vendredi 24 décembre 2021

Les santons voir et revoir

 (sur ce blog du 10/12/2020)

Santons-fèves- collection perso


Les Santons et la Crèche :

Bientôt Noël et ses décors scintillants.  Depuis quelques années dans notre belle province se pose et se repose la question de la Crèche : cultuelle, culturelle, traditionnelle, laïque ? Dans quel lieu est-elle permise, lieu privé, public ? On accepte sans rien dire les marchés de Noël, les guirlandes, les étoiles lumineuses dans les rues, qui sont pourtant espace public… Un marché de Noël bientôt à Dubaï. Comme dit ma voisine, au lieu de s’occuper des crèches il y en a qui ferait mieux de s’occuper de la hausse de la CSG pour (ou contre) les retraités !!.

L’histoire des représentations de la nativité qui est à l’origine des santons remonte aux premiers temps chrétiens. A Rome dans une chapelle des catacombes de Saint-Priscille une fresque de la première moitié du 2ème siècle montre la première figuration de la crèche connue. Toujours dans ce lieu une adoration des Mages peinte au 3ème siècle. Le musée lapidaire d’Arles nous montre des scènes de la Nativité, de l’adoration des Mages avec le monogramme de Constantinien.

La crèche s’enrichit de l’âne et du bœuf au 4ème siècle, animaux absents de l’Evangile. La crèche apparait au grand jour sur des sarcophages dans des lieux comme Rome, Milan, Ancône, Syracuse, Arles, Saint-Maximin. Elle se dévoile sur des manuscrits, des miniatures, des ivoires, peintures d’Orient….
Contrairement à la tradition, il n'y a aucune trace d'un âne ou d'un bœuf dans les deux évangiles qui racontent la naissance de Jésus (celui de saint Matthieu et celui de saint Luc). Les textes apocryphes comme l’évangile Pseudo-Mathieu du 6ème siècle mentionnent les deux animaux. Légende, besoin d’enjoliver les choses, de les rendre plus proches des fidèles avides de détails ?  Pourtant des représentations des deux animaux sont bien plus anciennes. Un fragment de sarcophage avec le bœuf et l’âne porte le nom des consuls Placide et Romulus, donc vers 343. Une tradition venue de témoins oculaires et transmise de bouche à oreille ? La question n’est pas tranchée actuellement. L’historien René Grousset nous dit « C'est à Rome surtout que la sculpture chrétienne avait fait son œuvre et que de nombreux bas-reliefs avaient habitué l'œil à voir près de Jésus naissant un Ane et un Bœuf : c'est à Rome que, sous cette influence toute plastique, les deux animaux avaient commencé d'exister véritablement. Nous n'avons plus qu’à suivre désormais notre légende à travers les âges. Jusqu'au seizième siècle on ne la mettra pas en doute ; et d'ailleurs, quels que soient les arguments qu'on puisse lui opposer, elle restera toujours vraie pour le sentiment populaire »Nous nous garderons bien d’avoir une opinion. Et puis ces animaux sont bien sympathiques et faisaient partie de la vie des familles.
Sculpture en bois Philippe Péneaud
Le concile de Trente avait épuré certaines croyances fondées sur les évangiles apocryphes : le bœuf et l’âne disparaissent des crèches et représentations de la Nativité fin 16ème et 17ème siècle, à quelques exceptions près. Ils sont oubliés par Velasquez, Rubens… Mais sous la pression des fidèles et avec le temps, ils réapparaissent au 18ème siècle. 
Traditionnellement on attribue à François d’Assise la création en 1223 de la première crèche vivante à Greccio en Italie, dans un ermitage établi dans une grotte donnée par le seigneur du village. Les personnages sont joués par les gens du village, les animaux bien réels. Une querelle d’attribution : est-ce la mère de François d’Assise, de Tarascon ou Beaucaire, qui lors de son mariage avec un drapier de Lombardie, emmena sa crèche dans ses bagages. Les marchands napolitains vendaient sur les marchés de Provence et d'ailleurs jusqu'aux Flandres des « Santibelli », figurines religieuses en plâtre. D’où pour certains historiens l’existence de crèches provençales avant le 13ème siècle. Pour les Italiens au contraire, la première crèche vivante naquit à Greccio et de là la tradition gagna les couvents franciscains, des clarisses, les églises de France durant la seconde moitié du 13ème siècle. Quoiqu’il en soit,  François d’Assise est le saint patron des santonniers.
Petit à petit les personnages de la crèche sont sculptés en bois, en cire, en carton-pâte, en verre. Des chefs-d’œuvre, si fragiles qu’on les fixait dans des caisses en bois avec une vitre sur le devant. Les verriers d’Arles étaient célèbres pour ce travail, souvent des religieux, chartreux, carmélites, … La cire de leurs ruches était utilisée pour faire ces « Belèn » peints. Ce sont des pièces de musée maintenant.
Les personnages de la crèche de Louis XIV étaient en porcelaine coloriée, en costume de l’époque. Monseigneur Chabot nous raconte : « la crèche reflète la distinction et la noblesse qu’on trouvait à la cour du grand roi…les bergers portent culottes courtes et bas blancs….Les rois Mages ont grand air, avec leur coiffures empanachées de plumes flottantes… » . La crèche de Louis XV est « en satin bleu, aveuglante de paillettes.. ». La crèche de Louis XVI n’a pas la même grâce et la même finesse. Des coquillages et des arbustes en trop grand nombre nuisent à l’effet. Toute une époque !

