dimanche 12 novembre 2017

Le Crime des Midis -

Le Crime des Midis – LaGarde-Dieuze août 1914


Le dimanche 2 août 1914 l’ordre de mobilisation est affiché dans tous les villages et villes de France. Les gardes-champêtres ont sillonné les rues pour annoncer la nouvelle. La mobilisation n’est pas la guerre, mais elle n’est pas loin… Le 4 les hommes de chez nous, munis de leur feuille de route rejoignent Alès, Privas, Nîmes; Uzès, Pont St Esprit… Les novices et ceux qui ont déjà effectué leur service militaire depuis trois ans. L’anxiété est de mise quoique qu’en dise la légende du « Tous à Berlin » claironnée par des foules en délire !. Les sous-préfets s’inquiètent de tentatives de mutilations, de suicides, jusqu’à un par jour.

Pendant la guerre de 1914-18, le 15ème Corps (dans la Seconde Armée) regroupait les régiments du Sud de la France, du Gard, Var, Corse, Nice etc, composés au début des hostilités de soldats de 20 à 33 ans..
Uzès
L’infanterie venait d’Antibes, Marseille, Nîmes, Aix, l’artillerie de Bastia, Orange, Nîmes, Alès, Pont-St-Esprit, Privas…Les hussards de Tarascon, de Marseille…. Les hommes avaient rejoint la Lorraine début août. Le bataillon d’Uzès partit d’Avignon le 5 août 1914 à 22h 25 avec une préparation militaire plus que succincte. Les trains  embarquaient les hommes, Avignon à 17h25, Alès à 20h25, Nîmes à 21h25, ….Les rumeurs disaient que la guerre durera 15 jours, un mois, deux mois, un parcours de santé ! On fait des photos avant de partir.

  
(Nîmes camp des Garrigues- Massillan)
Laissons parler les hommes : « Tout le long du voyage, à toutes les gares, à tous les arrêts, c’était plein de femmes, de jeunes filles nous donnant du vin, de la grenadine pour nous désaltérer car il faisait très chaud dans ces wagons. » « Dans les gares où le train s’arrête, beaucoup de volontaires (jeunes filles en particulier) nous donnent à boire, nous offrent des médailles etc. Au fur et à mesure que nous avançons, on sent plus d’inquiétude chez les civils.»
« Nous avons fait un long voyage dont à tous les arrêts du train les gens nous distribuaient du vin, des liqueurs, des fruits, etc., mais ne restez point étonnée si je ne vous dis pas le pays où je me trouve, je ne puis pas vous le dire, c’est un secret. » « A Contrexéville, des élégantes distribuent aux artilleurs des bonbons, des cigarettes, des boissons hygiéniques. « 
Les hommes du 15ème ont reçu le baptême du feu du 10 au 16 août lors de la bataille de Lagarde. Plus de 460 morts, 690 blessés, 928 disparus… Deux bataillons et deux régiments de cavalerie presque anéantis.  L’ennemi enregistre un peu moins de 300 tués. Tous ces chiffres sont une estimation en se basant sur le nombre de tombes. Les Allemands semblaient battre en retraite, attirant nos troupes dans la plaine de Dieuze qu’ils avaient préparée.
Lagarde
                                                 
