jeudi 3 janvier 2019

Les Rois Mages






(Les Rois-Mages -Mosaïque Basilique St Apollinaire  Ravenne  An 600)

 Les Rois Mages :

On trouve  mention du voyage des Rois-mages à Bethléem dans l’Evangile de Saint Mathieu : « Voici que des mages venus d’Orient arrivèrent à Jérusalem disant : où est le roi des Juifs qui vient de naître car nous avons vu son astre à l’Orient et nous sommes venus pour l’adorer ».

Roi, mage, deux ou trois, les récits se contredisent. L’évangile de St Luc ne semble mentionner que les bergers en adoration devant l’enfant et pas de mages. Les clercs médiévaux, et avec eux les conteurs populaires ont écrit différentes versions de l’histoire des rois mages. Le plus célèbre Jean de Hildesheim au 14ème siècle nous raconte ce que fut le voyage des Trois Rois. Voici résumée sa version pleine de symboles :

Melchior en arrivant à Jérusalem se perd dans les ruelles, un épais brouillard obscurcit le ciel et il ne voit plus l’étoile qui l’a guidé jusqu’alors. Il attend une éclaircie du ciel, qui arrive en même temps que les caravanes de Balthazar et de Gaspard. Ils sont accompagnés par une longue suite de dromadaires, de domestiques et de gens qui ont entendu parler de l’étoile et du roi qui vient de naître (y-a-t-il parmi ces personnes nos provençaux de la Pastorale ?!!). Couleurs, parfums, exotisme, le balancé des animaux, le pas des hommes et des femmes, tout est annonce de renouveau, d’espoir. Même la poussière soulevée est lumière dorée.

Hérode par sa police a appris la présence des souverains étrangers. Il les fait venir dans son palais. Il leur fait promettre de revenir pour discuter astrologie avec lui, mais en fait c’est pour découvrir où se trouve le nouveau-né. Ses propres astrologues lui ont dit que cet enfant était un danger pour lui et il se promet de le faire disparaître. Dans l’Evangile de Saint Mathieu l’attitude d’Hérode est un peu différente. Il dit aux mages : «quand vous l’aurez trouvé (l’enfant), avisez moi afin que j’aille aussi lui rendre hommage ».

L’étoile brillant à nouveau, les mages se remettent en route et parviennent jusqu’à une grotte où l’enfant est né. L’étable est transformée dans cette version en grotte et la crèche-sanctuaire  est enfouie profondément dans la terre protectrice et maternelle, comme une deuxième naissance de l’univers.

Melchior offre à l’enfant l’or comme à un roi, Balthazar la myrrhe comme à un homme, Gaspard l’encens comme à un Dieu. L’encens sert à parler à Dieu, la myrrhe lave les souillures des hommes, et l’or est ce qui est le plus précieux et digne d’un roi.

L’étoile selon Jean Chrysostome s’arrêta sur le faîte de l’endroit où l’enfant était né, puis pointa sa tête d’un rayon de lumière et enfin disparut à jamais. Selon Grégoire de Tours dans son livre sur les miracles, l’étoile tomba dans un puits à Bethléem, appelé depuis le puits de l’Etoile ou puits de Mages.

Avertis par un songe commun d’un danger s’ils repassaient par Jérusalem, les Rois Mages prennent des chemins de traverse pour regagner leurs royaumes. De rage, Hérode envoya ses soldats sur tout son territoire pour tuer tous les enfants mâles de moins de deux ans.

A l’aller, les trois rois ont marché douze jours.  Sur le chemin du retour au bout de deux ans, ils ne parviennent pas à se séparer et se retrouvent tous les trois au Mont-Victorial ou Montagne de Vaux. Ils décident qu’ils se feront enterrer au pied de cette montagne dans un tombeau commun. Leur mort leur fut annoncée par une étoile aussi brillante que celle qui les mena en Judée.


Marco Polo, le grand voyageur, affirme en 1268 que les trois rois reposent toujours dans leur sanctuaire dans la ville de Saba au pied de la montagne de Vaux. Pour d’autres, les corps des Rois Mages auraient été remis à la mère de l’Empereur Constantin, Hélène et reposeraient maintenant à Cologne depuis le 12ème siècle.
  (Chasse des Rois-Mages Cathédrale de Cologne)

Selon la légende les trois rois auraient donné leurs royaumes à des princes de leur famille dont celle depuis porte le nom de Vaux ou de Baux par déformation. Cette famille construisit un château en 1200 à Saint-Jean d’Acre où elle rassembla tous les manuscrits concernant les rois mages. Elle va suivre le sort des Templiers et se retrouver en Provence. La famille des Baux de Provence revendique cette filiation, descendant directement de Balthazar. En fait, vers l’an 1000, des seigneurs locaux s’emparent du rocher des Baux et choisissent pour emblème l’étoile du Berger, à seize rais, l’étoile de la crèche. Légende répondant à une nécessité en cette période de croisade ou réalité d’une filiation ? Toujours est-il qu’une « santo estello » est gravée sur les armoiries de cette famille. Nos traditionnelles Pastorales de Noël seraient originaires du village des Baux et auraient essaimé au fil du temps dans toute la Provence et le Languedoc, en passant par la Camargue. Près de chez nous, à voir la Pastorale des Ravis de la Carcarie qui nous régalent toutes les années pour les fêtes de Noël..
  

