Tennis, football,
rugby, golf… autrefois .
Le mot
« sport » vient de l’ancien français « desport », que l’on
peut traduire par « amusement », et même de « se
déporter », signifiant s’amuser.
Ce jour de carnaval 1496,
des jeunes hommes d’Uzès et de St Quentin se retrouvent dans le pré pour
« souller ». Ils ne sont pas là pour se saouler, mais pour faire du
sport. Le jeune Louis de Vaux se retrouve avec le nez et des côtes cassés.
La soule, ancêtre du football
et du rugby, est un jeu très populaire, pratiqué dès le Moyen-Age en France (premières
archives connues 1147). Ce jeu apparaît un peu près au même moment en
Angleterre peut-être arrivé lors de la conquête normande. Ou bien des restes de
l’invasion franque ou romaine. Ce sport sera pratiqué chez nous jusqu’à son
interdiction au 19ème siècle avec une renaissance en Normandie et
lors de reconstitutions historiques un peu partout, mais avec des règles plus
normales. Dans le Béarn on s’y adonne encore pour certaines fêtes, mais avec
moins de risques. Peut-être revenu en Occitanie avec la guerre de Cent Ans et
le Prince Noir. On retrouve dans le passé, des jeux de soule, ou qui y
ressemblent, un peu partout dans le monde.
Soule au XIVe
siècle
Cathédrale de Gloucester
Cathédrale de Gloucester
Pendant Carême, les
journées sont longues pour les hommes. Ce jeu propose de les occuper :
deux équipes qui doivent porter le ballon dans un lieu précis du camp ennemi.
Les règles sont simples : tous les coups sont permis sauf des gestes qui
tuent. C’est un sport très violent. En 1855 un témoin raconte : … « le spectateur ne voit qu’une masse
confuse d’individus qui semblent avoir pris à tâche de s’écraser
mutuellement ; ceux qui sont hors du cercle tâchent de s’emparer par la
force de ceux qui sont au centre… ces efforts individuels, sans cesse
renouvelés, impriment à la masse un mouvement des plus singuliers, tantôt elle
se dirige vers la droite, tantôt elle marche vers la gauche ; on dirait un
animal fantastique à mille pattes….un combattant tombe, la lutte continue sur
son corps, il se relève tout pâle, quelquefois meurtri et ensanglanté… ».
Le ballon est cette
soule, ou « choule, cholle » selon les régions. Il est en bois ou en
cuir bourré de foin, de son ou de mousse. Le but à atteindre est un mur, une
porte, une mare selon les lieux, parfois une flèche ou une lance plantée dans le
sol. Les équipes sont composées d’hommes de deux paroisses rivales, ou des
célibataires contre des hommes mariés. Les spectateurs sont nombreux, hurlent
comme dans nos stades, rient, plaisantent. On parie un peu malgré le curé ou le
chanoine qui regarde le jeu et qui parfois prie au coup d’envoi pour une
équipe. Les jeunes nobles n’hésitent pas non plus à se mêler aux joueurs. Il en
va de l’affirmation de leur virilité, de leur astuce, de leur force au combat !. Parfois le
jeu dégénère et les spectateurs rentrent en lice pour aider leur équipe ou
punir l’équipe adverse. (Dans nos stades on n'a rien inventé !!)
Régulièrement, les religieux
et le roi du moment s’inquiètent de ces pratiques qui divertissent un peu trop
le peuple et l’éloigne de ses devoirs spirituels. On doit s’amuser utile. En
1369 Le roi Charles V interdit tous les jeux dont la « soule qui n’ont point
d’utilité pour exercer nos dits sujets au maniement des armes ». Une
amende de 40 sous importante pour l’époque est prévue. On ne doit s’adonner
qu’au tir à l’arc ou à l’arbalète.
La soule : »Vous
n’êtes point un tâte-poule, un jodelet, un ingnorant. Peu vous importe que la
soule vous froisse le dos rudement ; vous regardez, Basta, comme un rien
une ampoule, parce que vous savez l’art de faire l’onguent ».
Louis de Chapat 1777 vol 1
p48 La Clincaille du Parnasse Amsterdam
Pour sourire nous pouvons écouter et voir le clip de la chanson Lo Nhacar par le groupe Lo Nadau (yahoo) qui nous parle de rugby entre le Pays Basque et le Béarn !
Un
autre jeu est très en vogue en Bretagne et dans le Nord avant de nous revenir d’Angleterre :
le golf. Paysans et artisans de nos terroirs jouaient régulièrement au golf.
Pas de terrains ad hoc, des rues, des routes de campagne suffisaient. Ils
jouaient avec une petite balle appelée « gouret ou goret »
c’est-à-dire le cochonnet. Ce jeu sera appelé « la crosse » du nom du
bâton crochu qui permet de pousser le cochonnet vers le but. Là aussi c’est un
jeu violent, énergique qui occasionne hématomes, parfois tibias fracturés…. Au
16ème siècle, le manche de la crosse s’allonge et devient un marteau
à long manche : un maillet ou mail qui donne son nom au jeu et au terrain
où on pratique. Nos villes se dotent de promenades ou de quartiers « du
Mail ». Nîmes, Uzès avaient leurs mails. Le jeu devient essentiellement
urbain et élitiste. Dans le jeu de mail, on chasse la boule devant soi avec le
maillet dans une direction convenue jusqu’à un but déterminé. Le long de
l’emplacement choisi, on place de grosses pierres dites pierres de touche,
qui représentent autant de buts. Mme de
Sévigné nous raconte ses parties de mail. La boule est en racine de buis
conservée dans un sac de linge sale pour qu’elle garde une certaine humidité.