Le 10 août les soldats allemands sont dans le village de Lagarde, les français près de Xures. Le secteur est calme. Les effectifs de l’ennemi sont incertains, peut-être deux compagnies. Le commandant français décide de prendre Lagarde : la bataille commence à 11 h, à 19h 15 le feu cesse et les soldats français entrent dans le village.
Le 11, vers 8h 30 un détachement ennemi avance et les premiers obus sont tirés. Nos
artilleurs se font tuer sur place. La rue est balayée par une grêle de balles et d’obus ; les hommes tombent, nombreux, d’autres se dispersent, s’abritent…
Le gardois Adolphe Roussel 24 ans et le vauclusien Louis Ribaud 25 ans sont nos premiers « morts pour la France, » sept jours après leur incorporation.
Jusqu’à 14 h c’est un repli sanglant. Le bilan est lourd d’autant plus que la conquête de Lagarde n’avait aucun intérêt stratégique. Une réflexion d’un officier corroborée par un lieutenant du 20è Corps qui sera lourde de conséquences : « ils se sont enfuis comme des péteux » !! Le gouvernement et la presse pourtant communiquent : « le village de Lagarde, situé en territoire annexé, a été enlevé à la baïonnette avec un élan admirable, les Allemands ne résistent décidemment pas à l’arme blanche… « . Les journalistes ne savent plus sur quel pied danser. L’Illustration du 15 août 1914(n°3729) reprend la journée du 13 août : « par contre un échec : deux bataillons français qui s’étaient emparé du village de La Garde en sont chassés par une contre-attaque et se retirent à Xures… ». La vérité est toujours la première victime d’une guerre.
Mais lisons des lettres de soldats :
14 août :
 « À 6 heures 10 une grande clameur retentit, nous venons de franchir la frontière, nous mettons baïonnette au canon et en avant sous une pluie d’obus et de balles, les camarades commencent à tomber ; le feu devient de plus en plus horrible, nous ne rigolons plus, mais nous avançons toujours, nous entendons sonner la charge, nous nous mettons à l’abri derrière un talus et nous avançons par bonds, les balles sifflent sans discontinuer et les shrapnels éclatent à hauteur de la ceinture. Enfin nous quittons cet abri et nous partons en avant, nous faisons un petit abri avec le sac et de la terre devant et nous attendons, enfin à 8 heures, on n’entend plus rien. Nous nous rassemblons et nous quittons ce lieu de carnage. Dans la nuit on marchait sur les morts, on entendait les blessés qui criaient, d’autres nous suppliaient de les achever, d’autres de les faire boire, nous n’avions pas une goutte d’eau ».
« Des fantassins ennemis, nul n’en vit en ce jour du 14, pas plus que d’artilleurs. D’où partaient ces balles qui fauchaient nos rangs ? Où s’étaient enfouies ces batteries dont les obus creusaient des entonnoirs de huit mètres de largeur et réduisaient en bouillie les malheureux qu’ils atteignaient ? Rien. On ne voyait rien »
15 août : « On va attaquer, c’est sûr l’adjudant nous l’a dit et on entend le canon…on va devoir y aller ! On avance vers Morhange, Benestroff, Dieuze. Ça canarde de partout obus, balles des mitrailleuses et déjà des collègues sont tombés ; le sergent brame comme un veau juste à côté de moi et il faut monter la colline d’où les Boches sont en ce moment pour les enlever. »
16 août : « Le bataillon est porté du 14 au 16 août vers la frontière qu’il traverse le 16, au nord du village de La Garde, sur les talons d’un ennemi qui refuse le combat C’est en ce point qu’il voit la première fois les traces douloureuses des combats précédents, les premiers cadavres, les premières ruines, les premières tombes. » « Nous trouvons des armes, des effets abandonnés, une batterie d’artillerie presque complètement détruite, dont par mesure d’hygiène sans doute on a brûlé les chevaux morts. Qui ? Dans un champ de betteraves, je découvre la première tombe sur laquelle on a mis bien en évidence les écussons (19e artillerie) drôle d’impression ! Par la suite on découvre d’autres tombes (Français et Allemands). » « Buissoncourt. Dimanche 16 août. Quoi te dire? Des lois draconiennes mais évidemment nécessaires nous ont été dictées. Nous devons envoyer des lettres ouvertes sans indiquer ni l’endroit où nous sommes, ni ce que nous faisons, etc. etc. »
Il fait une chaleur accablante, une odeur de sang et de chair décomposée monte du sol. « Le 17 nous traversons le champ de bataille situé entre Xures, village français et Lagarde, village allemand... cependant la tristesse est apparente sur le visage de tout le monde car tout autour de nous on voit une multitude de tombes ou plutôt des petits monticules de terre remués à la hâte avec une petite croix de bois sur laquelle est écrit un ou plusieurs noms de français ou d'allemands »
« Dans Lagarde même, amas d’effets armes, selles, caissons d’artillerie démolis, cadavres dans le canal, même des blessés français que les Allemands partis la veille, n’ont pu amener. Ces blessés déclarent avoir été bien soignés, mais que en se retirant les Allemands ont déclaré qu’ils reviendraient dans trois jours… »
 « Dans tous les cas ne vous faîtes pas tant de mauvais sang. Moi, je vis dans le bon espoir de retourner maintenant mais je ne puis rien assurer, nous sommes plusieurs de l’environ et nous avons tous fait les mêmes réflexions. Ce n’est pas de notre faute et on ne peut rien n’y faire, il n’y a qu’à faire son devoir le mieux possible… »