Le peuple voulait aussi sa crèche. En 1775 à Marseille, Laurent construit une crèche à montrer au public avec des mannequins articulés vêtus de costumes provençaux. Mais il y ajoute des girafes, des rennes, des hippopotames. Jean-PaulClébert raconte : « À l'époque du Concordat, Laurent montrait même un carrosse qui s'avançait vers l'étable ; le pape en descendait, suivi des cardinaux. Devant eux s'agenouillait toute la Sainte-Famille et le pape lui donnait sa bénédiction. Pendant l'adoration des bergers, un rideau se levait, dévoilant la mer sur laquelle voguait un bâtiment de guerre. Une salve d'artillerie saluait l'enfant Jésus qui, réveillé en sursaut, ouvrait les yeux, tressaillait et agitait les bras ».


La Révolution française supprime la messe de minuit et bouleverse l’organisation des églises. Les représentations publiques de la nativité sont parfois autorisées. Alors dans l’intimité des foyers de chaque famille provençale sont apparus les « santoun », les petits saints, les santons. Ce que le peuple veut…. La crèche entre dans l’espace privé.


Foire aux santons à Marseille au milieu du XIXe siècle .En 1803, a lieu à Marseille la première foire aux santons. Santons peints, habillés, santons d’ailleurs. Et tous les accessoires pour le décor : la crèche est devenue un ensemble : l’étable, mais un village, avec son église, des maisons, des ponts, des puits, des arbustes…. Combien de villes maintenant ont pareille foire pour la joie de tous.



Jean-Louis Lagnel de Marseille eut le premier l’idée de construire des moules pour ses figurines en argile. Il représentait ses voisins dans différents métiers, vêtus dans la mode populaire de l’époque Louis-Philippe. Ces moules permettaient de reproduire à l’infini les sujets à moindre coût. Ses premiers santons sont sans bras, sans coiffure, sans accessoires qui sont moulés à part et collés au corps à la barbotine (argile diluée). Puis expérience aidant, il créa ses santons d’une seule pièce, installant le véritable santon 

de Provence en argile différent des santibelli italiens en plâtre. 

Moules de Jean-Louis Lagnel (1764-1822) premier santonnier marseillais. Musée Marcel Carbonnel (collection privée M Carbonnel – photo Ph Renoux-Carbonnel mars 2012- wikipedia-wikimedia common)
Les santonniers d’aujourd’hui réalisent d’abord un modèle dans l’argile crue placé sur un socle qui fera partie du sujet. Ensuite vient la confection du moule coulé en plâtre. Dans une moitié du moule talquée, on presse un colombin d’argile fraîche. Après pression des deux parties du moule, le santon est sorti, mis à sécher, ébarbé pour éliminer toute trace du moulage. Après un nouveau séchage, il est cuit dans un four à 800°. La décoration se fait à la main. Les santons habillés à l’origine étaient confiés à des familles qui confectionnaient les vêtements. Des petits métiers qui aidaient financièrement les familles.
lavandières Arles
                    
