(entrée du château comtal photo Luc
Joubert)
Les légendes sont là pour
alléger la rugosité de l’histoire. Elles ont aussi un rôle pédagogique, moral. La
légende de Dame Carcasse ou Carcas en fait partie. Elle nous raconte la force
des femmes, leur ingéniosité. Par sa jugeote, cette femme apporte paix et
fertilité à sa ville. Amazone occitane, elle en impose aux hommes, même aux
plus forts. Elle se conduit en chef politique, militaire. Et puis que la loi du
plus fort n’est pas toujours la meilleure !! D’autres femmes ont montré le
bon exemple en Occitanie, Ermessende de Carcassonne (975-1058), comtesse de
Barcelone et de Gérone, dont le sceau était en deux langues : arabe et
latin, Almodis de la Marche (1020-1071), Ermengarde vicomtesse de Narbonne qui
participe à de nombreuses opérations militaires contre les arabes en 1148….dont
la prise de Tortosa. Elles ont été chantées par les troubadours. Mais revenons
à Dame Carcas.
En
ce temps-là Carcassonne était assiégée par l’armée de Charlemagne. La ville
était aux mains des Sarrasins dirigés par le roi Balaac (ou Ballac). En fait
Charlemagne avait 17 ans (en 759) et n’était pas encore empereur. C’est
probablement son père Pépin le Bref qui assiège la ville. Mais Pépin coincé
entre son père Charles Martel et son fils Charlemagne ne fait pas le poids dans
la légende épique à conter. Et puis Dame Carcas en devient plus grande avec
Charlemagne dans l’histoire qui suit.
Le
roi Balaac est capturé dès le début du siège. Charlemagne lui demande de
devenir son vassal, de livrer la ville et de devenir chrétien. Le roi refuse.
Il est aussitôt exécuté. Sa veuve Dame Carcas se retrouve à la tête de la ville
et doit la défendre. Le siège va durer cinq ans.
Elle va d’abord remplacer les soldats morts par des mannequins de paille dans chaque tour et cachée derrière eux avec quelques habitants tire des flèches pour faire croire que la garnison de la ville est encore importante. Mais au début de la sixième année, l’eau et la nourriture se mirent à manquer. L’inventaire des réserves laissait entendre que c’était le commencement de la fin.. Mais la ville étant sarrasine donc musulmane, la plupart des habitants ne mangeaient pas de porc et donc il restait encore quelques cochons. Quand l’avant-dernier sac de blé fut mangé, elle sacrifia le dernier animal, une truie nourrie avec le dernier sac de blé. Elle précipita l’animal par-dessus les remparts. La truie en s’écrasant laissa échapper de son ventre le blé. Les assiégeants eurent l’illusion que la ville avait encore beaucoup de nourriture, puisqu’on pouvait gaspiller un porc et un sac de blé. Découragée l’armée de Charlemagne leva le siège.
Elle va d’abord remplacer les soldats morts par des mannequins de paille dans chaque tour et cachée derrière eux avec quelques habitants tire des flèches pour faire croire que la garnison de la ville est encore importante. Mais au début de la sixième année, l’eau et la nourriture se mirent à manquer. L’inventaire des réserves laissait entendre que c’était le commencement de la fin.. Mais la ville étant sarrasine donc musulmane, la plupart des habitants ne mangeaient pas de porc et donc il restait encore quelques cochons. Quand l’avant-dernier sac de blé fut mangé, elle sacrifia le dernier animal, une truie nourrie avec le dernier sac de blé. Elle précipita l’animal par-dessus les remparts. La truie en s’écrasant laissa échapper de son ventre le blé. Les assiégeants eurent l’illusion que la ville avait encore beaucoup de nourriture, puisqu’on pouvait gaspiller un porc et un sac de blé. Découragée l’armée de Charlemagne leva le siège.
Alors Dame Carcas, Grande Dame, sonna le cor pour rappeler Charlemagne. Pour certains conteurs, elle fait sonner toutes les cloches de la ville. Peut-être fait-elle les deux.
Elle
ouvrit les portes à l’empereur, et au passage de celui-ci une tour s’abaissa
par miracle pour le saluer. En hommage au courage de la Dame, l’empereur
baptisa la ville Carcassonne (Carcas sonne). La dame fut elle aussi baptisée et
mariée à un comte franc qui administra la ville. De ce couple descendraient les
seigneurs chrétiens de Carcassonne.
(Dame
Carcas sonne le cor et remet les clefs de la ville à Charlemage. Illustration
de Christian Jaumes « le Manuscrit enluminé de la légende de dame Carcas
2019)
(wikipedia.org—Pinpin own work -14juillet2007--(Multi-license with GFDL and Creative Commons CC-BY 2.5)
Dame Carcas,
statufiée : ceci est une copie, l’authentique est au château comtal depuis
1997. Probablement réalisée vers 1538 pour le passage de la sœur de François
1er Marguerite d’Angoulême, reine de Navarre. Les poètes avaient comparé
Marguerite à dame Carcas. Des marguerites ornent les manches de son habit. Les
consuls et les habitants de la ville espéraient son soutien dans la défense de
leurs privilèges contestés par la Ville basse de Carcassonne. Une inscription
en latin SVM, "je suis Carcas". La statue a été réalisée à la hâte ; une
clef de voûte en remploi pour le visage, le buste sculpté pour l’occasion. Plus
tard, une vasque en guise de couronne. Sous le roi Henri III, la statue est
englobée dans une porte de la cité, porte détruite en 1900 lors de
l’édification du pont-levis dans le cadre des travaux de restauration de la
ville.