Le Gard et le Vaucluse sont les départements les plus touchés pendant cette période : 74 gardois tués soit 14% des effectifs, 70 morts du Vaucluse soit 13,23% des effectifs de ce département.
En Allemagne, gravures, cartes postales illustrent la férocité de l’assaut.

Et puis le 19 août à 4 h du matin c’est l’enfer de Dieuze qui commence.
Castelnau commandant depuis le 8 août de la Seconde Armée lance ses troupes malgré les informations plus que douteuses, soutenant que nos soldats n’ont rien devant eux. La route de Berlin est libre. Mais ils vont être accueillis par un feu d’artillerie lourde. A9h les obus pleuvent arrêtant la progression. « On les regardait tomber avec curiosité car c’est la première fois qu’on les voit et de si près… Le soir nous transportons beaucoup de blessés » (journal d’un du 55ème). Alexis Calliès capitaine d’artillerie Carnets de Guerre écrit : «  nous ne parvenons pas à découvrir les batteries ennemies, …pluie d’obus de gros calibre, surtout du 105..nous nous sommes heurtés à une véritable position fortifiée ; l’artillerie allemande a repéré toutes les crêtes, tous les plis du terrain….  nos batteries aussitôt découvertes par un avion sont soumises sans réglage à un arrosage systématique… ».
Pendant 10 h c’est une pluie de fer. Sous le bombardement « on se plaque au sol, le barda sur la tête, bondissant en avant comme on peut »…  « le sang coule partout, partout des morts, des blessés qui hurlent et la mitraille traîtresse taille et retaille dans cette chair déjà pantelante ou à l’agonie « (carnet d’un du 112ème)
20 août : « A l’aube, nous rejoignons notre régiment  près des marais de Bensdorf. C’est alors que commence l’attaque la plus violente qui soit ; le 15e Corps, déclenché tout entier, avance malgré les canons, les mitrailleuses et les mausers, Les hommes ayant de l’eau et de la boue jusqu’à la ceinture – beaucoup se sont noyés en cet endroit. Vers 10 heures du matin, la situation, qui semblait nous sourire jusque-là, est singulièrement changée ; le canon ennemi crache à 3 300 mètres seulement et nous n’avons aucun abri alors que l’armée boche est solidement retranchée sur des hauteurs constituant des points stratégiques admirables. Vers 11 heures, les bataillons de chasseurs qui donnaient l’assaut commencent à fléchir avec d’effroyables pertes. Ordre est donné de se replier sur Dieuze ; alors commence une retraite sur l’arrière sous les 210 allemands, les mitrailleuses de l’infanterie, cependant que, la rage au cœur, des clairons sonnent encore la charge. »
Toute la nuit, un feu incessant. Le 20 août à 5h 30 dans un épais brouillard, c’est la contre-attaque allemande. Mitraillettes, canonnades, attaques à la baïonnette, les champs sont jonchés de taches rouges de nos soldats, pantalons garance et sang. Vers 11 h nos bataillons de chasseurs fléchissent avec des pertes effroyables. Plus tard on parlera d’holocauste. Sous le feu des mitrailleuses, des shrapnells et des marmites, sur ordre, nous battons en retraite. « À 50 mètres se trouvait un canal, tout le monde y saute dedans, nous avions de l’eau jusqu’à la ceinture beaucoup s’y sont noyés, après nous ne pouvions pas marcher, les pantalons et la capote étaient collés aux jambes et les balles pleuvaient de plus en plus. »