 Pêcheur de crustacés –Lagnel



Toutes les catégories sociales, les métiers, et maintenant des célébrités du moment sont représentées. Le Vieux Grasset et sa Vieille Grassette qui marchent dans l’innocente vie santonnière, bras dessus bras dessous rivés l’un à l’autre dans la tendresse, le Ravi, le Tambourinaire, le pêcheur et la poissonnière, le boulanger, le porteur d’eau, la lavandière, le vannier, le pistaché aux nombreux gilets et son gros ventre….. et l’Arlésienne, l’aveugle et son fils, les bohémiens, Margarido la grognon…. Des vies !! Le maire a revêtu ses plus beaux habits, son écharpe tricolore, son chapeau haut-de-forme, son parapluie. Une montre en or pend de sa poche de veston, habituellement appelé Mathieu et il inscrit la naissance de l’Enfant sur le registre d’Etat-Civil du village. Le brigand et l’enfant volé offrent un sujet de morale qui se terminera par la rédemption finale. Le curé traditionnellement représenté bedonnant, joues rouges. Un moine capucin, souvent présent en hommage à celui qui dans son couvent de Marseille avait eu l’idée de distribuer aux pauvres des petites sujets en mie de pain parfumés à l’anis. Son supérieur fit cesser cette distribution, peut-être parce que les petits pains étaient mangés avant le 25 décembre, ou parce que le succès de l’opération les dépassait.




Au moment de la crèche, nos rues, nos centres commerciaux résonnent de chants de Noël, s’illuminent de guirlandes. On prépare les cadeaux, on imagine les repas de fêtes… Même si l’on manque de moyens, on fait un geste, pour marquer le coup. Actuellement la tradition des crèches existe dans beaucoup de pays. Chaque santonnier apporte sa touche personnelle. Les Chinois nous en envoient en plastique, en résine. Les Polynésiens les sculptent dans des noix de coco, habillés de fibre de palme.... Les expositions nous enchantent par la diversité des sujets. Et chaque spectateur y trouve ce qu’il a envie d’y trouver. Les non-croyants ne sont pas les derniers à se réjouir du spectacle. Je connais nombre d’athées ou de protestants qui chaque année font leur crèche avec des décors modifiés d’une année sur l’autre, des nouveaux santons. On ne peut pas les taxer d’infantilisme. Peut-être un besoin de merveilleux ! 

Paul Fouque 1990 Aix en Provence collec privée– wikipedia –photo Daniel Ferrier

 La crèche, légende, religion, folklore, traditions, Histoire ? Quand on aborde la Pastorale provençale qui fait naître Jésus chez nous et non en Palestine, avec le maire pour l’inscrire sur notre registre d’Etat-civil, il y a de quoi s’interroger !!!! Toutes les catégories sociales y sont représentées, de la gardienne d’oies, à la marchande de légumes, du curé qui n’existait évidemment pas à l’époque de la naissance, le bohémien, du boulanger à la vendeuse d’ail…., tous naturellement présents pour célébrer la naissance de l’Enfant.  Il y a de quoi rêver à Noël, respirer le chocolat, le sapin, et surtout admirer le savoir-faire de nos santonniers !! Le message de Noël c’est avant tout un message de paix, d’amour. Une trêve dont nous avons bien besoin, un renouveau, un espoir ! C'est un message qui échappe à la seule sphère religieuse. Ce n’est pas innocent si la tradition a fait naître Jésus en décembre au lieu de l’été,  lorsque la lumière revient, et que les jours paraissent s’allonger petit à petit. "A la sainte Luce les jours allongent d'un saut de puce et pour la Noël d'un pied de coq ».  ("Avant 1582, dans le calendrier julien, la Sainte-Luce tombait deux jours après le solstice d'hiver, le calendrier grégorien a avancé la Sainte-Luce de dix jours et elle tombe aujourd'hui huit jours avant le solstice).  Ce besoin de fête lors du renouveau de la lumière a existé bien avant le Christianisme, bien avant les Romains, l'Antiquité, probablement depuis la nuit des temps. Quoi de mieux que la naissance d'un enfant pour illustrer ce renouveau ?

Et puis Jésus est aussi mentionné dans le Coran (par exemple Sourate 19, 16-35). Une forme de laïcité avant l’heure ?!! 

Pour répondre à nos reboussiers, Gaston Doumergue, président de la République avait reçu en son temps santons et santonniers dans les salons de l’Elysée.

(Autres réflexions que suggère cette polémique : attention à l'intégrisme laïc qui peut tuer la laïcité - ce que le peuple veut, il finit toujours par l'obtenir - nous payons encore maintenant l'intégrisme républicain de la période de la Terreur e 1794.)