(le
château vu de l’intérieur de la Cité- les hourds en bois au faite du rempart et
des tours)
Carcassonne la belle Cité, sera maintes fois restaurée, remaniée. Sur la route d’Espagne, les rois vont s’intéresser de près à la cité. Louis VIII qui améliore le système de défense en particulier la Barbacane d’Aude. Son fils Saint-Louis qui conçoit le deuxième rempart, commençant par faire déblayer la colline en rasant les faubourgs….L’entrée se fera dorénavant par la barbacane St Louis. Lors de la guerre entre Philippe le Hardi et l’Espagne la cité devient la place centrale des opérations. La Porte Narbonnaise revue, la tour du Trésor, les courtines voisines, le rempart intérieur reconstruit, des tours rehaussées, les lices creusées… Les travaux sont ingénieux, on met à profit ce que l’on a appris lors des croisades. Le roi vint les inspecter en 1285. Philippe le Bel s’occupa de l’église Saint-Nazaire : le transept et le chœur devaient être restaurés. Des architectes du Nord s’en chargèrent et ces parties nouvelles seront en style gothique d’Ile-de-France en vigueur.
Il semble que cette
restauration sera la dernière marquante avant celle de Viollet-le-Duc au 19ème
siècle. Le traité des Pyrénées de 1659 rattache le Roussillon au royaume et la
cité n’a plus le même rôle stratégique. Au 17ème siècle la Ville
Basse (habitations en dehors de la forteresse) se développe, activité drapière,
commerces….. En 1745 l’évêque s’établit dans la Ville Basse et délaisse la Cité.
Petit à petit les fortifications vont servir de carrière pour les habitants de
la Ville Basse. La Cité va renaître au 19ème siècle, silhouette qui
raconte une Histoire tourmentée, parfois obscure, une histoire d’hommes et de
femmes.
Vue plongeante sur les défenses de la Porte
Narbonnaise. Porte qui donne accès à la cité ; à notre avis, la plus
belle, la plus imposante, avec un système de défense complexe et complet. Seule
la porte d’Aude peut rivaliser avec elle.
(La montée de l’Aude –photo Luc
Joubert)
La Tour du Vieulas : Miracle ? En fait les tours de l’enceinte romaine de la ville ont des fondations insuffisantes et se sont pratiquement toutes inclinées. (photo Gauthier Langlois)
(photo Luc Joubert)
Le
château comtal est l’œuvre de Bernard Aton Trencavel, du 12ème
siècle. Trencavel, qui tranche bien, tout un programme. Nous retrouverons les
Trencavel lors de la croisade contre les Albigeois. Le château était une
véritable forteresse intérieure, hautes murailles, petitesses des ouvertures.
Les remparts, la Cité pouvaient être pris, le château pouvait résister
longtemps. Le chemin de ronde des remparts s’arrêtait devant les murs abrupts
du château. Du côté de la Cité, il était défendu par une grande barbacane, un
large fossé enjambé par un petit pont et deux tours immenses. Les hourds
surplombaient le pied des murs.
Carcassonne
n’a pas attendu Dame Carcas pour exister. Un oppidum fortifié le Carcaso était
mentionné par Pline l’Ancien « Carcaso Volcarum Tectosage ». Les
Volques Tectosages arrivent dans la région vers 300 av Jc. Ils exploitent la
mine d’or de Salsigne. Les Romains intègrent Carcassonne à la colonie
Narbonnaise vers 122 av notre ère, mais circulent déjà depuis longtemps car
l’endroit est un carrefour commercial important. Avec eux la ville devient la
colonie Julia Carcaso. Les premiers remparts datent probablement du 3ème
siècle de notre ère. Après les Romains, les Wisigoths, les Francs, les Arabes
avec le wali Ambiza…..puis à nouveau les Francs et les comtes carolingiens.
Ainsi va l’Histoire !!
(A
voir aussi dans la Ville Basse les plafonds peints du 15ème siècle de
la bastide Saint-Louis de Carcassonne)
Sources :
François Grimal et Luc Joubert (photos) Cité de Carcassonne éditeur Caisse Nationale des Monuments
Historiques 1966---Carcassonne plus de 6000 ans d’histoire in Histoire de l’Antiquité
à nos Jours Hors-série n°56 juillet 2019 Jean Vaquer, Michel Passelac, Charles
Peytavie, Gauthier Langlois, Dominique Baudreu, Frédéric Loppe, Hugo Chatevaire,
Claude-Marie Robion….--
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