(Brueghel Les jeux d’enfants –wikipédia)
Trop de jours
fériés ?
Actuellement
nous comptons 10 ou 11 jours fériés, fêtes religieuses ou civiles, définis par
le code du travail. (selon que l’on compte le lundi de Pentecôte ou non).
Certains départements en ont un peu plus.(Moselle, du Bas-Rhin, du Haut-Rhin, Martinique, Guadeloupe, Wallis-et-Futuna, Guyane, La Réunion, Polynésie Française) . Parfois
mélange des genres comme le 15 août sous les Premier Empire et le Second correspondait à la fois aux fêtes de l'Assomption et de la Saint-Napoléon (encore maintenant pour les nostalgiques bonapartistes).
Faut-il travailler pour
vivre, pour s’enrichir ? Au Moyen-Age, la réponse de l’Eglise était
claire : il faut travailler pour échapper à la tentation ! Dieu a été
le premier artisan, construisant le monde en six jours. Les sculptures, les
chapiteaux des églises et des cathédrales nous le rappellent, véritables livres
ouverts. Le travail est donc le salut, six jours de labeur et un jour de repos
bien mérité. Mais en réalité, ce n’était pas si simple. Les jours étaient souvent
assortis d’obligations, d’interdits pour les villageois et campagnards. Un
planning qui va permettre au pouvoir du
moment de bien tenir en main le peuple, décider de ses jours, de ses loisirs, pouvoir religieux et pouvoir laïc.
(mois du calendrier révolutionnaire Fabre d'Eglantine)
Les lundi et mardi ont
été pendant longtemps choisis pour célébrer les mariages, donc pas toujours
travaillés. Les lundi dans les villes ouvrières du 18è-19ème siècles seront longtemps jours chômés comme à Paris ou Lille. Comme par hasard, les boutiques
des « marchands de vin » ou cafetiers étaient ouverts ce jour-là. « L’opium
du peuple » n’était pas seulement la religion !!
Le
mercredi était autrefois jour de jeûne en souvenir de Judas qui vend le Christ
ce jour-là. Le jeudi pour les païens, Grecs, Romains, Gaulois était jour de
fête, donc chômé. L’Eglise catholique a eu bien du mal à imposer le dimanche au
lieu du jeudi pour ne pas travailler. Au VIème siècle le concile de Narbonne
menace d’excommunication ceux qui continuent de fêter le jeudi. Au Moyen-Age ce
jour devient le « jour le plus gras de la semaine », moment de bien
manger quand on le peut, et jour de récréation, ce qu’il restera pendant longtemps
pour les petits écoliers de ma génération.
Le vendredi est le jour
de jeûne et de deuil en souvenir de la mort du Christ. Pas de lessive ce
jour-là, de bain, pas de cuisson du pain. On évite tout ce qui peut engager
l’avenir : semailles, moissons, mettre à couver les œufs, baptiser un
enfant….
Le samedi, jour de la
Vierge, les femmes doivent s’abstenir de tout travail ce qui est plus facile à
dire qu’à faire. Après l’angélus du soir elles ne doivent pas filer la laine
sous peine d’errer après leur mort leur rouet à la main. Le samedi est le jour
où les âmes délivrées du purgatoire montent au ciel.
Le dimanche doit
être obligatoirement chômé. Théoriquement interdit de vendre, de se
divertir… Plusieurs offices sont proposés dans la journée pour ceux qui auraient
une excuse pour ne pas assister à l’un d’entre eux. Au 17ème siècle,
les absents à la messe sont parfois contraints à payer une amende. Le nombre de
messes clandestines sous la Révolution de 1789 tend à prouver que chacun trouve son content dans la messe dominicale. C’est l’opportunité de retrouver la
famille, les voisins, on s’endimanche. Les ragots, les nouvelles, parfois les
affaires sont l’occasion. Sous l’Ancien Régime, le curé lisait les informations
du monde, ordonnances royales, les victoires, l’arrivée d’une comète, les
mariages…. La plupart des ouailles ne lisaient pas le français ou ne le
comprenaient pas et le prêtre se chargeait de la traduction. Des nouvelles
aussi de la paroisse, les sépultures, les bans des mariages, les réprimandes à
l’égard d’un tel, les ressources de l’Eglise…. En quelle sorte le journal
télévisé de l’époque !! Le calendrier révolutionnaire va essayer de
supprimer le dimanche, mais les habitudes demeurent. Bonaparte en 1802 rétablit
la messe dominicale ; une loi de 1814 la réhabilite.
One360.eu- Jeu de Soule en Bretagne
Du Moyen-Age au 19ème
siècle cette règle de jour férié du dimanche est respectée surtout à la
campagne. La pression de l’Eglise y est plus forte. En ville en 1893, autour de
27% d’ouvriers travaillent le dimanche : c’est un jour
« ouvrable », jour où l’on œuvre. L’absentéisme à la messe
dominicale sera surtout le fait des hommes au 19ème siècle. Mais
tout le monde se retrouve pour les grandes fêtes, Pâques, Toussaint, les fêtes
votives…. Seul le prêtre peut permettre de travailler pour terminer une moisson
le dimanche après-midi.
A cela s’ajoutent les
fêtes catholiques, les rogations, celles
du folklore ou des traditions, celles des saints patrons du village ou de la
paroisse, celles des métiers, de la corporation…., toutes chômées. Même les chevaux ne sont pas
attelés pour la Saint Eloi, les bœufs pour la Saint-Blaise. Plus les saints
locaux objets de pèlerinage ou de pardon, les bénédictions des cultures….
La Fontaine fait dire à
son savetier : « Le mal est que dans l’an s’entremêlent des jours
qu’il faut chômer : on nous ruine en fêtes. L’une fait tort à l’autre, et
monsieur le curé de quelque nouveau saint charge toujours son prône ».
www.moyenagepassion.com/index.php/tag/danse-ancienne/
On compte dans le diocèse
d’Angers au 17ème siècle 53 fêtes obligatoires, dans celui de La
Rochelle 43. Au 18ème siècle, on procède à une réduction drastique
de ces jours fériés à des fins économiques ; mais ce nombre reste encore
important. A Poitiers, on passe de 50 à 27 jours chômés. Pendant ces fêtes, les
jeux, la danse y sont étroitement encadrés soit par l’Eglise, soit par des
confréries. Processions religieuses, commémorations rituelles, événements corporatistes….
A la révolution de 1789, le pouvoir politique récupère ces moments pour en
faire des événements très encadrés qui entretiennent la flamme révolutionnaire.
Mais trop dirigés, la population va s’en détourner pour retrouver les carnavals
à l’ancienne.
Chaque année, nos
ancêtres bénéficiaient de l’équivalent de trois à quatre semaines de jours
fériés, mais non payés !
C’est la loi du 18
germinal An X (2avril 1802) qui explique la notion de « fête
légale » : « aucune fête à l’exception du dimanche ne peut être
fixée sans la permission du gouvernement ». Les différents gouvernements
depuis tendent à limiter le nombre de fêtes chômées pour des raisons
économiques.
Sources :
Jean-Louis Beaucarnot Ainis vivaient nos
Ancêtres édit Robert
Laffont1989—wikipédia.org – calendrier révolutionnaire Fabre d’Eglantine et André Thouin, jardinier du Jardin des Plantes du Muséum national
d'histoire naturelle.---
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