Le Fort de Brescou-Sauvetage
Des
rencontres insolites au large d’Agde, dans les eaux du fort de Brescou. En août
2017 un pingouin nage près du fort sans se soucier des bateaux, Des requins-renard
péchés autour du fort parfois dans à
peine 10 mètres d’eau, comme celui-ci, 130 kg environ. (midi libre 1/7/2013)
Ce
fort a été sélectionné pour le Loto Patrimoine de Juillet. Nous ne pouvons que
nous en réjouir. La ville d’Agde, des associations œuvrent déjà à sa
restauration, mais il y a fort à faire. En 2016 une souscription a été lancée à
toutes les bonnes volontés, Agglomération, commerçants, touristes, Fondations du
patrimoine, particuliers, entreprises locales, banques..…. Une association Les Amis du Fort de Brescou œuvre depuis 2012. Une
première enveloppe de fonds va permettre de commencer les travaux qui
s’annoncent colossaux et d'une durée de cinq à dix ans selon les moyens.
Ce témoin
de l’art militaire et de la fortification languedocienne est inscrit au titre
des Monuments Historiques depuis le 19 mai 1996.
Cette
construction se trouve sur un îlot à environ un demi mille marin de l’entrée de
port Richelieu, le Cap d’Agde et à un peu moins de trois milles de l’embouchure
de la rivière Hérault.. On estime l’îlot vieux de 740 000 ans issu d’une
coulée de lave volcanique, d’une superficie de 0,5 hectares. Une position
stratégique. Le cardinal de Richelieu rêva un temps que ce fort serait l’entrée
du grand port sur la Méditerranée. Il aurait voulu le relier à la terre par une
digue qui ne sera jamais achevée, le cardinal décédant avant.
(La cour du Fort : rampe d'accès aux citernes,
tour du fanal et hangar d'artillerie)
Pour les
Languedociens, ce fort remplissait fort mal sa fonction d’éclairage de la mer :
un dicton populaire pour qualifier un lieu peu éclairé (ou parfois une
personne) « semblan dins Brescou… »
Le
fort abrite deux phares, l’un de la fin du 16ème siècle, en fait une
tour de pierres noires, un fanal où l’on allumait autrefois un feu pour avertir
les navires du danger des rochers. Le second est construit en 1836 sur les
ruines d’une grosse tour à l’ouest de l’île. Neuf mètres de haut au début, puis
un rehaussement à 11,20 m en 1901 pour augmenter la portée de la lanterne.
Aujourd’hui, le phare de 12m de couleur blanche et rouge s’élève à 22 m
au-dessus des eaux et sa portée est de 13 milles marins.
-Geneanet-Agde - AGDE :
Intérieur du Fort de Brescou en1908
En
1586, la région est en pleine guerre de religion et les côtes sont pillées
régulièrement par des pirates. On craint que le rocher ne serve de point
d’appui aux troupes espagnoles.
Le
vicomte Guillaume de Joyeuse s’empare de l’îlot pour y construire un fort assez
grand pour abriter une garnison d’une soixantaine d’hommes et deux frégates qui
contrôleront la mer sous le commandement de Gaspard Dot
dit »Barberoussette » pirate et surtout opportuniste de son état. A
ne pas confondre avec les frères Barberousse, dont le grand Khaireddine que
nous avons vu précédemment ((1466-1546), maître de la
flotte Ottomane qui, au XVe siècle, symbolisait la piraterie, et dont le
nom inspirait l'effroi à tout ce qui flottait en mer et jusqu'aux ports soumis
à ses incursions- voir sur ce blog Les Barberousse 30/01/2019).
Gaspard Dot avait une petite barbe rousse,
d’où le nom de Barberoussette. Lui et ses compagnons sévissaient sur le
littoral entre Sète et Agde. C'était avant tout des naufrageurs. Ils allumaient
des feux sur le Mont St Clair afin d’attirer les bateaux. Les capitaines se
croyaient guidés par le phare d’Agde et s’écrasaient sur les rochers de la
corniche de Sète. Les pirates cachés sur la plage du Lazaret n’avaient plus
qu’à attaquer, piller et trucider les marins, et ils vidaient les bateaux de
leurs marchandises. Il parait d’ailleurs que le butin de Barberoussette est
caché sur le Mont St Clair ou dans les criques de la côte.
