vendredi 24 mars 2023

Clemenceau le Premier Lycée de Filles de France

Clemenceau le Premier Lycée de Filles de France



Le 10 octobre 1881 le premier lycée de France pour jeunes filles ouvre ses portes à Montpellier dans les locaux du collège communal. Ce lycée est installé au faubourg Saint-Denis dans d’anciens bâtiments achetés par la ville à la famille Castelnau, (anciennement la villa Nouguier devenue clinique du docteur Delpech, puis immeuble Castelnau qui sera acquis par la ville pour y installé le collège-rentrée 1880). De nouveaux bâtiments pour l’internat et l’externat sont édifiés et inaugurés en 1890 par le président de la République Sadi-Carnot.

Jules Ferry est ministre de l’instruction publique et le gouvernement est républicain. La Revue de l’Enseignement Secondaire des Jeunes Filles de 1882 indique ce que l’on attend de ces établissements : « l’enseignement secondaire qui est donné dans ce lycée a avant tout un but désintéressé : le développement du cœur, de l’esprit et du jugement des jeunes filles. Le lycée doit leur donner une instruction solide qui ne le cède en rien à celle des garçons. » (Revue de l’Enseignement Secondaire des Jeunes Filles de 1882)

En cette fin de siècle, l’Etat souhaite « déchristianiser » l’enseignement. Mais l’Eglise n’a pas envie de lâcher une miette  en ce qui concerne les consciences en particulier des jeunes filles, élément essentiel de la transmission des « valeurs » catholiques. (ou plutôt de la bourgeoisie catholique)….

A Montpellier, un lycée pour garçon est déjà installé depuis 1804, dans les bâtiments de l’ancien collège des Jésuites, face à l’Esplanade, des bâtiments de la fin du 17ème siècle (Antoine Giral architecte).

En 1880, une loi à l’initiative du député alsacien Camille See est votée et promulguée : elle institue les lycées pour jeunes filles, soulevant des critiques virulentes de la part des partis conservateurs. Ces établissements ne seront évidemment pas mixtes.

Pourtant ces lycées ne ressembleront pas aux lycées des garçons. Pour le député, il pose les bases d’un tout premier pas : « il faut choisir ce qui peut leur être le plus utile, insister sur ce qui convient le mieux à la nature de leur esprit et à leur future condition de mère de famille, et les dispenser de certaines études pour faire place aux travaux et aux occupations de leur sexe… Il ne s’agit pas de détourner les femmes de leur véritable vocation qui est d’élever leurs enfants et de tenir leur ménage, ni de les transformer en savantes ».

La femme avant tout doit être une bonne maîtresse de maison, faire honneur à son mari et à sa belle-famille par sa culture.

Des établissements secondaires dédiés aux jeunes filles existaient, religieux ou publics, souvent à l’initiative des maires comme Montpellier avec ses 56 000 habitants, établissements fréquentés majoritairement par la communauté protestante. Mais très vite ces établissements manquaient d’élèves et d’argent.

Bonaparte alors premier consul en 1802 avait créé les lycées mais pour les garçons uniquement. En 1808 ils sont intégrés à l’Université Impériale qui reçoit le monopole de l’enseignement. Une tentative en 1867 de créer un enseignement secondaire féminin par Victor Duruy, mais après la loi Falloux de 1850 qui supprime le monopole universitaire pour les établissements secondaires, les grands établissements congréganistes s’épanouissent au détriment des institutions laïques.

Lycée Clémenceau


A l’origine de ce lycée, la volonté du maire Alexandre Laissac, épaulé par la communauté protestante de la ville et des environs. Il a rejoint le  groupe Libre-pensée Victor Hugo de Montpellier. Républicain modéré il prend position contre le cléricalisme, interdisant par exemple les processions dans les rues de la ville mais sans entrer en conflit ouvert avec l’évêché de Montpellier.

La première rentrée scolaire se fait dans l’immeuble assez vétuste Castelnau au 27 avenue de Toulouse (avenue Clemenceau maintenant). 76 élèves, une superficie de 11 000m2 en 1881. Un an avant les Nîmoises et les Lyonnaises, deux ans avant les Toulousaines et les Parisiennes !! En 1882, 100 élèves, en 1885, 297….puis chute des effectifs pendant cinq ans, probablement due à la crise économique, conséquence du phylloxera. (83 élèves en moins). En 1890 hausse à nouveau des effectifs, 220 élèves dont 90 pensionnaires jusqu’à 368 en 1903.