Farandole des santons, fresque de David Dellepiane



Comps 2015 crèche Romain Rodriguez

Hôtel de Ville Avignon 2010 





 
Sources : Marie Mauron Le Monde des Santons ISBN 2-262-00052-2 octobre 1976  -  Françoise Lautman, Crèches et traditions de Noël, Ed. de la Réunion des Musées nationaux, 1986, p. 39 – René Grousset Le Bœuf et l’Ane à la Nativité du Christ 1884 V4 N°1 Persée.fr  -  Jean Paul Clébert  Guide de la Provence mystérieuse, Éd. Tchou, Paris, 1972 - www.peneaud.com/sculpture-noel/noel-1.htm  -  wikipedia  - VFhorizon-provence.com - Régis Bertrand "Crèches et Santons de Provence"publié en 1992, éditions Barhélémy. -  A voir Le Salon international d’Arles des Santonniers, santons d’ici et d’ailleurs -Du 18 novembre 2017 au 14 janvier 2018 Cloître Saint-Trophimesalondessantonniers.over-blog.fr


 Collection privée – le pêcheur et la bergère santons anciens

 Collection privée – le boulanger, le gitan, la marchande d’ail et un mouton
Collection privée- la bergère à la lanterne, le tambourinaire et une vache ancienne
Collection privée – quelques santons

Crèche de la Légion Etrangère





















mardi 14 décembre 2021

Annie Edson Taylor

 



Annie Edson Taylor et les chutes du Niagara

 

Encore une petite femme fragile !!

Annie Edson Taylor est née le 24 octobre 1838 à Aubum aux Etats-Unis. Elle quitte ce monde le 29 avril 1921 dans l’Etat de New York. Le jour de ses 63 ans elle devient la première personne à descendre les chutes du Niagara dans un tonneau en bois et survivre à cet exploit.

C’est une enfant sans histoire, qui aime lire et jouer dehors. Elle fait de bonnes études pour devenir enseignante. Elle se marie à 17 ans, mais son mari David Taylor meurt après 7 ans de mariage, blessé à la guerre de Sécession.

Trop jeune veuve, elle prend sa vie en main. Elle ouvre une école de danse à Bay City dans le Michigan. Puis nous la retrouvons professeur de musique à Sault Sainte-Marie toujours dans le Michigan. Un saut au Mexique à partir de San Antonio (Texas) pour trouver du travail. Pour retourner enfin à Bay City.

Les chutes du Niagara font fantasmer tous les aventuriers de ce 19ème siècle.

Il s’agit d’un ensemble de trois chutes d’eau à cheval sur le Canada et l’Amérique du Nord :: les chutes du Fer-à-Cheval ou chutes canadiennes, les chutes américaines et les chutes du Voile de la Mariée. 57mètres de haut environ, d’une grande largeur, très puissantes.

Sam Patch, le « sauteur Yankee » en octobre 1829 est la première personne connue à avoir sauté et survécu dans la chute du Fer à Cheval. Après lui d’autres ont tenté leur chance, mais beaucoup y ont laissé la vie. Les chutes américaines sont particulièrement mortelles.

(Annie et le chat cobaye--« La Reine de la Brume » posant avec son tonneau et son chat. Prints and Photographs division de la Bibliothèque du Congrès des États-Unis sous le numéro d’identification ggbain.05575.).

L’âge venant, Annie désire sécuriser financièrement ses dernières années. Elle décide l’aventure de la traversée des chutes du Niagara. Elle fait fabriquer un tonneau de bois sur mesure en chêne renforcé de fer et rembourré d’un matelas. Deux jours avant la tentative un chat teste la solidité du tonneau dans les chutes Horseshoes.

Le chat fait le plongeon et récupéré il a simplement une petite plaie à la tête. Il pose avec Annie pour des photos.

Le 24 octobre 1901, c’est le grand jour pour Annie Taylor. Elle a 63 ans. Une foule est venue la voir descendre les chutes dans son tonneau. Elle a embauché un agent pour faire la publicité de son exploit. Le saut dura moins de vingt minutes. Les secouristes rejoignent le tonneau, mais ont des difficultés pour l’ouvrir.