On déplace un bataillon, mais n’en avertit pas les autres, on se tire dessus. On bat en retraite, mais ici un peloton n’est pas informé et est abandonné à lui-même, à une mort certaine. Là l’ordre de repli n’arrive pas, les agents de liaison ont péri en chemin. Toute la plaine de Dieuze est sous le feu de l’ennemi. On meurt après 16 jours d’une guerre qui devait être un chemin tranquille et qui se révèle dantesque, inimaginable. On soigne sommairement les blessés, laissés sur le terrain, au mieux capturés par l’ennemi, au pire agonisant plusieurs jours sur le champ de bataille. On se noie en traversant le canal des Salines… Les morts ne sont pas enterrés, les obus s’en chargeront.
En désespoir de cause deux bataillons s’accrochent sur deux mamelons se sacrifiant pour nous permettre une retraite jusqu’à la nuit tombée. Les trains, les voitures de l’état-major, le matériel ajoutent du désordre au désordre. « Nous errâmes longtemps dans Dieuze avec mon camarade, à la recherche du bataillon. Mais, quand nous le retrouvâmes, il errait encore plus que nous. Il faut reconnaître qu’un sublime désordre régnait dans la petite ville lorraine : fantassins, artilleurs traînant leurs encombrants caissons, trains de combat, et trains régimentaires, brillantes automobiles de nos brillants états-majors, tout cela se rencontrait, se croisait, ne sachant trop que faire ni où aller. Cela sentait sinon la retraite, du moins un repli précipité.»

En deux jours nous avons perdu 9800 hommes et 180 officiers (relevé du commandant Espinasse du 15ème). Depuis le 10 août, au 15ème Corps près de 13000 hommes sont morts, disparus, blessés. Ils avaient parfois quitté leurs oliviers et leurs champs pour la première fois de leur vie.
Vu du côté allemand
A 5 heures et demie du matin, l’ordre est donné d’attaquer les positions françaises à l’ouest de Dieuze. Les Français avaient une position avancée dans les bois de Monack au nord-ouest de Vergaville. En dépit des obstacles (l’avoine très haute en était un dans les champs), nos mitrailleuses eurent bientôt raison de ces résistances. L’attaque à la baïonnette fut ordonnée contre l’aile droite. Les Français durent regagner leurs positions principales d’où leur artillerie tâchait de nous arrêter, mais en vain. Nous avancions toujours. Les champs jonchés de cadavres français montrent l’acharnement de la lutte. Notre artillerie prit l’ennemi sous ses feux. A gauche, les Français se replient sur Dieuze. Le chemin de Vergaville à Guebling était jonché de pantalons rouges. » 

Notre voisine, la commune de St Quentin la Poterie, va perdre le 20 août un jeune homme de 22 ans, Elie Sablayrolles, fils de pasteur. Il est porté disparu et semble avoir été enterré à Glesdorf, tombe 6. Blessé, prisonnier ? Entre août et septembre ce village va perdre 12 hommes sur les 72 morts pendant toute la guerre ! 