            (Atlas Catalan 14ème siècle  -Lexilogos Mots et Merveilles d’ici et d’ailleurs)

Ces rois ne furent pas admis tout de suite dans la symbolique chrétienne. C’est seulement au 6ème siècle qu’on connaît leurs noms grâce en particulier à l’Evangile Arménien de l’Enfance. Dans l’imaginaire populaire ils seront d’abord mages, astrologues venant de Perse, puis rois-mages, dont les royaumes s’étendaient pour Melchior en Nubie et Arabie, pour Balthazar, les terres antiques de Saba, et la Perse pour Gaspard.

Charlatans, sorciers pour certains, sacrilèges pour des penseurs comme Origène. Même bien plus tard à la fin du Moyen Age, un théologiste Jean Deslions les maudit car leur fête donnait lieu à des débauches. Pourtant dès le 14ème siècle, la légende des trois rois apportait un merveilleux qui nourrissait le sentiment religieux. La symbolique en était forte : un enfant, l’innocence, le renouveau, pointé du «doigt » par le rayon de lumière d’une étoile, à qui l’on offre des présents toute à la fois comme à un roi, un homme, et un dieu. Une espérance ! Il est pour les alchimistes de l’époque « régulus », l’or philosophique…Et après les horreurs de la Guerre de Cent Ans, les épidémies, les routiers, les gens avaient bien besoin de merveilleux, de croire, de rêver, d’espérer.

Ces rois venaient du Levant, de l’est, le lieu d’où surgit la lumière, l’énergie du soleil, le feu qui repousse l’obscurité froide et mortelle (on n’a pas encore inventé l’électricité et l’éclairage à la bougie ou à la lampe à huile n’est pas fait pour rassurer pendant les longs soirs d’hiver).

Ils vont adorer l’enfant après les animaux et les bergers, qui représentent l’humilité. Les rois-mages eux symbolisent la connaissance, la science face à l’innocence, face à la primitivité. Par ailleurs ils témoignent en tant que non-juifs au nom de l’humanité entière en un message universel.

Au Moyen Age les trois rois vont représenter aussi les trois âges de la vie et les trois "races" humaines : Melchior est un homme blanc à barbe et cheveux blancs, Balthazar noir à barbe noire et dans la force de l’âge, Gaspard, asiatique, adolescent imberbe, couleurs que l’on retrouve sur certains santons anciens.  

Ils représentent aussi les trois pouvoirs, les trois aspects de Jésus : royal avec l’or, sacerdotal avec l’encens, et spirituel avec la myrrhe. Il aurait fallu un quatrième mage pour représenter l’Amérique et ses indiens. Mais Christophe Colomb ne l’avait pas encore découverte.

Une autre légende est associée à celle des mages. Adam chassé du Paradis avait emporté des trésors, l’or, la myrrhe et l’encens et les aurait cachés dans la caverne de « la vie du silence » creusée au pied du Mont-Victorial.

Zarathoustra (8ème/7ème siècle avant J.C) en Perse aurait aussi annoncé la venue du sauveur : «à la fin des temps, au moment de la dissolution qui les termine, un enfant sera conçu et formé dans le sein d’une vierge, sans qu’un homme l’ait approchée. On verra une étoile brillante au milieu du ciel sa lumière l’emportera sur celle du soleil. Quand se lèvera l’astre que des courriers soient envoyés par tous, chargés de présents pour l’adorer…. ».

En Finlande, une légende dit que le quatrième roi mage était finlandais. Il habitait tout en haut de la terre, trop au nord et il n’aurait jamais pu atteindre Bethléem. Il s’habillait de rouge et avait une barbe blanche. Cela rappelle-t-il quelqu’un ?

Epiphanie, fête des rois-mages ou fête de la lumière célébrée primitivement à Noël, fête de la présentation au temple du Christ le premier dimanche de janvier, traditions diverses selon les régions….mais surtout moment de convivialité où l’on partage la galette plate et ronde, symbole de l’univers, contenant une fève qui désignera le roi du jour. Les hommes se partagent cette galette au moins depuis l’an 1300, la fève étant à l’origine souvent une vraie fève.

Traditionnellement ce roi désigné par le sort bénéficiera de trois privilèges : santé, fortune, sagesse pour toute l’année.
Bonne Epiphanie et Bon Appétit !


 Photo perso chemin des Capitelles St Quentin la Poterie 2010

Sources : Claude Mettra  - Les Rois Mages 1983  - R Trexler Le voyage des mages à travers l’histoire A Colin 2009  - Temps liturgiques  Catholiques.org  Qui étaient les rois mages  - couradou novembre 2011 site internet Vallabrix ou médiathèque --







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