jeudi 14 septembre 2023

A la recherche de nos aïeux



 (registre paroissial Toulouse)

A la recherche de nos aïeux

Pour leurs recherches historiques, historiens, généalogistes, ou simples amateurs, doivent retrouver la trace d’hommes et femmes des temps parfois très anciens. Les registres paroissiaux ou d’état civil, les actes de notaires (pour les ventes, contrats de mariages, testaments) sont des alliés judicieux. Les recensements depuis le début du 19ème siècle sont aussi très intéressants, parfois listes par métiers, ou uniquement les hommes d’une commune avec leur métier, la date d’arrivée dans le village…..

La tenue des registres paroissiaux tenus par le curé de la paroisse devient obligatoire sous François Ier par l’ordonnance de Villiers-Cotterêt de 1539, art 51  : « Aussi sera faict registre en forme de preuve des baptesmes, qui contiendront le temps et l'heure de la nativité, et par l'extraict dudict registre se pourra prouver le temps de majorité ou minorité, et fera plaine foy a ceste fin. ». Il s’agit de prouver la religion et l’âge de l’individu.

En mai 1579, l’ordonnance de Blois sous Henri III  étend cette règle aux registres de mariages et de sépultures.

Mais dans certains diocèses de tels registres existent dès le 14ème et 15ème siècle, souvent en très mauvais état et rédigés en latin ou en un mélange latin/langue régionale. Avant cette période, les actes des notaires, les chartres consulaires sont plus accessibles, dans un latin plus commun. Mais le temps, les conflits, les nuisibles les ont plus ou moins détériorés ce qui rend leur examen difficile. Ajouter à cela une écriture qui ne facilite pas la tâche. Le registre le plus ancien connu est celui de Givry en Saône et Loire remontant jusqu’à l’année 1303. L’utilisation de noms de famille se stabilise vers le 13ème siècle. On existe par son prénom, celui de son père et parfois par le lieu de résidence. Avant cette période, témoignage, reconnaissance faciale venaient prouver l’identité d’une personne. Une affaire d’usurpation d’identité jugée par le Parlement de Toulouse en 1560, affaire Martin Guerre, démontre la difficulté de prouver son identité en l’absence de documents écrits (et encore aujourd’hui).

Jusqu’à la Révolution de 1789 on va distinguer les actes paroissiaux catholiques de ceux des protestants.

Le synode national protestant de la Rochelle de 1559 demande aux pasteurs protestants d’enregistrer baptêmes et mariages dans les registres tenus soit par les prêtres, soit par les pasteurs. En septembre 1664, un arrêt du Conseil du Roi (Louis XIV) demande officiellement aux pasteurs d’enregistrer l’état civil des protestants en tenant en double des registres. Mais après la Révocation de l’Edit de Nantes en 1685 qui interdit le culte protestant, des registres clandestins sont tenus par des pasteurs itinérants, d’où des pertes de documents.

Les « nouveaux convertis » sont enregistrés sur les registres catholiques. Ces différentes dispositions sont inégalement appliquées dans les paroisses. En plus des pertes, les collections de registres comportent également de nombreuses lacunes, dues aux conflits religieux survenus entre le XVIe et le XVIIIe siècle.

L’ordonnance de Saint Germain en Laye de mai 1667 demande que ces registres soient tenus en double exemplaires : un reste dans la paroisse sous la responsabilité du prêtre, l’autre est transmis au greffe de la juridiction royale. Mais il faudra attendre 1691 pour qu’un office de greffier spécialisé soit créé, office qui sera supprimé en 1717. Là aussi de nombreuses pertes. Il faudra attendre Louis XV et sa déclaration royale du 9 avril 1736 pour que la situation de ce greffe soit réglée et que les exemplaires des actes paroissiaux soit régulièrement tenu et archivé.

L'arrêt du Conseil du 12 juillet 1746 ordonne la tenue de deux registres séparés, les baptêmes et mariages d'une part, les sépultures de l'autre.

L’Edit de Tolérance du 28 novembre 1787 ou Edit du Roi (Louis XVI) autorise les protestants et les juifs à déclarer les naissances, mariages et décès soit devant le curé soit devant le juge. Les actes antérieurs seront légalisés par déclaration. Tout en précisant que la religion catholique demeure la religion officielle du royaume. Le  Parlement de Paris va enregistrer cet édit avec réticence le 29 janvier 1788.

La création de l’état civil date vraiment du décret du 20-25 septembre 1792, avec mise en place à compter du 1er janvier 1793. Les registres paroissiaux sont remis aux communes et les registres des greffes aux archives départementales.  Les registres sont tenus par le maire de la commune depuis lors. Sans référence à la religion des personnes concernées. Les publications de mariage (les bans) sont mentionnées jusqu’en 1927.

Les registres sont en double exemplaire, le premier pour la mairie, le second remis au greffe du tribunal civil (actuellement, le tribunal de grande instance) pour être versé à terme aux archives départementales.

