samedi 4 janvier 2020

Vitamine C Le Scorbut à nouveau là


La Vitamine C :Le Scorbut à nouveau là


Après les fêtes de fin d'année, nous avons bien besoin de vitamines. Voici l'histoire de la vitamine C.
La vitamine C ou acide ascorbique a vaincu un des grands fléaux de l’humanité : le scorbut. Pourtant il revient dans certaines populations avec des carences alimentaires dues à la pauvreté mais aussi à notre mode de vie.
Ce nom évoque les histoires de marins ; mais cette maladie sévissait aussi dans les régions arides ou désertiques ainsi que dans nos campagnes. C'était la maladie des déshérités, souvent mortelle en elle-même, sinon par les maux qu'elle générait.
Joinville en 1249 sous le roi St Louis nous décrit une maladie qui décime les rangs des croisés à la bataille de Damiette. De même en 1498 l’équipage de Vasco de Gama est ravagé par le même mal face aux côtes du Mozambique : 100 marins sur les 160 en meurent.
Jacques Cartier en 1535 « découvre » le Canada. L’hiver est très froid, les deux navires sont bloqués par les glaces. Les marins campent du début du mois de novembre 1535 à fin avril 1536 à l’embouchure du fleuve St Laurent. Les hommes s’affaiblissent de jour en jour, ils contractent ce que l’on appelait « la maladie des marins ». Un, puis deux, puis 25 meurent sur les 100. On ne peut les enterrer tant la terre est gelée. Jacques Cartier fait le serment d’aller à Notre Dame de Rocamadour à son retour en France si la maladie recule. C’est encore l’époque où l’on croit que les maladies sont des punitions de Dieu. 
(https://www.atsenti.com/blogue/annedda-ultime-verdict Julie Laforest février 2017)
 Un indien, Domagaya, fils du chef iroquois Donnacona se présente et propose un remède : une décoction de feuilles et d’écorce d’un arbre « Anneda ». Il y ajoute de l’écorce de sapin et des épinettes blanches des aiguilles. Les marins survivants en boivent tous les jours, et miracle ils retrouvent la santé. L’anneda du nom que lui donne les indiens serait le sapin baumier ou le cèdre blanc d’Amérique ou encore le pruche du Canada. Les trois arbres servaient dans la pharmacopée des autochtones. Jacques Cartier en a bien ramené des boutures mais sans susciter un grand intérêt. Par la suite on parlera d’arbre de vie.
Dans les années 1610 le chirurgien anglais Woodhall mentionne l’intérêt des citrons et des oranges dans le traitement du scorbut. Puis vers 1670 Vernette dans son traité sur cette maladie fait allusion à une possible carence qui déclencherait le scorbut. Il faut attendre 1734 avec le Hollandais Bachstrom pour que l’on avance d’une manière significative : il affirme que la maladie est due à l’absence de légumes et de fruits dans l’alimentation.

En 1744 un médecin de la marine anglaise James Lind conduit une expérimentation lors d’un voyage de Gibraltar à Hyères pour tenter de confirmer l’hypothèse de Bachstrom. Il embarque sur le navire le Salisbury à Gibraltar 12 malades scorbutiques au même stade de la maladie : taches sur la peau, lésions buccales, tendance paralysante…. Ils sont nourris de la même façon : bouillon de mouton frais, pudding, biscuits bouillis, orge, raisins secs, riz, groseille rouge, sagou et vin. Mais il assemble les malades deux par deux et leur distribue un complément  : le premier groupe a une pinte de cidre, le second 15 gouttes d’élixir de vitriol trois fois par jour, le troisième 2 cuillerées de vinaigre trois fois par jour, le quatrième une demi-pinte d’eau de mer, le cinquième deux oranges et deux citrons, le sixième une noix de muscade d’un électuaire recommandé par un chirurgien comprenant de l’ail, de la moutarde, du raifort, du baume du Pêyrou et de la myrrhe.
Quinze jours de traitement rigoureusement surveillé. Un seul groupe est guéri celui qui a eu droit aux fruits. Lind avait prouvé que le jus de citron et d’orange constituait un traitement efficace contre le scorbut qui n’était ni contagieux, ni d’origine infectieuse, mais bien une maladie carentielle.