Enfin elle en sort avec une petite entaille à la tête. Elle déclare à la presse :

 « Si c'était avec mon dernier souffle, je mettrais n'importe qui en garde contre la tentative de cet exploit... Je préférerais marcher jusqu'à la bouche d'un canon, sachant qu'il allait me faire exploser en morceaux plutôt que de faire un autre voyage par les chutes »… La peur, l’inconfort, ont été de la partie !!

Sa témérité lui apporta renommée mais pas richesses : son agent détourna tout l’argent gagné pour cette cascade. Elle finit sa vie dans la pauvreté à 82 ans. Elle avait eu le temps de rédiger son autobiographie : The Autobiography of Anna Edson Taylor, Invalids' Hotel, 1909, 12 p. (lire en ligne [archive]).

Bobby Leach dix ans plus tard, sera le premier homme à descendre les chutes dans un tonneau. Il s’y cassa les deux genoux et la mâchoire. Il mourut bêtement 15 ans plus tard en glissant sur une peau d’orange alors qu’il racontait son histoire. Il était en Nouvelle-Zélande.

Sources et pour en savoir plus : /fr.wikipedia.org/wiki/Annie_Edson_Taylor-- www.curieuseshistoires.net/pour-financer-sa-retraite-une-americaine-descend-les-chutes-du-niagara-en-tonneau/---- dailygeekshow.com/annie-edson-taylor-chutes-du-niagara-tonneau-descente/---/www.laboiteverte.fr/ils-ont-descendu-les-chutes-du-niagara-en-tonneau/--- wikipédia.org---

samedi 4 décembre 2021

Régimes politiques pour rire un peu


 

Régimes politiques :

Pour rire un peu de nos «politiques ». Que cela ne vous empêche pas de voter !!





































 

 

 

 





mercredi 24 novembre 2021

Jeanne Labrosse Première femme parachutiste

 

André Garnerin et Jeanne Labrosse par Christoph Haller von Hallerstein-1803

Jeanne Labrosse-Gernerin première femme parachutiste

En ce moment un futur candidat aux élections présidentielles tient des propos sur les femmes extrêmement bizarres. Entre autres « les femmes sont le but et le butin de tout homme doué qui aspire à grimper dans la société. Les femmes le reconnaissent, l’élisent, le chérissent ». J’espère qu’elles s’en souviendront lorsqu’elles mettront leur bulletin de vote dans l’urne.

Je vais évoquer ici une femme qui n’était pas une petite chose fragile.  Le 12 octobre 1799, Jeanne Geneviève Labrosse devient la première femme parachutiste avec un saut d’une hauteur de 900 m depuis un ballon à hydrogène.

Le mot parachute est inventé par le physicien Louis Sébastien Lenormand : l’engin ainsi désigné est une toile cerclé de bois. Il saute de l’observatoire de la tour de la Babote de Montpellier le 26 décembre 1783.(sur ce blog Montpellier la Tour de la Babote 26/08/2018). Dès lors on commence à expérimenter le parachutage de petits animaux. Le physicien Blanchard se joint à Lenormand.

Au départ et depuis la bataille de Fleurus (1794), le parachute pourrait être un dispositif de secours pour sauver la vie des aérostiers militaires embarqués dans des ballons d’observation. Le ballon à Hydrogène est inventé par le physicien Charles. Un temps d’arrêt dans les recherches : Garnerin est emprisonné en Belgique par les Autrichiens en 1794. Il reste trois ans à Bude en captivité. Il imagine alors un système de toile et de cordes pour sauter des remparts de sa prison sans se tuer. Ses gardiens découvrent ses préparatifs et lui ôtent les moyens de continuer.

A sa libération, sans fortune, il lui faut trouver des moyens d’existence. Comme Blanchard il se fait aéronaute. Il va mettre au point son futur parachute. En 1796, il parachute un chien à partir d’un balcon, puis c’est son tour. Après deux échecs il réalise son saut le 22 octobre 1797 au-dessus de la Plaine Monceau à partir d’un ballon à hydrogène à 680m d’altitude.