(Tour du fanal et hangar d'artillerie)
A
l’orée du 17ème siècle, en deux mots, nous devons faire une
distinction entre pirate et corsaire. Les deux termes étaient synonymes jusqu’au
Moyen-Age. Le pirate était un brigand qui courait les mers pour s’emparer des
cargaisons des bateaux, pour son compte avec une redevance, un pourcentage à
redonner à celui (rois, sultans, seigneurs…) qui acceptait de l’héberger lui,
ses compagnons, ses bateaux, ou même celui qui lui donnait des navires. Le
pirate tue, pille, viole sans distinction de nationalité. Son risque est la
mort dans un naufrage ou par la potence.
La piraterie existe depuis que les hommes ont pris la mer pour commercer,
transporter des marchandises, des hommes qui très vite pourront se vendre comme
esclaves. Nos rois, François 1er, Henri IV, les ministres, les papes
se sont servi comme d’autres souverains des pirates qui n’étaient pas regardant
sur les moyens, et qui étaient des marins à toute(s) épreuve(s). Barberoussette
était bien un pirate.
A
l’époque romaine, les pirates alimentent le marché aux esclaves de Rome. Mais
ils pillent aussi les villes côtières et ils seront déclarés ennemis,
crucifiés, décapités. A la chute de l’Empire romain, la piraterie redémarre de
plus belle.
Le
corsaire est un navigateur civil qui en temps de guerre est au service de son
pays. Son navire est alors armé et une lettre de marque lui donne le droit
d’attaquer les navires ennemis. Il coupe les voies d’approvisionnements de l’ennemi
tout en s’enrichissant par une part sur les prises réalisées. Mais parfois les
corsaires ne sont pas informés de la fin de la guerre et continuent leurs
activités. Ils leur arrivent aussi d’attaquer des navires marchands et ne
laissent pas de témoins. Nous voyons que l’espace entre pirate et corsaire est
fluctuant et bien mince. Agde a eu un corsaire du Roi Louis XIV, Claude
Terrisse, brillant, suffisamment désintéressé pour faire don à sa mort d’une
grande partie de sa fortune aux pauvres de la ville.
Ce
fort sera modifié en 1604-1605, puis en 1610. Nous ne connaissons pas les plans
de ce premier fort, probablement construction assez rudimentaire, une ou deux
tours de guet, des murailles….
Le fort de Brescou a d’abord un rôle défensif. Mais le duc Henri II de Montmorency
en guerre contre Richelieu, en vient à bout en 1632 peu avant que sonne la fin
des guerres de religion dont celle de Rohan avec la paix d’Alès. Le fort est
rasé sur ordre du roi Louis XIII par lettres patentes. Montmorency est capturé
le 1er septembre 1632, l’ordre de destruction du fort date du 1er
octobre de la même année. Les travaux de destruction traînent jusqu’en 1634. Le
capitaine des gardes de Montmorency continua à tenir le fort même après la
défaite et l’exécution du duc.
Le
fort est reconstruit vers 1680 probablement d’après les plans de Vauban ou d’un
de ses ingénieurs ou élèves. Il est devenu un poste de veille contre les
invasions anglaises. Il devient prison d’Etat au 18ème siècle
jusqu’au milieu du 19ème. Il reste terrain militaire jusqu’en 1889. De
nombreux aménagements le rendent plus habitable. Il est déclassé par les armées
et le service des Ponts et Chaussées le récupère. Les troupes nazies l’ont
occupé quelques temps de fin 1942 à mi 1944 en l’intégrant au Südwall. Aujourd’hui
la commune d’Agde en est propriétaire. Le phare moderne guide les navigateurs avec un gardien
jusqu’au milieu du 20ème siècle. .Il habitait sur l’île avec sa famille dans une maison au
fond de la cour, face à l’entrée du fort. A partir de 1989 le phare
sera totalement automatisé.
