jeudi 6 avril 2017

Fin de Règne - Tournant historique ou Grande cabriole ?

Fin de Règne – Tournant historique ou Grande Cabriole ?

Dans notre pays la deuxième moitié et surtout le dernier quart du 18ème siècle annoncent une fin de règne. Affaires, fortunes qui changent de mains, faillites, spéculations en tout genre, capitalisme immoral, coups de dé en économie, le tout accompagné de remises en question philosophique, sociologique, sociale, technique, religieuse…. Un monde fini et un autre en devenir.
Nous allons nous pencher sur le cas de deux descendants du seigneur de Vallabrix Mathieu de Bargeton. Celui-ci et sa famille seront dès la fin du 15ème siècle influents sur notre province, présents dans les coulisses de l’Histoire, consuls, receveurs de la taille, greffiers, avocats, prêteurs ou simplement grands propriétaires. A l’approche de la Révolution de 1789, le vent a tourné. Plusieurs branches ont immigré, Angleterre, Hollande, Russie, Prusse, même Perse. D’autres branches sont en train de s’éteindre faute d’enfant pour continuer la lignée. Ce sera le cas des Bargeton Valabris avec Arnaud de Vallabris, le Brigand de Valabris que nous avons vu ici dans un autre texte.
La branche Valabris-Massargues d’Arpaillargues qui devient les Bargeton La Tour du Pin Verclause est un résumé de tout cela. En particulier les deux descendants dont nous allons parler.
Ils sont les fils d’Alexandre-Mathieu de Bargeton et de Marie-Charlotte de Quentin de Champlost, petits-fils de Jacques de Bargeton-Massargues et de Marie-Thérèse de la Tour du Pin-Gouvernet-Verclause. Une chronique (85J268 adg) de 1873 et d’autres archives nous racontent la fin peu élogieuse de ces deux frères. Ils auront connu la royauté de Louis XVI, la Révolution, la Constituante, la Terreur de Robespierre, Bonaparte qui devient Napoléon, et Louis XVIII…et même Charles X pour l’un d’eux. De quoi perdre le Nord et oublier tout esprit chevaleresque et toute morale chrétienne !
-Alexandre-Marie-Louis-Charles de Bargeton-Verclause, comte de Verclause – né le 12/3/1767 à Uzès. Il est admis en 1775 à l’école royale militaire de La Flèche. (Procès-verbaux des Preuves de noblesse des Jeunes Gentilshommes- Gallica BNF) – 29 ans de service –pensionné 1200 livres en 1814 pour perte d’un membre – chevalier de St Louis le 17/8/1822. Il décède avant le 2 septembre 1836. Des mauvaises langues disent qu’il a perdu une main en punition après avoir triché aux cartes. L’épisode se serait passé à Berlin où il menait « grand train », vivant essentiellement du jeu.
Pendant la Révolution un PV raconte « Alexandre-Louis-Marie  Bargeton, inscrit dans la Seine, lieutenant au régiment de Hainaut partit en 1790 en Prusse pour se marier, usant de faux passeports » (Procès-verbal du Directoir exécutif an V et an VIII-1797/1800- Police générale Inventaire regi T6 PD Cheynet 2001)
Il avait été militaire, nous dit la chronique, et vivait à Paris fin 18ème siècle (ou plutôt début 19ème ?). Il avait une boutique de prêteur sous les piliers des halles. Il avait une chambre dans ce quartier «interlope» où il allait le matin se déguiser en «vieux juif», costume ordinaire, lunettes et barbe blanche. Le soir venu il rentrait dans sa chambrette, se retransformait en personne respectable et regagnait près du Palais Royal, son bel appartement qu’il habitait avec sa famille. « Il s’habillait selon son rang et brillait dans les salons les plus en vue, les foyers de théâtre où par son esprit, son opinion il faisait autorité. Il était bel homme, très rangé. Il avait de l’audace, de belles manières, une grande facilité de paroles 
».
On nous dit que sa vie n’avait pas été sans éclat. Il avait abandonné sa première épouse (Sophie de Quadt) dans un hôtel, qui survécut un temps et accoucha grâce à la générosité d’un pasteur M Rabant qui accueillit le bébé Paulina-Sophia et la  maria bien à 18 ans au comte Nagel gentilhomme hollandais. Mme Rabant était d’Uzès, fille du médecin célèbre Cabrol. Un acte filiatif de Liège nous indique que Paulina Sophia Albertina de Bargeton-Verclause épouse le baron Constantin Sigismond van Nagel de Wish.. Alexandre son père avait épousé en premières noces Sophie de Quadt de Gastrop sa mère, décédée en 1806.  Paulina était une enfant naturelle légitimée par le mariage de ses père et mère. Alexandre passait pour un coureur de jupons, pas très sympathique avec les femmes, égoïste, un tantinet lâche !!

