Conte de l’Uzège - La Nuit des Quatre Temps
Il y avait autrefois à Valabris une vieille qui vivait
richement. Elle se nommait Philomène, mais tout le monde l’appelait la Vieille.
Elle avait des monceaux de pièces d’or, dans des comportes et chaque matin sur
le seuil de sa porte elle les déversait au soleil pour qu’elles ne moisissent
pas. Peut-être aussi pour faire envie aux voisins.
Un matin, un jeune homme passa à cheval et lorsqu’il vit
toutes ces pièces, il demanda
- - Hé ! que faites-vous donc là, la
vieille ?
- - Vieille, vieille, il y en a de plus vieilles que
moi. Et beaucoup de jeunes qui voudraient être à ma place.
- - Vous avez
raison. Mais qu’est-ce que vous répandez au soleil ?
- - Vous le
voyez bien, je remue mes pièces d’or pour qu’elles ne moisissent pas.
-
- Si vous
vouliez me les donner, ce n’est pas moi qui les laisserais moisir ! J’en
ferai bon usage, croyez-moi !!
- - Je vous
les donnerais bien, mais avant il faut que l’on se marie.
- - Eh bien marions-nous ; je viendrai vous
chercher la nuit des quatre temps
Philomène avait une nièce, jeune et jolie mais pauvre, qui
lui servait de domestique.. Un soir la vieille lui demanda :
- - Va voir le temps qu’il fait
- - La lune
brille dans le ciel, ma tante.
- -Va-t’en au lit, ce soir n’est pas mon soir.
Une autre fois la vieille redemanda : - Va voir le
temps qu’il fait.
La nièce alla à la fenêtre :
- - Il fait des éclairs, ça va tonner.
-
- Va-t’en
au lit, ce soir n’est pas mon soir.
Un autre soir, encore, la vieille demanda le temps qu’il
faisait :
- Il tonne, il fait des éclairs, il vente, et
il pleut.
- - Petite nièce , ce soir est mon soir. Va donc me
chercher mes belles chaussures.
La vieille et sa petite nièce sortirent
dans la nuit. Des lumières luisaient au loin.
- -C’est mon fiancé qui vient me chercher, dit
Philomène
Elles allèrent à la rencontre des lumières, mais elles se
rendirent bien vite compte que c’étaient les yeux de loups, des loups affamés
qui sautèrent sur la vieille.
Derrière venait le fiancé sur son cheval. Il commanda à ses
loups
- -Tout doux il y en aura bien assez pour
tous !
Il prit la nièce et l’installa sur son cheval, tandis que
cric ! crac ! les loups dévoraient la vieille. Et il ne resta plus
rien d’elle.
Le fiancé et la nièce se marièrent et ils ne laissèrent pas
moisir les belles pièces d’or !!
Sources : Michel Cosem
Contes Traditionnels du Languedoc édit Milan 1995 ISBN 2-86726-990-3–
adaptation Adrien Castanet- Gravure Loup Astrid de La Forest gravure au carborundum
sur Arches 400gr internet -
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