Brescou-prison
hébergea 22 huguenots cévenols en 1687. La Révocation de l’Edit de Nantes de
1685 était passée par là. Des protestants du Vivarais dont le père de Marie
Durand, Etienne Durand y seront internés. D’autres prisonniers, des escrocs,
des voleurs, des libertins, ou simplement des personnes dont les familles
voulaient se débarrasser. Peu de prisonniers, onze en seize ans pour les
« raisons d’Etat », trois en vingt ans pour ceux de « droit
commun ». La discipline était acceptable, mais promiscuité, climat, manque
d’hygiène rendaient la vie dans le fort assez rude. Les prisonniers pour la
plupart n’étaient enfermés que le soir et le jour circulaient librement sur les
remparts. On rêvait d’évasion avec des côtes à 1500m du fort. Entre 1757 et
1773, les archives comptabilisent 25 évasions ou tentatives.
Les
Anglais lors des guerres de Louis XIV ou celles de la Révolution de 1789 ont
semble-t-il ignoré le fort Brescou. Cependant pour éviter tout débarquement
surprise sur l’île, une garnison y est installée avec un gouverneur, un
lieutenant du roi, un major… et en temps de paix une compagnie d’invalides
d’une quarantaine d’hommes, remplacée en période de troubles par des compagnies
de Milice venant d’autres villes. La mission était de surveiller les navires
anglais et de maintenir la liberté de pêche. Des postes de signaux avec chacun
un matelot et deux soldats étaient dispersés sur la côte, dont le fort de
Brescou, l’embouchure de l’Hérault, sur le mont Saint-Loup, le Cap d’Agde…
Un
aumônier pour les nourritures spirituelles, un cantinier, sa femme et ses
enfants habitaient aussi le fort. Ce dernier cuisinait deux menus : un
pour les soldats et les prisonniers les plus pauvres, et l’autre pour les
officiers et les détenus aisés.
(Murs des anciennes cellules de la prison du
Fort)
La
mission de prison continue dans le temps. En 1841 le maréchal Soult ministre de
la Guerre décide que les prisonniers algériens seront traités comme prisonniers
de guerre et le fort est utilisé comme lieu d’incarcération. En décembre 1851,
il enfermera les opposants au coup d’Etat.
Maintenant,
ce site est un lieu privilégié pour la plongée sous-marine. Au 18ème
siècle, langoustes, daurades, loups et murènes régnaient sur ces profondeurs.
Ses coquillages étaient fort prisés par les collectionneurs. Sur la plage du fort, les familles se retrouvaient le dimanche pour des "sardinades" jusqu'à ce que le bâtiment soit jugé trop dangereux. Peut-être un jour ces beaux jours reviendront-ils !!
11 mars 2019-héliportage de matériaux sur le site du Fort Brescou - Mairie Agde / AERO /Michel Desnos - Par Stephane Pocher France Bleu Hérault
.Sources : Charles Bost, Les Prédicants protestants des Cévennes et
du bas Languedoc, tome I, p. 212, Les Presses du Languedoc, 2001, ( ISBN2-85998-246-9). -- Archives
nationales conservent, sous la cote CP/F/14/17516/2 [archive], neuf planches de dix-neuf figures du phare de fort de
Brescou datant de 1833 à 1905. -- Notice
no PA34000001 [archive], base
Mérimée, ministère français de la Culture--
G. de Sarret de Coussergues, Une
prison d'État au milieu du XVIIIe siècle,
le fort de Brescou en Languedoc, - Les Presses Continentales - Paris -
1950.—wikimedia.communs--/www.midilibre.fr/2015/12/04/un-appel-aux-habitants-pour-sauver-le-fort-brescou,1252425.php
11
mars 2019-héliportage de matériaux sur le site
du Fort Brescou - Mairie Agde / AERO /Michel Desnos - Par Stephane Pocher France Bleu Hérault
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