La Vitamine C :Le Scorbut à nouveau là
Après les fêtes de fin d'année, nous avons bien besoin de vitamines. Voici l'histoire de la vitamine C.
La vitamine C ou acide ascorbique a vaincu un des grands fléaux de l’humanité : le scorbut. Pourtant il revient dans certaines populations avec des carences alimentaires dues à la pauvreté mais aussi à notre mode de vie.
La vitamine C ou acide ascorbique a vaincu un des grands fléaux de l’humanité : le scorbut. Pourtant il revient dans certaines populations avec des carences alimentaires dues à la pauvreté mais aussi à notre mode de vie.
Ce nom évoque les
histoires de marins ; mais cette maladie sévissait aussi dans les régions
arides ou désertiques ainsi que dans nos campagnes. C'était la maladie des déshérités, souvent mortelle en elle-même, sinon par les maux qu'elle générait.
Joinville en 1249 sous le
roi St Louis nous décrit une maladie qui décime les rangs des croisés à la
bataille de Damiette. De même en 1498 l’équipage de Vasco de Gama est ravagé
par le même mal face aux côtes du Mozambique : 100 marins sur les 160 en
meurent.
Jacques Cartier en 1535
« découvre » le Canada. L’hiver est très froid, les deux navires sont
bloqués par les glaces. Les marins campent du début du mois de novembre 1535 à
fin avril 1536 à l’embouchure du fleuve St Laurent. Les hommes s’affaiblissent
de jour en jour, ils contractent ce que l’on appelait « la maladie des
marins ». Un, puis deux, puis 25 meurent sur les 100. On ne peut les
enterrer tant la terre est gelée. Jacques Cartier fait le serment d’aller à
Notre Dame de Rocamadour à son retour en France si la maladie recule. C’est
encore l’époque où l’on croit que les maladies sont des punitions de Dieu.
(https://www.atsenti.com/blogue/annedda-ultime-verdict Julie Laforest février 2017)
(https://www.atsenti.com/blogue/annedda-ultime-verdict Julie Laforest février 2017)
Un indien, Domagaya,
fils du chef iroquois Donnacona se
présente et propose un remède : une décoction de feuilles et d’écorce d’un
arbre « Anneda ». Il y ajoute de l’écorce de sapin et des épinettes
blanches des aiguilles. Les marins survivants en boivent tous les jours, et
miracle ils retrouvent la santé. L’anneda du nom que lui donne les indiens serait
le sapin baumier ou le cèdre blanc d’Amérique ou encore le pruche du Canada. Les
trois arbres servaient dans la pharmacopée des autochtones. Jacques Cartier en
a bien ramené des boutures mais sans susciter un grand intérêt. Par la suite on
parlera d’arbre de vie.
Dans les années 1610 le
chirurgien anglais Woodhall mentionne l’intérêt des citrons et des oranges dans
le traitement du scorbut. Puis vers 1670 Vernette dans son traité sur cette
maladie fait allusion à une possible carence qui déclencherait le scorbut. Il
faut attendre 1734 avec le Hollandais Bachstrom pour que l’on avance d’une manière
significative : il affirme que la maladie est due à l’absence de légumes
et de fruits dans l’alimentation.
En 1744 un médecin
de la marine anglaise James Lind conduit une expérimentation lors d’un voyage
de Gibraltar à Hyères pour tenter de confirmer l’hypothèse de Bachstrom. Il
embarque sur le navire le Salisbury à Gibraltar 12 malades scorbutiques au même
stade de la maladie : taches sur la peau, lésions buccales, tendance
paralysante…. Ils sont nourris de la même façon : bouillon de mouton
frais, pudding, biscuits bouillis, orge, raisins secs, riz, groseille rouge,
sagou et vin. Mais il assemble les malades deux par deux et leur distribue un
complément : le premier groupe a une pinte de cidre, le second 15 gouttes
d’élixir de vitriol trois fois par jour, le troisième 2 cuillerées de vinaigre
trois fois par jour, le quatrième une demi-pinte d’eau de mer, le cinquième
deux oranges et deux citrons, le sixième une noix de muscade d’un électuaire
recommandé par un chirurgien comprenant de l’ail, de la moutarde, du raifort, du
baume du Pêyrou et de la myrrhe.
Quinze jours de
traitement rigoureusement surveillé. Un seul groupe est guéri celui qui a eu
droit aux fruits. Lind avait prouvé que le jus de citron et d’orange
constituait un traitement efficace contre le scorbut qui n’était ni contagieux,
ni d’origine infectieuse, mais bien une maladie carentielle.
Mais il fallut du temps
pour que les médecins en particulier dans la marine acceptent cette conclusion.
Mac Bride était La référence à la cour d’Angleterre ; il avait écrit
des règles thérapeutiques sacro-saintes quelques années auparavant et il
n’était pas question de l’usage des jus de fruits pour lutter contre le scorbut.