Mariage Jules André Jandros chirurgien dentiste Toulouse avec Antoinette Brunet—30 janvier 1890—

 

Que va-t-on trouver dans ces actes ? Il nous faut bien noter que depuis le dernier siècle les actes sont bien moins bavards et c’est bien dommage …

Les actes de baptême, (à partir de 1792, actes de naissance) mentionnent date et noms, prénoms de l’enfant et des parents. Les noms et prénoms des parrains et marraines, parfois leur profession, leur lien de parenté avec l’enfant et ses parents. Des témoins parfois, ou si l’enfant a été oint par la matrone (ou sage-femme) si le bébé était en danger à sa naissance. Les signatures nous indiquent de par leur tracé, le degré d’instruction ou l’illettrisme des adultes. On peut suivre aussi au long des actes le nom des prêtres (et/ou du prieur si le village en a un, donc des biens nobles). On assiste dans certains villages de montagne à des baptêmes groupés : le prêtre venait à une date précise. A partir du 19ème siècle, on présentait l’enfant à l’officier d’état civil qui pouvait vérifier le genre du bébé ainsi que son âge approximatif. Dans nos colonnes, les dates des actes de naissance indiquent parfois un regroupement ce qui pouvait prêter à confusion dans les identifications et dans les familles.

Des annotations curieuses du curé qui rédige l’acte comme par exemple : « cet enfant né le 18 janvier de second jour de la lune font présager est qu’il sera abondant en lignée et qu’il coissa grand de corps en peu de temps».(archives municipales Vénérieu- Isère). 1692 (vint un mille si cent nonante deux)


Des annotations qui en disent long sur l’ambiance du moment : en 1699 toujours à Vénérieu, le prêtre baptise deux garçons avec les prénoms des grands-pères Samuel et Balthazar, prénoms qui sentent sérieusement le huguenot. Il précise dans l’acte qu’il s’agit des prénoms des grands-pères et que « le temps fera le reste »… Un prêtre généreux, lucide sur une époque de chasse aux protestants.

D’autres plus rigolotes : « 1650. — Fin du misérable mois d’octobre, qui ne cessa de pleuvoir, tellement que ceux qui vivront boiront du verjus, et que M. de Saint-Paul, notre bon curé, n’en sera pas plus exempt. »

Ces actes de baptême ou de naissance sont une page d’histoire à eux tout seuls !!

Les actes de mariages indiquent généralement les dates de naissance, les noms, les prénoms, profession des mariés, ceux de leurs parents, des témoins. Le décès avec date, lieu et métier d’un des parents. Les lieux de naissance ainsi que ceux de résidence sont mentionnés. Les dispenses, les procurations si les parents du fiancé(-ée) mineur (e) ne peuvent être sur place, et surtout les dates des publications (les bans) aux portes des églises pour d’éventuelles contestations. Le nom et l’adresse du notaire qui a rédigé le contrat de mariage s’il y en a un. Rappel d’un peu de droit civil à partir du 19ème siècle pour les mariages civils.

Des mentions nouvelles sont apparues au cours du 20ème siècle : divorce, annulation de mariage, séparation de corps, adoption, légitimation ou reconnaissance d’une filiation… Autant de signes évidents des modifications de notre société.

Les actes de décès seront moins bavards : nom, prénom, lieu du décès, date de naissance quand on la connait, les personnes qui ont découvert le décès et leur lien avec le décédé (voisin, parent, garde-champêtre…) , parfois les noms et prénoms de l’époux ou l’épouse.



Acte de décès de Jeanne Marguerite de Bargeton 1810-archives d'Uzès--

Depuis 1792, des tables décennales sont établies tous les 10 ans. Alphabétiques plus ou moins selon l’importance de la commune, elles sont subdivisées en trois parties : naissance, mariages, décès des personnes nées, mariées et décédées dans la commune. Avant cette date certains registres chaque année faisaient un récapitulatif des noms, prénoms et cotes.

 

Chez les notaires :

2-E-39/348 Jean Ménard notaire de Nîmes (archives départementales Nîmes)


Les actes notariés nous aident parfois bien plus. Pour les contrats de mariage et les testaments, la dot, les dons ou arrangements financiers, territoriaux, le nombre de témoins et leur classe sociale et leurs liens. Pendant longtemps les contrats de vente, d’apprentissage, de travaux,  étaient signés devant notaire : on y retrouve les arrangements financiers entre membres de la même famille, la classe sociale des acteurs, leurs métiers. Ventes de bétail, de denrées (vin, huile, blé..) réparations de maison, de moulin….. Des testaments nous indiquent les modalités des funérailles, nombres de messe, cérémonies, les craintes de maladie, d’épidémie, les fuites à l’étranger (on teste avant de partir),… Pendant la période de la Révocation de l’Edit de Nantes, on y retrouve la liste des biens et l’arrangement pour ne pas tout perdre (émancipation d’un enfant, vente plus ou moins fictive à un tiers…)