A Paris, le ministre de la guerre Messimy et son comparse le sénateur journaliste Gervais pondent un article ignoble paru dans le journal Le Matin le 24 août : les troupes de « l’aimable Provence » sont accusées d’avoir lâché pied devant l’ennemi. "Les troupes de l'aimable Provence ont été prises d'un subit affolement. L'aveu public de leur impardonnable faiblesse s'ajoutera à la rigueur des châtiments militaires. « tout le fruit d’une habile combinaison stratégique longuement préparée ( ?) a été momentanément compromis…la défaillance d’une partie du 15ème Corps a entrainé la retraite sur toute la ligne ». Joffre va faire « fonctionner ferme les Conseils de guerre ».  Clémenceau en rajoute une couche : « notre 15ème Corps a cédé à un moment de panique et s’est enfui en désordre....on connaît la nature impressionnable des méridionauxce jour-là ils ont déplorablement failli…qu’on les mène au plus fort du feu… ». (Le Clémenceau fondateur de la Société des Droits de l’Homme, journaliste à l’Aurore, sénateur en 1902 du Var, celui qui défend Dreyfus….)

Dans les ministères parisiens, il était impensable que le commandement ait commis des erreurs, la faute ne pouvait incomber qu’aux exécutants. Il fallait un lampiste, le 15ème Corps fera l’affaire. Et pourtant, les historiens de l’art militaire décrivent une « ineptie stratégique, une incongruité de la tactique étant donné l’exiguïté des lieux », (Lagarde-Dieuze est dans une vallée avec canal et rivière), des liaisons de communication inexistantes ou dérisoires, une artillerie mal employée, une « suffisance » qui conduit à mépriser les renseignements de la population, une évaluation fausse des forces en présence…et même « une puérilité et un fanatisme offensif d’officiers impatiens de démontrer leur fougue!! » Le général Weygand écrira « la région avait été signalée par les habitants comme fortement organisée et occupée – le terrain est truqué (cad préparé par nos adversaires pour les tirs d’artillerie) » ; Castelnau à son fils : « l’offensive qu’on m’a imposée est un défi au bon sens ». Les Allemands avaient préparé techniquement, scientifiquement l’offensive, tranchées, batteries enterrées, troupes sur les hauteurs, soldats habillés de gris donc peu visibles, terrains transformés en marécage pour nos soldats… Nous, nous étions surtout armés de notre romantisme, de notre vanité et de théories militaires largement dépassées en particulier la doctrine de l’offensive à outrance là où il aurait fallu une artillerie efficace.
Le Gouvernement publie un démenti, le journal Le Matin reçoit un blâme. Mais le mal est fait. Des parlementaires, des maires s’insurgent, demandent respect pour les soldats provençaux. Le journal est interdit dans plusieurs communes. « Si des faiblesses ou une panique se sont produites, il faudrait encore savoir où, comment et pourquoi ! Et il nous est interdit de rien vérifier, de rien discuter. Quant aux sanctions, elles relèvent de l’armée et non d’un appel intempestif à une opinion publique troublée et prodigieusement mal renseignée. ». La presse locale prend fait et cause pour les Midis : « Un marchand de fromages du nom de Gervais, sénateur pour la honte du Sénat, s’est livré contre le Midi aux plus basses diffamations qui se puissent écrire. Gervais est traité « honte du sénat et fumier de la presse »
Mais pourquoi s’en prendre uniquement au 15ème ? Sur tout le front, on se replie. Partout la doctrine de l’offensive à outrance a démontré son inefficacité. En 1907, lors des manifestations viticoles, les « Midis » avaient mis la crosse en l’air refusant de tirer sur leurs compatriotes. Est-ce un commencement d’explication ?  Ils sont aussi nos premières « gueules cassées », nos premiers morts sans sépulture, situations que l’on n’avait pas imaginées. Et maintenant on les traite d’anarchistes, de lâches, d’antipatriotes.