D’autres médecins lui emboîtaient le pas comme Pringle, Hunter, pourtant
universitaires de renom. Ils s’appuyaient sur l’expérience du frère de Mac
Bride, navigateur aux Falkland aujourd’hui Malouines dont l’équipage ne
présentait pas de signe de scorbut bien que ne consommant pas de jus de fruits.
Peut-être à cause des nombreuses escales qui étaient l’occasion de manger des
fruits et des légumes ?
Enfin G Blanc en 1793
fait adopter par la marine anglaise l’utilisation du jus de fruits en guise de prévention
du scorbut. James Lind était mort depuis un an. Cette pratique restera secret
militaire pendant toute la période des guerres napoléoniennes. Les forces
françaises subiront les ravages de la maladie au contraire des marins anglais. La déroute de Trafalgar à cause de Lind et du scorbut ??
Il faudra un certain
temps pour comprendre l’efficacité indéniable des jus de fruits contre le
scorbut. En 1907 une expérience en Norvège sur un cobaye au régime carencé en
fruits et légumes : il guérit quand son régime alimentaire redevient
normal. Le scorbut est bien dû à une carence alimentaire.
En 1928 Szent-Gyorgi
isole l’acide hexuronique dans les capsules surrénales du cobaye et du singe,
puis en 1932, le même acide dans le jus de citron. Ce sera le prix Nobel pour
Szent-Gyorgi, Haworth, et Reichstein. Les expériences dès lors vont montrer que
c’est l’absence de cet acide qui est la cause du scorbut. On sait maintenant
que la vitamine C intervient dans bien d’autres secteurs, vieillissement,
cancer, maladies cardio-vasculaires, diabète…simplement pour la bonne humeur et
un certain confort.
Mais le scorbut oublié
réapparaît dans certaines populations, chez l’adulte comme chez l’enfant en
Europe et en particulier dans les pays développés. Les médecins ont parfois du
mal à le diagnostiquer, pensant l’époque de cette maladie révolue. Il faut dire
que les signes cliniques peuvent être variés et communs à bien d’autres
maladies : saignements de gencives, purpura, douleurs osseuses, anorexie,
anémie….. et baisse des défenses immunitaires. La maladie peut être fatale en
cas de retard de diagnostic ou en cas de traitement inapproprié.
Malnutrition, précarité
sociale mais aussi en présence d’une dénutrition chez des malades qui ne
consomment aucun agrume, aucun fruit, des symptômes qui doivent alerter.
Depuis 2016, 2017,2018 La Revue de Médecine Interne fait état de cas de
scorbut à Nice, Montpellier. Une patiente avec des troubles du comportement
alimentaire, anorexie et ablation partielle de l’estomac, purpura, douleurs
osseuses résistantes aux médicaments. Des SDF à Montpellier. Des personnes
âgées de plus de 75 ans à Rouen et à Reims en institution ou chez elles. Des
nourrissons nourris au lait sans vitamine…. Et que dire des sandwichs, des
handburgers avec une feuille de salade et parfois une rondelle de
tomate !! Au pays de la gastronomie, nous ne savons pas toujours nous
nourrir et nous vivons à cent à l’heure… Et la machine se dérègle !!
Le professeur de médecine montpellerien Jacques Mirouze (1921-1991) s’interrogeait
en 1987 sur la grandeur et la décadence de la vitamine C : »Grandeur …sans
hésitation, la preuve en est faite après des siècles d’égarement. Décadence…sûrement
pas puisque les plus grands biologistes et médecins discutent encore aujourd’hui
de sa place dans le confort de notre vie de tous les jours »…Nous n’avons
pas fini de parler de la Vitamine C !! Orange, cassis, poivrons, persil,
chou, et autres fruits et légumes… pleins de vitamine C à consommer sans
modération.
Sources : Jacques
Mathieu et
al., L'annedda :
l'arbre de vie, Québec, Éditions
du Septentrion, coll. « Cahiers
du Septentrion », 2009, 187 p. (IISBN9788-2-89448-591-0 OCLC 440241088--- www.ville.quebec.qc.ca/citoyens/patrimoine/toponymie/fiche.aspx?ldFiche=598 --- Professeur Jacque Mirouze de
l’Académie de Médecine Historia fév 1987 n)482p 64/68--- Emmanuel Bévillon, Jacques
Cartier, le scorbut et la bière de sapinette Yannick Romieux Revue d’Histoire
de la Pharmacie 1993 n)296 Persée internet-- Marc Gozlan 9/9/2018 www
LeMonde.fr/blog/realités biomedicales/Le-retour-du-scorbut-unemaladie-que-l’on-croyait-disparue/--
www.nutrivita.fr/histoire-vitamine-c/---www .diabètemagazine.fr/la-vitamine-c-et-votre-sante-clouer-le-bec-aux-idees-recues/
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