2-E-10/474 = Pierre Pellet notaire Nîmes

4 août 1621 = testament de demoiselle Jeanne DUPUI

dame de Montmoirac et autres, lieux détenue au

lit malade = veut être enseveli au cimetière

de l'église réformée de St-Cristol au même

lieu que- ses prédecesseurs honorablement selon

la forme accoutumée entre les çrestiens

reformés = aux pauvres de St-Cristol 100 livres

= k damoiselle Elisabeth et Suzanne de Trémolet

ses filles et de feu noble Jean-Pierre de

Trémolet sieur de Robiac son premier mari

à chacune 15.000 livre-s savoir 7000 1. de droits

paternels et 8000 1. pour les maternels y

compris légat de feu leur père et succession

des dlles Diane et Charlotte de Trémolet ses

autres filles décédée ab intestat et jusqu'à ce

nourries et entretenues sur ses biens selon,

leur qualité = à noble Odet Davessens sieur de

Montmoirac son mari fruits et usufruits de ses

biens pour en jouir jusqu'à ce que noble

Antoine--t-ernardin de Trémolet son fils soit

colloqué en mariage ou veuille vivre séparé cie

sond mari, mais ordonne que son mari puisse

jouir jusqu'en fin de ses jours pour son entreto

nement du présent chateau et ses dépendances

telles que son à présent ou de la métairie

appelée du Masrouge avec dépendances et de sa

grande viguière dans la juridiction de Montèzes

= lui légue aussi 3000 livres pour icelle consti

tuer et délivrer à l'une de ses filles comme

bon lui semblera et à ses autres, parents età ses; autres parents et lignagers 5 sols

héritier ledit noble Antoine-Bernardin de Trémolet

son fils = lui substitue ses f i l l e s . . — acte

au château de Montmoirac en chanbre de ladite

demoiselle testatrice où git malade en présence

de Mre Simon Olivier Cr du roi et juge d'Aiguë

-mortes, Mre Pascal de Salettes et Jean d'Astier

docteur en médecine de Sommières & Alés

Mre Anthoine Corbeau chirurgien, Etienne Duroas

apothicaire cl1 Alés, Jacques Barnier jeune et

Pierre Gibert, cl'Anduze, ladite te stat rie e n'

ayant pu signer en raison cie son indisposition

 

4 août 1621 = testament de noble Odet d'ÀVESSENS sgr

d'Aumont, de Montmoirac et autres lieux

habitant au château de Montmoirac y détenu au

lit malade - sépulture à St-Cristol =

aux pauvres 50 livres -= a dlle Elisabeth

de Treiomet 2000 livres ~ à dlle Suzanne de

Trémolet 1000 livres sommes a prendre sur

légat fait ci devant par son épouse -=

héritière demoiselle Jeanne Dupuy dame de

Montmoirac pour tous ses biens et droits qu'il

a audit Montmoirac et environ soient en réparations

, acquisitions ou autrements pour que

lesd biens et droits appartiennent à noble…..

 

(page de garde registre d'état civil 1816)

Pour les Nations unies, l'enregistrement de l'état civil est « l'enregistrement continu, permanent, obligatoire et universel des apparitions et des caractéristiques des évènements démographiques dans une population, selon les règles prévues par un décret ou par la législation, selon les conditions légales d'un pays. L'enregistrement de l'état civil vise principalement à établir des documents légaux. Ces données sont aussi une source principale sur des statistiques démographiques. La qualité de ces statistiques dépend d'un recensement complet, précis et mis à jour des évènements démographiques » 

 

L’état civil intéresse pas seulement les historiens mais aussi les politiques pour gérer un pays. Les principaux évènements démographiques doivent être connus. En 1979 l’Assemblée Générale des Nations Unies dans son article 16 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination impose aux pays d’établir un registre civil d’enregistrement des mariages.

 


Jean Escoffier publication de mariage ou ban 12/2/1722 Vénérieu—Catherine Morand ou Morel de l’Ile d’Abeau—Vénérieu Isère



Sources et pour en savoir plus : wikipédia.org - Gérard Noiriel, « L'identification des citoyens : Naissance de l'état civil républicain », Genèses. Sciences sociales et histoire, no 13,‎ 1993, p. 3-28 (DOI 10.3406/genes.1993.1196lire en ligne [archive])Article republié dans Gérard NoirielÉtat, nation et immigration : Vers une histoire du pouvoir, Paris, Belin, coll. « Socio-Histoires », 2001.----La France Pittoresque Mentions singulières figurant sur les anciens actes d’état civil (D’après « La Mosaïque », paru en 1878)-Publié / Mis à jour le LUNDI 5 MAI 2014, par REDACTION--- Archives municipales Uzès, Vénérieu Toulouse--archives  départementales du Gard---

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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