Les joueurs calculent les angles d’attaque selon le vent, la qualité du
terrain, la température… Le mail est nettement moins violent que la crosse. Une
boule de crosse ou de mail célèbre La Bernarde du nom du grand joueur Bernard.
La boule qui assure de la victoire nous dit la pub !!Elle pulvérise les
prix dans une vente aux enchères.
Au 18ème siècle, les Français se moquent
des Anglais qui se passionnent pour les exercices physiques. Nous oublions chez
nous le « mail » pendant que les Anglais le transforment en
hockey !! Plus tard le golf revient mais reste pour nous un sport réservé à
une élite.
Le tennis vient lui aussi
de loin. Il a pour ancêtre le jeu de « paulme », jeu de paume. Au
départ il s’agit de renvoyer une balle appelée « esteuf » avec la
paume de la main. Le mot français de « tennis » vient du cri lancé
par le serveur à son adversaire lorsqu’il lui lance la balle :
« Tenez ! » qui devient Outre-Manche
« tenetz » puis tennis.
Les esteuf sont en bon cuir, « bien
garnis et de bonne bourre, sans y mettre sablon, craie, batue (rognure de
métaux), chaux, son, rebut de peau, sciure, cendre, mousse, pouldre ou
terre ». Cette énumération laisse entendre que les fraudes sont fréquentes
et qu’un règlement est vraiment le bienvenu ! Les joueurs s’amusent mais
aiment gagner !! Les règles sont différentes selon les pays. La raquette
(battoir) n’apparait qu’au 16ème siècle, avec grillage, cordes ou
parchemin tendu. Ce dernier matériau provient souvent de vieux manuscrits dont
on pleure aujourd’hui la disparition. Les religieuses de Fontevrault ont ainsi
vendu des pages de Tite-Live à un faiseur de battoir.
A la fin du 18ème
siècle, le jeu de paume évolue. On commence à faire des concours locaux. La
« longue paume » est plutôt réservée au peuple, paysans, artisans,
pratiquée en extérieur et reste traditionnelle avec bâtons, battoirs à
blé, palmes… ; la « courte paume » avec raquette et balle se pratique
en salle, même sans adversaire contre un mur. Plus tard la courte donnera le
« court de tennis ». Même les curés vont jouer au jeu de paume bien
qu’en haut lieu on pense que c’est un gaspillage de temps et d’énergie. Les
règles changent selon les lieux. La longue se pratique dans les champs, dans
les rues ou sur les places des villages. La courte dans des espaces couverts
souvent construits. Les villes, les châteaux ont leur salle de jeu de
paume : les tripots, du verbe « triper » rebondir. Uzès avait
jusqu’à la Révolution une salle de jeu de paume dans une auberge. Paris au 18ème
siècle compte pas moins de 114 salles. A la Révolution les jeux de paume sont
détruits et l’ensemble des jeux est réglementé pour des raisons d’ordre public.
En voyage en France en
1598, l’anglais Dallington est étonné par la passion des Français pour ce
jeu : « le pays est semé de
jeux de paume, les Français naissent avec une raquette à la main !! »
Jeu de Paume Versailles |
Nous avons des champions
comme maintenant. Le marquis de Rivarol sous le règne de Louis XIV, avec une
jambe en moins, rivalise et bat les plus forts. Huit cents livres de pension
sont alloués au sieur Jourdain pour jouer contre les princes et leur servir la
balle !!
On retrouve le jeu de paume,
surtout la longue, en Prusse, Hollande, Angleterre. Des rencontres sont peu à
peu organisées entre Anglais et Français. Les règles et le matériel français
sont exportés, même la façon de compter les points et de nommer les coups (l’œuf
pour le 0 par exemple). On parle français en jeu de paume.
Dans la deuxième moitié
du 19ème siècle, on assiste peu à peu à la disparition du jeu de
paume et à l’universalisation du tennis en particulier dans l’empire
britannique. Des tournois internationaux sont mis en place.
Aux JO de Paris en 1900, une réaction des sportifs
français avec un concours de tennis. Mais après ces jeux olympiques, le jeu de
paume disparaît dans notre pays définitivement à quelques exceptions près.
La pelote basque cousine du jeu de
paume ?
En football, en golf, en tennis ce sont
Messieurs les Français qui ont lancé les premiers. On ne nous refera pas le
coup de Fontenoy !!
Sources : www.france-pittoresque.com/spip.php?article5771
--Paul Dietschy, Histoire du
football, Perrin, 2010,
p. 22 -- Jean-Louis
Beaucourt Ainsi vivaient nos
ancêtres édit Robert Laffont 1988---/fr.wiktionary.org/wiki/soule
--wikipedia.orgphotos--archives
départementales du Gard j65—J F Baruelle
Quand dimanche était jour de fête
1982 édit Balland---Jean bazal L’Ancêtre
de la soule 1939 Guide ethnographique ATPJeux de force et d’adresse N
Tremaud---
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