Le 28 juin 1822 il épouse Jeanne-Catherine Perrette Lantelme (1788-1873) de Genève. Une fois veuve, elle touchera la pension militaire de son mari.. Ils vivaient à Paris.
Sophia Paulina décède le 2 février 1849 à 55 ans, son époux Constantin Sigismond van Nagell le 1er février 1849 à 50 ans. Epidémie, accident, maladie ? La Cour d’Appel de Paris (Gazette des Tribunaux avril 1851) nous raconte une histoire bien étrange au sujet d’Alexandre. A la mort de sa fille Sophia-Paulina, l’héritage Nagel étant conséquent, la veuve Lantelme attaque les héritiers au profit de son fils Jean-Auguste supposé fils d’Alexandre. Celui-ci, « de sac et de cordes » nous dit l’arrêt, est mort interné dans la maison de santé du docteur Pinel en 1836 à Chaillot. Jean Auguste d’après son acte de naissance, est né en 1830 de Victoire Bertrand et d’Achille Louis d’Utruy. On découvre que Victoire un nom d’emprunt, en fait Jeanne Perrette Lantelme, entretient une relation adultérine avec Achille depuis au moins 1829, date d’une autre naissance reconnue par les deux. Donc Jean Auguste n’a pas pour père Alexandre de Bargeton-Verclause et l’héritage de sa soi-disant demi-sœur lui passe sous le nez ! Le mariage d’Alexandre et de Jeanne Lantelme avait fait naître à Genève le 3 janvier 1825 une petite fille Louise-Sophie décédée le 16 novembre 1829.

-Deuxième fils, frère du précédent, Augustin ou Alexandre-Scipion Basile de Bargeton-Verclause né le 15-9-1770 à Arpaillargues est admis dans cette école de la Flèche en 1781. Il se qualifie de Bargeton-Durfort. Il est chevalier en 1815. (Service historique de l’Armée). Beau cavalier, viveur, dépensier, il avait mangé toute sa fortune en province et à Paris.
Le nom de Durfort venait d’une terre qu’il possèdait  et non d’une parenté avec les Durans de Durfort. Il avait un peu plus de moralité ou bien moins d’audace que son frère. Il avait obtenu l’emploi de percepteur de Roquemaure par l’entremise de parents. Il piocha dans la caisse hardiment. La famille restitua les sommes soustraites et le poussa dans les bras d’une vieille fille, un peu sotte, peu avantagée par la nature Mlle de St Victor... Augustin Scipion Basile de Bargeton épouse donc à 32 ans le 13 floral An 10 (1802) Louise Andrette d’André 35 ans, née le 8/8/1766 fille de Joseph Charles d’André de St Victor et de feu Etiennette Corougi ( ?). Les témoins ou assistants au mariage sont  Gaspard d’Arnaud de Vallabris (Le Brigand de Valabris), mais aussi un cordonnier, un menuisier, un faiseur de bas, en ces périodes on n’est jamais assez prudent ! (archi d’Uzès 3E ter).
Durfort était charmant, de belle taille, des traits réguliers, de l’esprit, de la gaieté, et une certaine distinction. Louise lui confia sa fortune qu’il croqua à belles dents. Il installa sa maîtresse Justine Gibert au domicile conjugal avec l’assentiment de son épouse. Il mourut assez rapidement à Uzès, les créanciers, les procès, sa vie passée eurent raison de sa santé.
Il décède le 30/3/1824 à 4h du soir. Il habitait rue de la Place à Uzès. Il avait 53 ans (arch d’Uzès 4E5 n°52). L’acte de décès confirme qu’il est né à Arpaillargues, ancien capitaine d’infanterie, chevalier de St Louis, ancien percepteur des contributions directes de Roquemaure. Son épouse Louise de St André est vivante à cette date.
Les deux témoins au décès sont Jean Gondin 45 ans propriétaire et Laurent Didière 33 ans fabriquant de bas. Le recensement d’Uzès de 1820, confirme que Durfort est encore propriétaire de trois maisons au N° 384 qu’il loue. Une partie de sa maison N° 751 était louée, l’autre partie était habitée par sa famille, lui, 49ans et son épouse, 52 ans  plus une domestique Anne-Justine Gibert veuve Charvidal 47 ans qui vient de St Victor, sa maitresse depuis vingt ans.
Sa femme lui survivant, reporta toute son attention sur Justine la maîtresse de son défunt mari et lui légua le restant de ses biens en récompense des moments agréables qu’elle avait prodigué à son époux. Louise d’André quitte ce monde en 1833.




Sources : adg - adh- Couradou Mathieu de Bargetonnov2016- photos façade renaissance collection privée

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