La scolarité n’y est pas gratuite bien que l’établissement soit public. Pour les externes libres en primaire 100 frs par an, 150 frs pour les externes surveillées. En secondaire, 350 frs pour les « libres », 450 frs pour les « surveillées ». Une cotisation de 5 frs pour l’entretien de la bibliothèque, 1,50 frs pour les frais administratifs, la correspondance.. « Les livres et les fournitures scolaires sont à la charge des familles ainsi que les leçons de pianos ». (1frs de 1890 égal environ à 2,37 euros).

Un préau couvert, un gymnase, on agrandit l’externat affecté dans le vieil immeuble Castelnau. Hygiène, solidité posent question, impropre à l’usage…Malgré son charme, ce vieil immeuble va être transformé : galeries, constructions nouvelles, agrandissement de la cour… Des locaux neufs, dans le style haussmannien, des galeries reliant les bâtiments dans le style Eiffel, des constructions typiques de la IIIème République, insérées dans le tissu urbain.

L’internat définitif sera construit à neuf par la municipalité sur des terrains acquis en bordure du chemin de Saint-Martin de Prunet (rue Ernest Michel). Construction terminée en 1887, tout de suite occupée par les élèves installées précédemment dans un vieil immeuble de la rue Mallet.

Une surface totale de 16 495m2, 5 858m2 pour le lycée d’Etat et 10 637m2 pour l’internat municipal.

L’emplacement de la chapelle fait discussion : les élèves protestantes sont majoritaires, il ne s’agit pas de rouvrir une guerre de religion. En avril 1883 le ministre fait des recommandations au recteur : « les chapelles des protestants et des catholiques sont mitoyennes, il est préférable qu’elles fussent plus éloignées l’une de l’autre… »

Les travaux sont vraiment terminés en avril1892. Le montant des dépenses s’élève à la somme considérable pour l’époque de 1 039 806 frs 17 centimes, à partager entre le ministère et la ville. Les nouveaux locaux sont « spacieux, et bien éclairés, avec des classes agréables.. le jardin planté de beaux arbres est un véritable enchantement… l’internat est un vaste local qui pourrait accueillir deux cent quarante enfants dans des conditions d’hygiène et de salubrité vantées par les prospectus comme étant un atout …. ».

La loi du 27 février 1880 fixe les matières enseignées : enseignement moral, langue française, lecture à voix haute, langue vivante, littérature ancienne et moderne, géographie et cosmographie, histoire nationale et aperçu de l’histoire générale, arithmétique, éléments de géographie, chimie, physique et histoire naturelle, hygiène,


économie domestique, notions de droit usuel, dessin, musique, gymnastique.

Discipline et tenues réglementaires : interdiction de fréquenter les élèves d’autres classes par exemple, maquillage interdit, pour sortir gants obligatoires, La tenue quotidienne est le tablier noir avec le nom brodé en rouge. Après 1914 le tablier devient beige. En hiver, une jupe bleue, un chemisier de même teinte à pois blancs, pour sortir un manteau bleu marine et un chapeau de feutre. En été un tailleur blanc à pois bleus, un chapeau de paille. Le choix des souliers est libre. Tout est taillé sur mesure par un tailleur de la rue de La Loge.

Les sanctions sont nombreuses : retenue, privations de sortie, suppression d’une partie des vacances scolaires….

Le lycée n’est pas coupé du monde. Pendant la Première Guerre Mondiale il est transformé en hôpital militaire.

georges-clemenceau.mon-ent-occitanie.fr/l-etablissement/un-lieu-historique/

 

Le lycée va suivre son chemin. Rénové depuis peu par la Région Occitanie. Il est devenu mixte en 1970. En son sein un collège avec 16 classes et près de 450 élèves, un lycée et environ 1300 élèves. Une section franco-allemande Abibac, un enseignement théâtre-musique-danse avec le Conservatoire de Montpellier et un enseignement de l’occitan pour les grandes sections…..

Dans une de ses cours, un parc séculaire aux espèces protégées. Un petit bâtiment récent agrandit l'espace restauration...


Sources et pour en savoir plus : Didier PORCER *www.etudesheraultaises.fr/publi/la-construction-du-lycee-clemenceau-de-montpellier-premier-lycee-de-jeunes-filles-de france/#:~:text=Le%20Lycée%20Clemenceau%20à%20Montpellier,un%20Lyc--- La Gazette de Montpellier Journées du Patrimoine 2020 Deux Lycées dans l’Histoire --- /georges-clemenceau.mon-ent-occitanie.fr/l-etablissement--- /www.montpellier.fr/4227-alexandre-laissac-1834-1913-.htm-- wiipedia.org---

 



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