Mais il fallut du temps pour que les médecins en particulier dans la marine acceptent cette conclusion. Mac Bride était La référence à la cour d’Angleterre ; il avait écrit des règles thérapeutiques sacro-saintes quelques années auparavant et il n’était pas question de l’usage des jus de fruits pour lutter contre le scorbut. D’autres médecins lui emboîtaient le pas comme Pringle, Hunter, pourtant universitaires de renom. Ils s’appuyaient sur l’expérience du frère de Mac Bride, navigateur aux Falkland aujourd’hui Malouines dont l’équipage ne présentait pas de signe de scorbut bien que ne consommant pas de jus de fruits. Peut-être à cause des nombreuses escales qui étaient l’occasion de manger des fruits et des légumes ?
Enfin G Blanc en 1793 fait adopter par la marine anglaise l’utilisation du jus de fruits en guise de prévention du scorbut. James Lind était mort depuis un an. Cette pratique restera secret militaire pendant toute la période des guerres napoléoniennes. Les forces françaises subiront les ravages de la maladie au contraire des marins anglais.  La déroute de Trafalgar à cause de Lind et du scorbut ??
Il faudra un certain temps pour comprendre l’efficacité indéniable des jus de fruits contre le scorbut. En 1907 une expérience en Norvège sur un cobaye au régime carencé en fruits et légumes : il guérit quand son régime alimentaire redevient normal. Le scorbut est bien dû à une carence alimentaire.
En 1928 Szent-Gyorgi isole l’acide hexuronique dans les capsules surrénales du cobaye et du singe, puis en 1932, le même acide dans le jus de citron. Ce sera le prix Nobel pour Szent-Gyorgi, Haworth, et Reichstein. Les expériences dès lors vont montrer que c’est l’absence de cet acide qui est la cause du scorbut. On sait maintenant que la vitamine C intervient dans bien d’autres secteurs, vieillissement, cancer, maladies cardio-vasculaires, diabète…simplement pour la bonne humeur et un certain confort.
Mais le scorbut oublié réapparaît dans certaines populations, chez l’adulte comme chez l’enfant en Europe et en particulier dans les pays développés. Les médecins ont parfois du mal à le diagnostiquer, pensant l’époque de cette maladie révolue. Il faut dire que les signes cliniques peuvent être variés et communs à bien d’autres maladies : saignements de gencives, purpura, douleurs osseuses, anorexie, anémie….. et baisse des défenses immunitaires. La maladie peut être fatale en cas de retard de diagnostic ou en cas de traitement inapproprié.
Malnutrition, précarité sociale mais aussi en présence d’une dénutrition chez des malades qui ne consomment aucun agrume, aucun fruit, des symptômes qui doivent alerter.
Depuis 2016, 2017,2018 La Revue de Médecine Interne fait état de cas de scorbut à Nice, Montpellier. Une patiente avec des troubles du comportement alimentaire, anorexie et ablation partielle de l’estomac, purpura, douleurs osseuses résistantes aux médicaments. Des SDF à Montpellier. Des personnes âgées de plus de 75 ans à Rouen et à Reims en institution ou chez elles. Des nourrissons nourris au lait sans vitamine…. Et que dire des sandwichs, des handburgers avec une feuille de salade et parfois une rondelle de tomate !! Au pays de la gastronomie, nous ne savons pas toujours nous nourrir et nous vivons à cent à l’heure… Et la machine se dérègle !!
Le professeur de médecine montpellerien Jacques Mirouze (1921-1991) s’interrogeait en 1987 sur la grandeur et la décadence de la vitamine C : »Grandeur …sans hésitation, la preuve en est faite après des siècles d’égarement. Décadence…sûrement pas puisque les plus grands biologistes et médecins discutent encore aujourd’hui de sa place dans le confort de notre vie de tous les jours »…Nous n’avons pas fini de parler de la Vitamine C !! Orange, cassis, poivrons, persil, chou, et autres fruits et légumes… pleins de vitamine C à consommer sans modération.

Sources : Jacques Mathieu et al., L'annedda : l'arbre de vie, Québec, Éditions du Septentrion, coll. « Cahiers du Septentrion », 2009, 187 p. (IISBN9788-2-89448-591-0 OCLC 440241088---  www.ville.quebec.qc.ca/citoyens/patrimoine/toponymie/fiche.aspx?ldFiche=598 --- Professeur Jacque Mirouze de l’Académie de Médecine Historia fév 1987 n)482p 64/68--- Emmanuel Bévillon, Jacques Cartier, le scorbut et la bière de sapinette Yannick Romieux Revue d’Histoire de la Pharmacie 1993 n)296 Persée internet--  Marc Gozlan 9/9/2018 www LeMonde.fr/blog/realités biomedicales/Le-retour-du-scorbut-unemaladie-que-l’on-croyait-disparue/-- www.nutrivita.fr/histoire-vitamine-c/---www .diabètemagazine.fr/la-vitamine-c-et-votre-sante-clouer-le-bec-aux-idees-recues/ ---

 




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