 « Cette expérience a consisté, précise-t-il, à m’élever à 350 ou 400 toises (7 à 800 mètres) dans l’atmosphère, pour m’abandonner à cette hauteur à la merci d’un parachute qui embrasse une colonne d’air qui a pour base un cercle de 23 pieds (soit près de 7 mètres). Je le construisis en toile de canevas très légère, recouverte de papier des deux côtés. Le poids de ce parachute avec tous ses agrès est de 34 livres (16,6 kilos), celui de la nacelle de 19 livres (un peu plus de 9 kilos) et le mien de 113 livres (soit 57 kilos), en tout 169 livres. »

Sa technique est la suivante : il s’élève avec un ballon à hydrogène, puis il coupe les cordes de la nacelle et redescend dans celle-ci, le parachute en panneaux de soie déployé au-dessus de lui. Il s’en tire avec un genou un peu brutalisé, mais rentre chez lui à cheval nous assure le journal « L’Ami des Lois ».

Mais rapidement, les ascensions en ballon, les sauts en parachute deviennent des attractions parfois lucratives qui annoncent les futurs meetings aériens. Les aéronautes professionnels des deux sexes deviennent des stars qui attirent des foules considérables.


.(Journal des Dames et des Modes, 1797-1798.Garnerin et Céléstine Henry)

Les pouvoirs publics s’inquiètent malgré tout. Garnerin prévoit d’emmener dans sa nacelle Célestine Henry de 21 ans, un arrêté lui barre le chemin en vain : " le spectacle de deux personnes de sexe différent, s’élevant publiquement à ballon perdu, est indécent, immoral... ». Et » Garnerin n’a pu garantir les inconvénients qui pouvaient résulter de la seule pression de l’air sur les organes délicats d’une jeune fille".

Jeanne Geneviève Labrosse est née en 1775 et est morte en 1847. Elle était dans la foule, le jour où Garnerin fit le premier saut en parachute de l'Histoire. Comme les gens présents ce jour-là, elle fut fascinée et devint une de ses élèves. 

L’exploit de Jeanne Labrosse est rapporté dans le livre « Championnes » de Lorraine et Clémentine Kaltenbach (édit Arthaud janvier2019) :

"A 14 h, elle monte dans la nacelle, tandis que Garnerin s’affaire pour imprimer à l’aérostat l’élan nécessaire au décollage. Puis dans une atmosphère recueillie, la sphère s’élève dans les airs, tandis que d’une voix assurée, Jeanne s’exclame : "Adieu tout le monde !"  La jeune femme manifeste un sang-froid imperturbable durant toute l’ascension. La foule retient son souffle et suit la "créature sublime" qui monte, monte toujours. Le ballon s’élève jusqu’à 900 mètres d’altitude, et c’est depuis cette hauteur vertigineuse que la citoyenne Labrosse, équipée de son parachute enjambe la nacelle…"

Jeanne qui a épousé Garnerin entre temps, dépose le 11 octobre 1802 le brevet n°195  du parachute au nom de son mari, appareil destiné à ralentir la chute de la nacelle d’un ballon après l’explosion de celui-ci.

Le parachutisme, une histoire de famille : sa nièce Elisa Garnerin sera parachutiste professionnelle de 1815 à 1836.

Bien plus tard Jeanne ouvre une pension de famille pour militaires avec Marie-Thérèse Figueur connue sous le nom de Madame Sans-Gêne ancienne dragon des armées d’Italie et des Pyrénées-Orientales sous l’Empire.

 

Lucienne Blaise, sera  la première femme à sauter en parachute depuis un aéroplane, elle accomplit cet exploit le 17 mai 1914.


Source et pour en savoir plus : /fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_Labrosse -- Lorraine Kaltenbach et Clémenine Portier-Kaltenbach (historienne et journaliste), Championnes : Elles ont conquis l'or, l'argent, le bronze, Paris, Flammarion, coll. « Arthaud poche », janvier 2019, 25 p. (ISBN 978-2-0814-4497-3lire en ligne [archive]), p. 29-33---Jules Duhem, Histoire des idées aéronautiques avant Montgolfier [archive], Paris, Fernand Sorlot, 1943-- www.parachutistes.org/accueil/actualites/item/249-jeanne-labrosse-garnerin.html--France Pittoresque internet D’après « La navigation aérienne » (par Arthur Mangin) édition de 1869,« Description des machines et procédés spécifiés dans les brevets d’invention, de perfectionnement et d’importation,dont la durée est expirée » (Tome 2) paru en 1818 et « Histoire des grands inventeurs français du XIVe siècle à nos jours » (par Philippe Valode) paru en 2015)-- http://gimp-savvy.com/cgi-bin/img.cgi?noabMl9FZNsD7pY2496