Lune de Miel au
Grau-du-Roi –Ernest Hemingway
L’écrivain américain Ernest Hemingway
choisit le Grau-du-Roi en mai 1927 pour son voyage de noces. Il aimait Paris et
ses artistes et intellectuels des années 20, mais contrairement à beaucoup
d’Américains de sa génération, il prenait plaisir à musarder sur nos petites
routes recherchant bonne chère, vins raffinés et paysages bucoliques.
Déjà en juillet 1923 le
romancier britannique Ford Madox Ford dans son livre « Provence »
mentionne sa rencontre avec Ernest Hemingway sur le pont entre Tarascon et
Beaucaire ; il se rend en Espagne pour les fêtes de Pampelune. Le 25 avril
jusqu’au 1er mai 1924, Ernest est en Provence : un voyage de
six jours pour 250 francs, y compris billets de chemin de fer et une place à la
corrida de Nîmes.

"This is a fine place below Aigues Mortes on the
Camargue and the Mediterranean with a long
beach and a fine fishing port."
Ernest Hemingway, 27 Mai 1927
(correspondance à Maxwell Perkins)
Camargue and the Mediterranean with a long
beach and a fine fishing port."
Ernest Hemingway, 27 Mai 1927
(correspondance à Maxwell Perkins)
Ernest à 27 ans, son
premier roman « Le Soleil se lève aussi » connait un grand
succès de librairie et il se trouve propulser au premier rang des auteurs
américains. Il investit sa fortune récente en voyage pour découvrir l’Europe.
L’écrivain ne chôme
pas pendant son séjour ; levé tôt, tous les matins jusqu’à l’heure du
déjeuner, il écrit. Il achève « Dix Indiens », « Paradis
Perdu » qui deviendra plus tard « Collines comme des
Eléphants ». Il s’inspire de sa vie, de ses ruptures amoureuses. Le reste
de la journée avec son épouse, il marche sur les plages désertes, pêche,
observe la mer et les barques de pêcheurs, apéros face à la mer au café de La
Jetée… Un peu de shopping, bronzage, farniente aux terrasses des cafés… Ils
participent au pèlerinage des Saintes Maries de la Mer fin mai, déguisés en
gitan, la peau barbouillée au jus de mûre pour renforcer leur bronzage. Ils s’y
rendent à vélo !. Ils fréquentent l’église Saint-Pierre du Grau du Roi, aujourd’hui remplacée.

Ce séjour heureux lui
inspire le début du roman « Le Jardin d’Eden » qui met en scène un
jeune écrivain David Bourne et son épouse Catherine, jeunes mariés. Les trois
premiers chapitres explorent largement les environs et la ville du Grau du Roi
qui est décrit comme un coin de paradis : « Ils séjournaient alors au Grau du Roi et l’hôtel se trouvait en bordure
d’un canal qui, des remparts de la vieille ville d’Aigues Mortes, filait droit
jusqu’à la mer. » « il avait quatre chambres à l‘étage et au rez de
chaussée face au canal et au phare, un restaurant et deux tables de billards »…(premiers
mots du roman). Tous les deux adoptent la même coupe de cheveux chez le
coiffeur du village. Il nous raconte le rituel de la pêche au loup, les pains
de glace livrés par le camion de Nîmes… Ce séjour est l’occasion d’emmagasiner
des matériaux, des impressions qui
ressortiront dans les écrits d’Hemingway. Il a laissé l’image qu’un homme
curieux des autres, qui buvait pas mal et qui savait écouter.
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Cuba Bar Florida Havane |
En 1952 c’est « Le
Vieil Homme et la Mer » qui lui apportera une reconnaissance
internationale. Prix Nobel de littérature en 1954 pour un « style puissant
et nouveau par lequel il maitrise l’art de la narration moderne ». L’année
précédente il avait remporté le prix Pulitzer. "Camarade, je n'ai jamais rien vu de plus
grand, ni de plus noble, ni de plus calme, ni de plus beau que toi",
s'exclamait le Vieil Homme d'Hemingway devant un thon rouge.
En route pour Venise, il fait
un crochet et revient au Grau en décembre 1949 séjournant à l’Hôtel Bellevue et
d’Angleterre. Le Grand Hôtel Pommier est devenu
un restaurant "le Quai des Artistes". Il est accompagné de sa 4ème
épouse Mary et d’un couple d’amis, ainsi que de son biographe AE Hotchner. Avignon,
Pont du Gard, Nîmes, Aigues-Mortes et le Grau-du-Roi.