Insultes, vexations, refus de soins, renvois en premières lignes, rien ne sera épargné aux « Midis ». « pas de lâches à l’hôpital !! » martelaient ceux qui n’avaient jamais sauté dans une tranchée, ni vécu une seule heure sous les obus. C’est un déchainement de violence écrite, verbale, physique contre les « Midis ». Plusieurs soldats du 15ème seront même fusillés pour abandon de poste ou mutilation sans procès, ni interrogatoires préalables.
« Quand un blessé (du 15è)va à Verdun on ne le soigne presque pas, il est mal vu, on le regarde comme un chien » - « Ce sont deux blessés du XVe corps qui vous écrivent pour vous demander, vous supplier de faire savoir à tous que les soldats du Midi font tout leur devoir… dites cela et vous ne ferez pas seulement plaisir, vous rendrez service, vous rendrez justice à toute une province… car nous rencontrons encore des gens du Nord qui « rigolent » sur notre passage. » - « Vous êtes bons à recevoir des balles dans le cul et à lever la crosse en l’air. »…… « Ah ! Ces gens-là, ces hommes de la crosse en l’air qui sous prétexte du soleil du Midi qui mûrit leurs idées sont la plupart des révolutionnaires anarchistes et socialistes antipatriotes et si nous avions eu à faire qu’à eux, il y a longtemps que nous serions sous la botte allemande»
« Nos troupes se sont vaillamment conduites à part les régiments du Midi… ces gens de T… n’ont que du bagou. Des exemples vont être faits et les hommes convaincus d’abandon de leurs postes, fusillés. Cet exemple est nécessaire et sera salutaire…; heureusement que nous ne sommes pas tous de T… et de Tarascon. Mais ces régiments vont être doublement punis car ils vont être remis aux premières lignes. Je n’ai jamais eu beaucoup de confiance dans ces gens du Midi qui nous gouvernent depuis 30 ans ; j’en ai de moins en moins. « 
La légende du « crime des Midis » venait de naître. Une réhabilitation tardive et discrète, des généraux et un ministre limogés dès le 26 août, et une stratégie différente seront une sorte de reconnaissance des erreurs de commandement et de l’intégrité du 15ème. Et les pantalons garance vont disparaître, l'équipement du soldat sera revu. Après la guerre des hommages au 15è seront déployés dans de nombreuses communes du Sud.
 « La fédération de l’arrondissement de Toulon invite chaque union locale des poilus à organiser dans la commune, le jour des fêtes officielles de la Victoire une manifestation publique pour confondre les calomniateurs du 15e Corps, en déclarant simplement mais avec fierté légitime, que nous tenons à honorer les gens de chez nous, les poilus de Provence qui ont vengé héroïquement l’honneur de notre pays, des imputations mensongères de quelques politiqueurs. La calomnie est l’arme des envieux !  La fédération engage chaque union des poilus à réclamer et à obtenir du comité local ou de la municipalité une inscription lapidaire sur le monument projeté à la mémoire des tués à l’ennemi pour transmettre à la postérité le souvenir des actes mémorables des hommes du 15e corps » Mais la rumeur sera tenace et poursuivra nos Midis.


Une pensée pour tous ceux qui continueront à mourir des suites de cette guerre, les blessés, les invalides, tous ceux qui continueront à entendre dans leur tête les obus tomber bien après l'armistice et qui auront bien du mal à se réhabituer à la vie familiale et civile.....
Caserne Nîmes

Pont St Esprit baraquement militaire du Champ de Mars 1914
Sources : à partir de lettres, carnets de soldats et officiers – Maurice MistreRimbaud « Dieuze 19-20 1914 »- « Des Républicains diffamés pour l’exemple »2004 – La Légende Noire du 15è corps 2008  - « Les Provençaux de la Grande Guerre ou l’affaire du 15è Corps » Thomas Grobon Histoire du Patrimoine- Journal de Martha Bergerfurth – Colonel Simonet le 2è bataillon du 40è au combat de Lagarde  - Lieutenant Ficonnetti Mémoires 3è batterie du 19è RA  - Camille Morel Histoire d’un soldat de 1914  - Archives municipales Lagarde – Travaux historiques divers - Couradou de  Vallabrix Mars 2012 médiathèque ou site internet - photos internet et collections privées.



Petit dictionnaire à acheter pour nos soldats - BNF


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.