpes. Le train est rempli d’un millier de soldats qui viennent de combattre en Italie et qui se rendent en France pour rejoindre leurs familles et y goûter une permission bien méritée, fêter Noël. Certains ont juste 19 ans ; ils dorment dans des wagons bondés, fatigués par cette guerre sans fin.

Ils ont embarqué à Bassano del Grappa, entre Trévise et Vicence, 17 voitures toutes en bois. Quinze voitures sont à bogies, les deux autres voitures ainsi que les deux fourgons sont à essieux..

Le train arrive à Turin dans l’après-midi du 12, prend la direction du tunnel du Fréjus via la vallée de Suse. Le train est d’abord séparé en deux parties, compte tenu de son tonnage (525 tonnes à vide), à sa longueur (350m) et à sa composition.

Il ne pouvait pas gravir les rampes qui mènent au tunnel de Fréjus. Puis il est reconstitué en une seule partie à Modane, direction Chambéry à 22h47. Le train entame une longue descente vers la vallée, mais le dénivelé de 22% à 30% est trop important, le train prend de la vitesse, jusqu’à 150 km/h, devient incontrôlable. Dans la forte pente, les freins ont chauffé à blanc. L'unique locomotive n'est plus assez puissante pour retenir son chargement de plusieurs centaines de tonnes. Et le train déraille dans un tournant au lieu-dit La Saussaz à une centaine de mètres du pont ferroviaire qui enjambe la rivière l’Arc, juste avant d’arriver en gare de Saint-Michel-de-Maurienne. Le mécanicien Louis Girard avait pourtant prévenu du danger d’accident lié à l’absence de freins automatiques et d’une motrice de queue. En vain….

En fait au départ du train, le système de freinage automatique ne reste activé que sur le fourgon de tête et sur les deux premières voitures. Sur les autres voitures, sept garde-freins sont répartis pour assurer un freinage manuel. Ce  système était utilisé par la compagnie PLM pour les trains de marchandises et les trains militaires.

Les wagons s’encastrent contre un mur de soutènement et contre le pilier du pont routier. Les hommes qui ne sont pas tués sur le coup sont brûlés vifs dans l’incendie qui s’est déclaré…

En mars 1919, le tribunal de première instance de Saint-Jean-de-Maurienne se prononce  officiellement sur un bilan à 425 morts. Il ne concerne que les militaires morts sur le lieu de l'accident. C'est ce bilan qui est le plus souvent repris sur les monuments commémoratifs. Les blessés morts des suites de l’accident et ceux qui vont trainer des années des blessures sont oubliés… Après enquête en particulier de généalogistes, le chiffre le plus réaliste approchera plutôt les 700 victimes. Les rescapés, les habitants de St Michel et de la vallée qui ont aidé à sortir les blessés, qui ont vu mourir ces jeunes hommes ne s’en sont jamais vraiment remis. « ça m’a travaillé des années » raconte un rescapé.

 

Cette tragédie sera commémorée en décembre 2017 dans sept communes : Modane, Fourneaux, Le Freney, Saint-André, Orelle, Saint-Jean et Saint-Michel-de-Maurienne proposeront des conférences, des expositions, des concerts et d’autres animations pendant une quinzaine de jours.

Stèle commémorative de St Michel de Maurienne

Des accidents ferroviaires seront nombreux au début du 20ème siècle, mais pas de cette ampleur. Nous devons nous féliciter  des avancées en matière de sécurité dans le transport par train. Mais dans le cas présent, un peu d’empathie de la part des autorités n’aurait pas été de trop. Les survivants vont mettre des années pour accepter….

Origines des victimes sur le territoire français.--

Sources et pur en savoir plus : , André Pallatier. « La Tragique Destin d’un Train de Permissionnaires » (édi l’Harmattan 2013)---www.lamaurienne.fr/territoire-de-saint-michel-de-maurienne/2017/11/09/centenaire-de-la-catastrophe-ferroviaire-de-1917-neuf-conferences-et-de-nombreuses-animations#:~:text=Le%2012%20décembre%20-- Par Monique Thomasset Le 09/11/2017 à 05:00 - actualisé le 28/12/2017 à 09:48   /france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/savoie/il...-- /fr.wikipedia.org/wiki/Accident_ferroviaire_de_Saint-Miche…--memoiresdescatastrophes.org/catastrophe/catastrophe...-- www.bing.com/search?q=catastrophes+ferroviaires+en+france&FORM=QSRE1wikiplm.railsdautrefois.fr/wikiPLM/index.php?title=12_décembre_1917...---

 

lundi 14 novembre 2022

L'or des cuistots, le Safran

L’or des cuistots, le safran

 