En mai 1954, de
retour d’Italie, il repasse dans notre région. Il a une nouvelle muse Adriana
Ivancich. Il lui écrit « nous allons voir le pays de Cézanne et de Van
Gogh ». Il confie à son biographe Hotchner :« Je connais par
cœur tous les vignobles de la région ; je me promenais ici à bicyclette
avec Scott Fitzgerald à l’époque où il n’était pas fou ».
Fin septembre 1959 c’est
son dernier voyage dans le Sud ; Nîmes, Aigues-Mortes, Le Grau du Roi. Il
loge à l’hôtel nîmois l’Imperator. Il assiste le 27 septembre à la corrida
d’Antonio Ordonnez dont il dit : « il possédait les trois grandes
qualités requises pour un matador : le courage, l'adresse professionnelle et la
grâce devant un péril de mort ».. A L’Imperator Ernest
loge toujours dans la même chambre. Il y rencontre les matadors, dîne avec eux.
De Cuba il a pris l’habitude des cocktails à base de rhum.
Hemingway c’est l’image
du soldat, du chasseur, du pêcheur, de l’aficionado, de l’homme engagé dans les
guerres du moment, et en particulier de la guerre d’Espagne. « L’Adieu aux
armes » de 1929 interdit par Mussolini et aussi à Boston, à partir de son
engagement d’ambulancier pendant la 1ère guerre mondiale ; « Pour
qui sonne le glas » 1940 sur la guerre d’Espagne…. Et bien d’autres
livres. Qui nous font oublier sa misogynie, son homophobie, son antisémitisme,
et une certaine malveillance nous dit son biographe Kenneth Lynn. Un homme de
son temps !!
Une anecdote sur son
engagement pendant la Second Guerre Mondiale, en août à la libération de Paris,
il rencontre le général Leclerc. Il se présente en tenue mi-militaire,
mi-civile et demande un blindé de reconnaissance, deux ou trois jeeps et une
demi-douzaine d’hommes pour libérer le bar du Ritz. Leclerc le renvoya en le
traitant de clown !
« Le Jardin
d’Eden » sera édité après sa mort aux Etats-Unis en 1986, en France en
1989. La critique n’est pas fameuse. Il faut dire que le manuscrit a été
retaillé par son éditeur Tom Jenks. Cécité, diabète, impuissance, troubles
bipolaires, Ernest se sent plonger dans un monde qui lui échappe. Il se donne
la mort le 2 juillet 1961.
Ses romans seront portés
au grand écran. Il serait le parrain du comédien français Claude Brasseur.(in « Le cinéma français célébré à Cuba », L'Obs, 6 juin 2006 (lire en
ligne [archive])- Prisma Média, « Claude Brasseur - Vsd », Vsd.fr, 3 juin 2008 (lire en ligne [archive]))
L’Office du Tourisme du Grau propose aux touristes,
des safaris Hemingway, des chambres Hemingway, des week-end Hemingway. Un prix
Hemingway à Nîmes pour récompenser un écrivain, cérémonie qui se déroule à
l’Imperator, cette année 210 candidats. C'est la 14ème édition. Le concours est ouvert à tous les auteurs déjà publiés, qui récompense une nouvelle inédite sur la tauromachie, son univers et sa culture Le prix est de 4 000 euros. En 2017 c'est Gil Galiot qui remporte la palme. (prixhemingway@lesavocatsdudiable.com). Hemingway est définitivement
gardois !.
Sources : James R. Mellow,
Hemingway: a life without
consequences [« Hemingway : une vie
sans conséquences »], Boston, Houghton Mifflin, 1992 (ISBN 9780201626209),- Jeffrey Meyers, Hemingway: a biography [« Hemingway : une biographie »], Londres, Mac
Millan, 1985 (ISBN 0-333-42126-4), - Pierre Clostermann Une vie pas comme les autres .Éd.
Flammarion2005, - Griffin, Peter, Ernest Hemingway, au
fil de sa jeunesse, trad. franç., Gallimard, 1989. – GregoryH Papa Hemingway 1976 édit Denoêl – Mariel Hemingway Ernest Hemingway la vie et ailleurs 2011 édit
Michel Lafont – wikipedia wikimedia communs – photos Babelio.com – L’Express
Bar Florida Havane Reuters/Desmond Boylan mai 1960 - Gazette de Nîmes n°895-896 août 2016 Bernard Bastide et n°970 p5 -4janvier 2018--
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