vendredi 14 janvier 2022

Pierre Paul Riquet et les Cordeliers furieux

 

Pierre Paul Riquet et les cordeliers furieux



(Pierre Paul Riquet statue Bézier)

Aux archives du Canal du Midi, une lettre de Pierre-Paul Riquet, le père du canal, en date  du 22 novembre 1667. Elle est adressée au chevalier de Clerville ingénieur des fortifications chargé par Colbert en 1664 d’aider Riquet, d’évaluer et surveiller les travaux. Un an auparavant le roi Louis XIV avait signé l’Edit de construction pour le canal des Mers Océane et Méditerranée.

Cette lettre évoque un moment crucial : la pose des deux premières pierres de l’écluse de Garonne à Toulouse. Cette cérémonie signe, lance le début de travaux de creusement.

Il s’agit de communiquer et de bien communiquer. Ce premier acte de la construction doit être une fête, un événement grandiose et surtout politique. Riquet a invité les hauts dignitaires du clergé du Languedoc, les représentants du Parlement et des Capitouls. L’archevêque de Toulouse, Monseigneur D’Anglure de Bourlemont, et président des Etats de Languedoc, bénira les deux premières pierres de l’écluse tandis que le président du Parlement et deux Capitouls déposeront et scelleront solennellement, l’un une pierre à droite et les autres celle de gauche.

Des médailles en bronze sont prévues pour être distribuer à la foule. Elles représentent la gloire du roi Louis XIV et la ville de Toulouse. Sur ces médailles un texte en latin sera gravé ainsi que sur les deux lames de métal qui seront déposées dans les fondations de l’écluse. Le canon ouvrira les festivités et une grande fête populaire couronnera la journée.

Le texte en latin pose problème à Pierre-Paul Riquet : il ignore totalement cette langue et il faut absolument que le texte soit correct. L’événement sera raconté, imprimé avec le texte en latin et distribué dans tout le royaume et aussi à l’étranger. Il y va de la renommée du roi de France. L’entreprise est grandiose et il faut que cela se sache !!

Et Riquet de raconter dans ce courrier une anecdote liée à l’évènement, moment burlesque, farfelu, dont on peut rire bien après, lorsque l’orage est passé !!.


Son ami et protecteur Monseigneur Charles de Bourlémont, évêque, donc connaissant le latin peut l’aider à corriger son texte. Dans les couloirs de l’évêché Riquet croise deux moines cordeliers. Il décide pour éviter de déranger Monseigneur Evêque de leur soumettre le texte. Les moines le reconnaissant, acceptent de l’aider et d’écouter Riquet lire sa version latine.

Mais le pauvre Pierre-Paul affligé de son accent de Bézier et de sa méconnaissance du latin est pratiquement inaudible et les moines sont persuadés qu’il se moque d’eux.

Il leur avoue qu’il ne connait rien à cette langue. Les moines ne le croient pas : comment un si grand savant peut-il ignorer la langue de Rome ? Plus Riquet essaie de se justifier, et  plus les religieux passent du simple air renfrogné à une colère noire.  « La chose passa si loing que nous en fusmes aux grosses paroles et un des pères, le plus gaillard des deux, eust la hardiesse de mettre en ses mains une de ses galoches pour m’en fraper. » (une galoche de l’époque est une chaussure en cuir à semelle de bois !!)

 « Mais alors que je vis en ses mains la sandale, je tremblai de frayeur et, crainte d’escandale, je gagnai promptement la chambre épiscopale, où je me mis à l’abri de nostre grand prélat, contre la tempeste de ce père furieux » !

Riquet préfère rire et faire rire de l’anecdote…

Il sera un précurseur en matière de droit social :  

Les ouvriers qui travaillaient sur le canal étaient payés 10 livres par mois, salaire  bien supérieur à celui qu’ils auraient pu espérer ailleurs pour la même tâche. Les jours fériés, dimanches, jours de pluie n’étaient pas déduits. Le logement était fourni pour une somme modique, les ouvriers malades étaient payés comme s’ils travaillaient. Les outils étaient fournis, charge aux ouvriers de les entretenir… Des conditions de travail qui n’ont pas fait que des amis à Riquet, parmi les entrepreneurs de la région mais qui ont fait rêver les ouvriers à une autre façon de travailler !!!

 

Sources et pour en savoir plus : archives.haute-garonne.fr/n/pierre-paul-riquet/n:241-- www.canalmidi.com/paulriqu.html-- www.canaldumidi.com/Personnages/Paul-Riquet.php--Samuel Vannier directeur des Voies Navigables de France--

 

 

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