Les papyrus égyptiens, la Bible nous racontent en lettres d’or et de sang, le Safran. Probablement une des premières plantes que l’homme cultiva. En Crête à Cnossos une fresque de 1600 avant notre ère en retrace la cueillette. On utilisait les stigmates rouge-orangé du Crocus Sativus en onguents, colorants, cosmétiques et médicaments. Le safran est présent dans l’Histoire des hommes depuis au moins 5 000 ans. L’empereur chinois Chen Nong le mentionne pour ses propriétés médicinales dans son recueil, Shennong bencao jing, daté de 2700 av. J.-C. Il fait partie des quelque 500 substances citées par le papyrus Ebers, un ensemble de papyrus médicaux égyptiens rédigés vers 1550 av. J.-C. Il est répertorié dans une référence botanique assyrienne du viie siècle av.J.-C.,rédigée sous AssurbanipalPline l’Ancien cite nombre de ses propriétés thérapeutiques. Il a été utilisé dans le traitement d'environ 90 maladies.

Nous ne le cuisinerons vraiment qu’à partir du 11ème siècle.

Il serait le résultat d’une sélection intensive de crocus cartwrightianus, un crocus à floraison automnale originaire de l’Est méditerranéen. Nous le retrouvons dans pratiquement toutes les langues européennes et du moyen-orient : açafräo en portugais, zaferano en italien, azafran en espagnol, et en latin médiéval safranum. En arabe zafaran peut-être de l’iranien zar-paran ou plumes dorées.

Le safran est une précieuse monnaie d’échange depuis l’Antiquité, qui se vend comme l’or le plus pur, au gramme. Les contrefaçons sont si tentantes qu’au Moyen Age les falsificateurs sont brûlés sur la place publique.

Sa culture est délicate. Après une période de repos en été, cinq à onze feuilles vertes verticales montrent leurs nez, pouvant atteindre 40 cm de long. Des bourgeons pourpres apparaissent en automne, et les fleurs colorées éclosent, d’un léger lilas pastel à un mauve foncé et strié. Dans chaque fleur un style à trois fourches, chacune se terminant par un stigmate cramoisi de 25 à 30 mm de long.

A ne pas confondre avec le colchique d’automne, violet aussi mais très toxique.

Pour obtenir un kilo de filaments, il faut autour de 160 000 fleurs. Il se récolte à la main entre septembre et novembre sur le pourtour méditerranéen. Dès que la fleur s’ouvre, le cueilleur attend que le soleil sèche sa rosée, puis coupe la base d’un coup d’ongle. On la transporte délicatement dans une pièce tempérée. Et là on retire les trois stigmates qui vont sécher. On les stocke dans des boîtes hermétiques.

Les Phocéens l’implantèrent dans les environs de Marseille, en Provence à Orange, dans le Comtat Venaissin à Sisteron… Ces régions le cultivent jusqu’au 17ème siècle. Mais le coût de la main d’œuvre, les exigences climatiques de cette culture eurent raison des cultivateurs. L’Espagne sauve la mise encore au 20ème siècle, mais avec une production en chute libre, de 120 tonnes à environ 3 tonnes maintenant. Celui de la Mancha serait l’un des meilleurs. Le plus gros producteur actuel est le Cachemire.

Cultivé dans les Ardennes, il faut entre 180 et 200 fleurs de safran pour un gramme, et donc 180 000 à 200 000 fleurs de safran pour un kilo,

Un bon cueilleur peut récolter 1000 fleurs à l’heure et en émonder 400.

 Des safranières artisanales françaises refont surface aujourd’hui en privilégiant la qualité face à la poudre de safran de mauvaise qualité. A visionner les safranières de Fontanières dans le département de la Creuse.

Stimulant, digestif, analgésique, aphrodisiaque, aussi prescrit en homéopathie pour les troubles circulatoires, riche en fer, en magnésium, en vitamine B6… Il faut bien le choisir : le stigmate doit être entier, 2,5 à3 cm de long, d’un rouge foncé.

L’acheteur doit se méfier : aux stigmates le vendeur indélicat ajoute parfois du curcuma, des pétales de la fleur. Il est préférable de l’acheter par petites quantités, le mettre à l’abri de l’air, de la lumière et de l’humidité.

Pour lui rendre toute sa saveur, il est conseillé de réhydrater les filaments dans de l’eau ou du lait pendant au moins 2 h. Paella, bouillabaisse, mais aussi riz, poisson, légumes, desserts lactés… On se régale aussi avec les yeux !!

Sources et pour en savoir plus : Marie-Amal Bizalion Pays de Provence Terroirs patrimoine n)15 2003—wiipédia.org  Texte sous licence CC-BY-SA-- bing.com/images-- www.onatera.com/safran--- /www.lesafran.fr/le-safran/installation-et-culture-- www.boutique-safrandefrance.fr-- www.francebleu.fr/infos/environnement/fontanieres-face-au...